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Actualités - REPORTAGES

Bande frontalière - Tournée du ministre des Affaires sociales La création d'un fonds pour le Sud est indispensable, estime Moussa (photos)

Sourires, revendications et espoirs attendaient lundi le ministre des Affaires sociales, M. Michel Moussa, dans tous les centres relevant de son organisme dans la bande frontalière récemment libérée. Ces centres situés dans diverses régions n’ont, pour la plupart, jamais cessé d’offrir aux citoyens les services indispensables, même aux heures les plus noires de l’occupation. Le renforcement des structures existantes, un recensement des besoins de la population et la création d’un fonds pour le Liban-Sud (prêts à moyen et long terme) ont été considérés par le ministre comme les étapes d’un processus de développement durable dans la région. La tournée effectuée par le ministre et la directrice générale du ministère, Mme Neemat Kanaan, accompagnés des directeurs de département de ce même organisme, a englobé Naqoura, Marwahin, Beit Kif, Aïta ach-Chaab, Rmeich, Hanine, Bint-Jbeil, Aïtaroun, Adaïssé, Marjeyoun et Khiam. Certains de ces centres sont mieux équipés que d’autres, mais tous témoignent du courage des personnes qui ont choisi d’y travailler sans relâche, malgré les difficultés et les pressions. Leurs directeurs (souvent des directrices) devaient se rendre chaque mois à Beyrouth pour prélever les salaires et s’approvisionner autant que possible en médicaments. «Malgré tous les obstacles, j’ai choisi de rester sur place», raconte une éducatrice dans une garderie sise au centre de Rmeich. Mais, à l’image d’une grande partie des villages sudistes qui étaient occupés, ces centres médico-sociaux souffrent d’un manque chronique, d’une part, au niveau des équipements et des médicaments, et d’autre part, au niveau de l’infrastructure inexistante. L’eau potable et l’électricité sont des revendications qui se retrouvent sur toutes les lèvres. Généralement, les services médicaux offerts dans ces centres sont du domaine de la médecine générale, de la gynécologie et de la pédiatrie. Consultation et médicaments coûtent le prix symbolique de 3 000 livres libanaises. «Nous avions continuellement un manque de médicaments», explique le Dr Siham Droubi, directrice du centre de Aïta ach-Chaab. «Outre le ministère, la Finul et l’Unicef nous ont quelquefois présenté des aides. Pour les médicaments relatifs aux maladies chroniques, nous avons reçu des promesses de l’association YMCA. Mais ce n’est toujours pas assez et nous avons de l’espoir que le ministère nous soutiendra davantage dorénavant. Nous manquons souvent d’équipements : nous n’avons pas d’appareil d’échographie, à titre d’exemple». Faire la tournée de ces centres permet de constater l’ampleur de ce qui reste à accomplir dans la région. Les besoins sont énormes Les besoins sociaux sont énormes : possibilités d’emplois quasi nulles (comme le confirment des habitants interrogés), terres inexploitées, infrastructure inexistante… M. Moussa n’est pas parti les mains vides : à tous les centres relevant de son ministère, il a distribué des formulaires qui permettront d’opérer un premier recensement des besoins sociaux des habitants. Le remplissage de ces formulaires sera de la responsabilité des employés des centres. Ils viseront à faire le point sur les besoins des habitants de la bande frontalière que ce soit au niveau des familles, des cas sociaux ou, plus précisément, des anciens détenus libérés et leurs proches. «Les résultats de ce recensement nous serviront de base (et à d’autres aussi, probablement) pour toutes les stratégies de développement social dans cette région», estime M. Moussa. «Il serait impensable de procéder sans cette première mesure qui nous permettra de sonder les besoins de la population». À la question de savoir combien de temps prendra cette première étape, il l’évalue à un mois environ. Interrogé sur les priorités en matière de développement, M. Moussa dit : «Il est évident qu’il faut commencer par rétablir l’infrastructure. Sans elle, en effet, il est impossible de concevoir un quelconque développement». L’emploi demeure cependant le souci majeur concernant cette région. «Cette question est une priorité, surtout en raison du nombre de personnes employées précédemment en Israël et qui se retrouvent au chômage», fait-il remarquer. Comment l’État compte-t-il s’y prendre ? «L’idée à laquelle je tiens particulièrement est celle du fonds social», explique M. Moussa. «Il s’agit d’une caisse où tout l’argent, qui pourra provenir de différentes sources, servira à des prêts à moyen et long terme consacrés à la population de la région. Ces sommes leur serviront de tremplin pour fonder de petites entreprises artisanales. C’est la seule façon de créer des emplois à plus ou mois courte échéance. Nous sommes en train de développer cette idée actuellement dans le cadre du comité pour le développement du Liban-Sud». Abordant le sujet des centres, Mme Kanaan précise : «Ces centres ont été créés graduellement dans les années 80. Notre stratégie de développement dans la bande frontalière sera principalement basée sur le renforcement des structures existantes. Nous n’aurons pas besoin de créer davantage de centres, les nôtres étant très bien répartis au Liban-Sud». Un problème : le chômage Ce sont justement ces arguments que M. Moussa et Mme Kanaan ont avancés lors d’une des étapes de la tournée qui a consisté, à Bint-Jbeil, en une réunion des responsables avec tous les directeurs de centres. Ces derniers ont été appelés à présenter leurs doléances aux ministres. À la question de savoir s’il ne redoutait pas un exode rural massif vers Beyrouth, M. Moussa répond : «Ces habitants n’auraient pas plus de chances de trouver des emplois dans la capitale. Je compte beaucoup sur le fonds social, dont nous débattons actuellement, pour rétablir la situation». Cependant, le chômage reste l’obsession majeure de bien des habitants interrogés dans les villages. Dans l’un des villages les plus démunis, visités lundi, Beit Kif, le moukhtar, Hajj Habib Hemayed, nous explique que plus de quatre cents jeunes gens se retrouvent aujourd’hui sans aucune perspective d’emploi. «Des huit mille habitants de cette localité, seuls 700 sont restés sur place», explique le vieil homme en habit traditionnel. «Les forces d’occupation nous empêchaient de cultiver nos terres». À Rmeich, une jeune couturière évoque les difficultés de vivre qu’elle connaît ainsi que son mari, garagiste. «Nous serons certainement obligés de nous rendre à Beyrouth», raconte-t-elle. Autre cas tragique : le village de Hanine, complètement rasé en 1976 lors d’affrontements avec l’«Armée du Liban libre» de Saad Haddad. «Nous demandons à l’État de nous aider à reconstruire nos maisons», déclarent au ministre Moussa les habitants qui sont revenus vivre sous des tentes sur place, après 24 ans d’exil. «Ce village est un cas spécial qui ne requiert pas de mesures ordinaires». L’une des dernières étapes de la tournée du ministre dans la bande frontalière a consisté en la visite de la prison de Khiam. Celle-ci attire toujours autant de visiteurs venus découvrir l’horreur dans laquelle vivaient les détenus. À la sortie du site, M. Moussa, qui parlait aux journalistes, est abordé par un ancien détenu qui s’est plaint du fait de la libération d’anciens membres de l’ALS, précédemment geôliers à Khiam. «J’ai rencontré l’un d’entre eux qui avait quitté les rangs de la milice, il y a quelques années, et qui a été recruté depuis par l’État, sans aucun jugement», s’indigne-t-il. «Imaginez mon sentiment quand j’ai reconnu cet homme dans la rue». M. Moussa a clôturé sa tournée par une visite à l’évêque de Marjeyoun, Mgr Élias Kfoury, au siège même de l’évêché.
Sourires, revendications et espoirs attendaient lundi le ministre des Affaires sociales, M. Michel Moussa, dans tous les centres relevant de son organisme dans la bande frontalière récemment libérée. Ces centres situés dans diverses régions n’ont, pour la plupart, jamais cessé d’offrir aux citoyens les services indispensables, même aux heures les plus noires de...