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Actualités - CHRONOLOGIE

"Little Sénégal" : un film français, passerelle entre Afrique et Amérique

Little Sénégal, un film français actuellement en tournage à Harlem, explore les liens entre l’Afrique noire et ses fils autrefois déportés sur le continent américain. Le réalisateur, Rachid Bouchareb (dont le précédent film, Poussière de vie, a été nominé pour l’Oscar du meilleur film étranger en 1996), illustre la relation complexe, ambiguë, parfois conflictuelle, qu’entretiennent Africains et Afro-Américains grâce au périple d’un Sénégalais. À l’âge de la retraite, ce dernier part à la recherche de ses ancêtres réduits à l’esclavage plusieurs générations plus tôt. Ce vieux sage, joué par l’acteur burkinabé Sotigi Kuyate, «a été pendant trente ans gardien de la Maison des esclaves, le musée à la mémoire de la déportation de ces millions de personnes sur l’île de Gorée, au Sénégal», raconte Rachid Bouchareb. «C’est le projet d’une vie. Il a économisé et fait des recherches pendant des années» avant de traverser l’Atlantique. Le vieil homme retrouve la trace des siens, identifiables grâce à des scarifications rituelles caractéristiques, dans les registres du port de Charleston (en Caroline du Sud), l’un des principaux ports négriers du Nouveau Monde. De la fin du XVIe siècle au milieu du XIXe, dix à quinze millions d’Africains ont été conduits de force sur le continent américain. De bibliothèques en musées, grâce aux avis de recherche d’esclaves évadés ou aux déclarations de patrimoine des planteurs, sur lesquels figuraient des décomptes détaillés, puis de cimetière en cimetière, il remonte jusqu’au caveau de la famille Robinson, dans le New Jersey près de New York. «Là, c’est la rencontre avec sa parente, la dernière à entretenir la tombe. Elle tient un kiosque à journaux au cœur de Harlem», poursuit Rachid Bouchareb. «Il lui dit : “Je viens d’Afrique”. Mais elle n’en a rien à faire. Nous avons découvert que les immigrants récents, en particulier venus d’Afrique de l’Ouest, s’intègrent mal à Harlem. Ce sont deux communautés qui s’ignorent, se méfient l’une de l’autre, se détestent parfois». Little Sénégal est un petit quartier dans Harlem, quelques pâtés de maisons, dans lesquels se regroupent, presque en vase clos, les Africains de l’Ouest avec leurs commerces et leurs restaurants. Le culte de la famille, si important au Sénégal et en Afrique de l’Ouest, n’a pas résisté à l’âpreté des relations sociales américaines. «Les Noirs américains sont comme des arbres privés d’une partie de leurs racines», déplore Sotigi Kuyate. «Ils ont un grave problème d’identification. Un problème d’absence du père, de rapport aux ancêtres. Or s’il y a un lieu où la famille a sa valeur et sa raison d’être, c’est l’Afrique». «Le thème du film m’était destiné, parce que je suis griot», poursuit-il. «Et les griots sont des médiateurs, des réconciliateurs, les gardiens de la tradition». Porteur de ces valeurs africaines traditionnelles, son personnage va tenter de recoller les morceaux d’une famille, sa famille, en lambeaux dans Harlem. «L’africanisme, la quête des racines, le retour sur le passé, cela ne concerne qu’une élite éduquée parmi les Noirs américains», regrette Rachid Bouchareb dont le premier film, Bâton Rouge (1986) se passait déjà aux États-Unis. «La vie quotidienne des autres est trop dure pour qu’ils puissent se permettre le luxe de telles interrogations».
Little Sénégal, un film français actuellement en tournage à Harlem, explore les liens entre l’Afrique noire et ses fils autrefois déportés sur le continent américain. Le réalisateur, Rachid Bouchareb (dont le précédent film, Poussière de vie, a été nominé pour l’Oscar du meilleur film étranger en 1996), illustre la relation complexe, ambiguë, parfois conflictuelle,...