Cathy, ou le bonheur australien (photo)

Cathy Freeman, après la cérémonie d’ouverture, a encore arrêté le temps : en gagnant le 400 m des Jeux de Sydney, elle a répondu à l’attente de 19 millions d’Australiens, toutes races confondues, qui rêvaient tous, comme elle, depuis si longtemps d’enlever cette médaille d’or. Elle a arrêté le temps quand elle a passé plusieurs longues minutes toute seule, assise sur la piste, hébétée, sans que personne n’ose l’approcher. Dans le stade, un public en extase, 110 000 personnes debout, athlètes, journalistes et officiels compris, applaudissaient à tout rompre. Et elle, Cathy, elle ne souriait pas, ses yeux étaient hagards, et dans sa combinaison intégrale jaune-verte-grise, on avait l’impression qu’elle venait de tomber d’un vaisseau spatial, au beau milieu du stade olympique. Puis, elle a enlevé ses chaussures, tout en continuant à regarder le public avec un air incrédule, s’est levée et a commencé à marcher pieds nus, très lentement. Enfin, elle s’est mise à sourire. Radieuse, elle a commencé à danser, en tenant dans la main deux drapeaux, celui de son peuple aborigène et celui de son pays de naissance. Vers la fin de son tour d’honneur, Cathy a vu sa mère dans la foule, l’a embrassée, puis elle s’est mise à trottiner vers la ligne d’arrivée qui l’avait faite reine, la combinaison ouverte, avec l’air décontracté de quelqu’un qui ferait un petit footing sur une plage de son Queensland natal. Revenue sur terre, elle s’est alors rendu compte que les concurrents du 400 m masculin, Michael Johnson en tête, attendaient qu’elle ait fini son tour d’honneur, et que le stade se calme, pour commencer leur course. Alors, elle a fait signe : «Chut», à la foule, et commencé son marathon médiatique.