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Actualités - OPINION

Le gouvernement contre l'Etat

Pourquoi le gouvernement est-il opposé à ce que l’État recouvre sa souveraineté sur les régions libérées du Sud ? Pourquoi cette insistance à poser des conditions sans cesse renouvelées à l’application d’une résolution dont le Liban avait toujours, dans le passé, réclamé l’application inconditionnelle ? Tout a été mis à contribution pour trouver des prétextes à la non-application de cette résolution. À commencer par la décision du Parlement de considérer les «sept villages» situés à la frontière nord d’Israël comme appartenant au Liban et devant être inclus dans la 425 avant de découvrir que ces villages font partie, depuis 1923, de la Palestine. Puis, nouvelle condition : le retour des réfugiés palestiniens dans leurs foyers. Faute de quoi, personne ne pourrait les empêcher de prendre les armes et de mener des opérations contre Israël. Les Nations unies, à qui il a été demandé de désarmer préventivement les camps palestiniens, n’ont pas donné suite à la requête libanaise. Une autre condition est alors posée : la restitution au Liban des «fermes de Chebaa». Mais la revendication libanaise se heurte à l’attitude ambiguë des Syriens qui, tout en soutenant le Liban, donnent leur accord à la position formulée par le secrétaire général de l’Onu. Après le retrait israélien du Sud, le gouvernement change de tactique et mène bataille contre l’envoi de l’armée au Sud. Deux arguments sont avancés pour justifier cette position : – L’armée ne doit pas servir à assurer la sécurité d’Israël. L’argument est curieux, car toutes les armées du monde sont déployées aux frontières pour les protéger contre une éventuelle agression extérieure, prévenant par la même occasion tout acte hostile contre le pays voisin. – Deux forces armées, en l’occurrence l’armée libanaise et les forces de l’Onu, ne peuvent pas se déployer dans une même région, car cela entraînerait des problèmes de commandement quasiment inconciliable. L’argument est étonnant venant de la part du Pouvoir. Comment explique-t-il, dans ce cas, que deux armées, l’une libanaise et l’autre syrienne, coexistent depuis plus de dix ans sur la majeure partie du territoire libanais ? Faut-il pour éviter des problèmes de commandement que l’armée libanaise réintègre ses casernes ? Nous en sommes là. Le gouvernement se bat avec beaucoup de détermination pour empêcher que l’État dont il a la charge ne recouvre sa souveraineté sur son territoire. Pourquoi ? Parce que la libération du Sud met un terme au statu quo qui a régné depuis 1990. L’occupation israélienne qui rendait pratiquement impossible toute solution du problème libanais et empêchait la mise en application de l’accord de Taëf a pris fin. Les problèmes jusque-là occultés vont désormais se poser. À commencer par l’entente nationale qui, de l’avis des dirigeants eux-mêmes, continue de poser problème. Le chef du Parlement l’a d’ailleurs publiquement reconnu dans un discours prononcé à Baskinta. La mise à l’écart de la communauté chrétienne ne peut plus durer. L’accord de Taëf qui avait prévu une participation égalitaire au pouvoir des deux communautés chrétienne et musulmane n’a jamais été respecté. Il est temps que les choses changent. Vient ensuite la question de la présence syrienne au Liban qui suscite un débat entre ceux qui l’estiment nécessaire – «les Libanais ne sont pas encore en mesure de s’autogérer» – et ceux qui la considèrent comme un obstacle à l’exercice par l’État de sa souveraineté. Les avis politiques sont partagés, mais un fait est certain : l’opinion publique, qu’elle soit chrétienne ou musulmane, réagit de plus en plus nerveusement à cette présence. D’où la nécessité de procéder rapidement à une révision en profondeur de la nature des rapports entre les deux pays. Ce qui était accepté par les Libanais avant le 24 mai – date de la libération du Sud – l’est beaucoup moins aujourd’hui. Le gouvernement actuel est-il en mesure de faire face à ces problèmes ? Peut-il lier entre eux les trois volets dont est constitué le problème libanais : – La libération du Sud et la fin de l’intervention israélienne dans les affaires intérieures du Liban. – Le recouvrement de la souveraineté nationale et l’établissement de relations de coopération avec la Syrie. – L’entente nationale et la participation des Libanais à la gestion de leur espace commun. Ces trois volets ont certes chacun leur spécificité et leur dynamique propres, mais ils sont étroitement liés. Aucun d’eux ne peut trouver de solution définitive indépendamment des deux autres. Comment un gouvernement qui n’a réellement travaillé sur aucun de ces trois volets pourrait-il le faire aujourd’hui ?
Pourquoi le gouvernement est-il opposé à ce que l’État recouvre sa souveraineté sur les régions libérées du Sud ? Pourquoi cette insistance à poser des conditions sans cesse renouvelées à l’application d’une résolution dont le Liban avait toujours, dans le passé, réclamé l’application inconditionnelle ? Tout a été mis à contribution pour trouver des prétextes...