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Actualités - OPINION

Vingt-deux, voilà les flics !

Raghida Dargham, libanaise et druze bon teint, arrivée à l’AIB le 19 juin avec un groupe d’autres journalistes (1) de la suite de Kofi Annan, se voit confisquer son passeport par un agent de la Sûreté générale. On le lui restitue, invalidé, le lendemain, 20 juin. Les milieux de presse retiennent leur souffle, sachant que le secrétaire général de l’Onu va intervenir vigoureusement auprès du ministre libanais de la Police pour le faire revenir sur son initiative. C’est, depuis quelques jours, chose faite. Amine Gemayel, libanais et maronite bon teint, se voit refuser, au terme d’une pantalonnade grotesque qui se clôt à Roissy en France, un bref passage au Liban. Par qui ? L’explication confuse des officiels met en cause trois ministères au moins pour brouiller les cartes. Peu pugnace, le principal intéressé, ancien chef de l’État, n’accuse ni ne se défend. Il applique sans doute en cela le civisme des premiers phalangistes, dont son père était un membre éminent. Garde à vous devant la patrie ! Si Murr(2) fût-elle... Il y a pourtant des histoires de barbouzes bien plus drôles et mieux réussies. En 19.., Paris attendant la visite officielle d’un chef d’État européen. Dans ces cas-là, répétitif, le protocole, on le sait, doit être respecté à la lettre. Or, tous les préparatifs se déroulaient parfaitement jusqu’à ce que l’on pense à Mme T, épouse d’un haut dignitaire de l’État, qui, légèrement déstabilisée à la suite d’un choc, avait des comportements fantasques : fous rires à l’opéra, abandon de sa voiture de fonction pour s’engouffrer dans le métro, et autres caprices. Réunion, au ministère de l’Intérieur, avec son mari, en petit comité. Le ministre de l’Intérieur ou de la Police, comme on voudra, de l’époque déclare, en regardant le très officiel époux : «Eh bien, le mieux, selon nous, est que Mme T aille passer quelques jours aux Baléares avec ses deux cousines... oui, je sais, elle n’a pas de cousines, mais nous y suppléerons». Et c’est ainsi que la dame s’embarqua pour Majorque en compagnie de deux barbouzes déguisées en femmes, perruques et bas de nylon, où elle resta trois jours. Elle aima l’île, et la République était sauve. Ah ! comme ce serait réconfortant et salubre de voir notre vice-président, habillé Dior haute couture, sur mesure bien sûr, et coiffant perruque, prendre par le bras un dévoué et fier brigadier en civil pour rendre visite, dans la Békaa, à la super-barbouze, après avoir fait des séances d’orthophonie, et savoir enfin ce qu’elle dit de lui en son absence. Et puis quelque chose clocherait : par exemple Murr ne se serait pas rasé les jambes, et cette forêt de poils plaqués par les collants mettrait l’interlocuteur sur ses gardes. Et de fil en aiguille on en arriverait à l’inévitable «Chlonak akhi Michel, ahla oua sahla...» et à la quadruple embrassade de deux agents. Mais cela n’arrivera pas, parce que les Arabes, à l’exception des Égyptiens, sont sérieux comme des papes. Raghida Dargham a récupéré son passeport, mais vous n’aurez peut-être pas cette chance. Amine Gemayel est resté à Paris ; c’est vrai qu’il manque d’audace ce garçon. Se voir annuler son identité par un type en casquette, c’est embêtant en diable. Répondre au téléphone juste avant le départ, c’est bien élevé, mais crétin en diable. (1) Directrice du bureau du quotidien al-Hayat à New York. (2) «Amer», en arabe.
Raghida Dargham, libanaise et druze bon teint, arrivée à l’AIB le 19 juin avec un groupe d’autres journalistes (1) de la suite de Kofi Annan, se voit confisquer son passeport par un agent de la Sûreté générale. On le lui restitue, invalidé, le lendemain, 20 juin. Les milieux de presse retiennent leur souffle, sachant que le secrétaire général de l’Onu va intervenir...