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Actualités - INTERVIEWS

Interview - Spécialiste de l'islam, le Pr Lamand donnera une conférence à Dar el-Fatwa Un apôtre de la tolérance au Liban (photo)

Président depuis 19 ans de l’association Islam et Occident, le Pr français Francis Lamand a fort à faire pour tenter d’établir un dialogue constructif entre les deux mondes musulman et occidental, tant préjugés et héritages du passé empoisonnent la relation entre eux. Mais cet ancien diplomate et professeur d’université n’est pas un avocat international pour rien. Il sait à merveille plaider la tolérance et la compréhension mutuelle. Ce message d’entente et d’ouverture, le Pr Lamand le délivrera à tous les Libanais au cours de la conférence qu’il donnera à Dar el-Fatwa, le 15 juin prochain. L’association islam et Occident existe depuis 1980, précise le Pr Lamand. Elle a été fondée sur une initiative du Dr Everett Clinchy, ancien aumônier général des forces américaines en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale. Après avoir vu les camps de concentration en Allemagne et les effets terribles de la guerre sur les populations, le Dr Clinchy a voulu consacrer le reste de son existence à rapprocher les communautés, et particulièrement l’islam et l’Occident, tant il craignait les tensions entre eux. C’est ainsi qu’est née en 1980 cette association présidée par le Pr Lamand depuis 1981. «Nous avons senti un besoin de faire quelque chose, déclare le Pr Lamand, afin de favoriser une meilleure compréhension entre les mondes musulman et occidental. C’est un peu une sorte de plate-forme de rencontre, un pont permanent que nous essayons de construire». La vocation essentielle de l’association est de mettre en évidence les valeurs communes de solidarité et de justice entre les trois communautés qui ont par ailleurs une même filiation abrahamique. Comment un professeur d’université en vient-il à s’intéresser à l’islam et aux religions en général ? «En tant que professeur d’université (j’enseignais la philosophie du droit à l’université de Lyon), je me suis intéressé à l’islam. J’ai été ensuite nommé diplomate à Koweït pendant 5 ans , de 1970 à 1975. Et, là, en marge de ma mission diplomatique, j’ai été invité à enseigner le droit comparé à la faculté de droit coranique. Ce qui est un bel exemple de tolérance, puisque je ne suis pas musulman. Et cela m’a permis d’approfondir mes connaissances de la charia et de me familiariser avec les valeurs islamiques». En poste à Koweït, le Pr Lamand venait fréquemment au Liban. Il se faisait d’ailleurs livrer L’Orient-Le jour par valise diplomatique à Koweït, afin de rester au courant de ce qui se passait au Liban qu’il a appris à aimer et qu’il a revu pendant les années de guerre. «Même alors, dit-il, je n’ai jamais perdu l’espoir que le pays sorte de la crise, car, pour moi, c’est un point de rencontre où les communautés vivent et cohabitent en permanence». Le poids des préjugés Au cours de ses multiples séjours au Liban, le Pr Lamand s’est fait de nombreux amis au sein de toutes les communautés. Ce qui lui a permis de mieux les connaître. C’est pourquoi, lorsqu’il a été sollicité pour présider l’association islam et Occident, il a estimé que cela cadrait parfaitement avec sa démarche. Certes, diriger l’association n’a pas été une tâche facile. «L’image de l’islam en Occident n’est pas bonne et l’inverse est aussi vrai. Ces images négatives sont dues à la charge historique des préjugés, mais aussi à l’ignorance, qui est l’ennemi numéro 1 du dialogue. Or, les valeurs islamiques sont ignorées en Europe et aux États-Unis». Islam et Occident tente de combattre cela en multipliant les rencontres, mais aussi en publiant une étude sur «l’image de l’islam dans les manuels scolaires». Cette étude a été publiée en France et en Allemagne. En 1991, l’association a organisé une conférence à Cordoue et en 1995, c’est en Turquie que la rencontre a eu lieu, avec toujours un même objectif : rapprocher l’islam et l’Occident, à travers une meilleure connaissance les uns des autres. Le Pr Lamand ne considère pas qu’un tel rapprochement soit un projet idéaliste. «Il est vrai que l’extrémisme sévit chez certains musulmans. Il sévit aussi dans le monde chrétien et juif. Prendre des exemples de violence chez certains musulmans pour y trouver l’image de l’islam n’est pas une bonne démarche, car on ne peut confondre un arbre avec la forêt. Le Coran prêche la tolérance et la modération. Par contre, l’extrémisme est une maladie de notre époque». Le Pr Lamand souhaite que le rapprochement se fasse sur base des valeurs partagées, dont l’existence lui paraît évidente. «C’est là l’esprit de notre combat», affirme-t-il, avant d’ajouter : «Je crois en l’homme parce que je crois en Dieu et je suis sûr que la réconciliation se fera». Il est donc heureux de donner sa conférence au Liban, le 15 juin prochain, «parce que le Liban n’est pas seulement un pays de cicatrices, c’est aussi un symbole d’espoir». Aux Libanais, il dira alors qu’il ne faut pas être esclave du présent. «Nous savons que le chemin est rude, mais la passion n’exclut pas la raison…», souligne-t-il. Comment est perçue son association en France ? «Nous sommes respectés, observés et écoutés. Nous avons parmi nous des chrétiens, des musulmans et des juifs. Et, en 20 ans, je peux vous assurer que les choses ont bougé dans la bonne direction».
Président depuis 19 ans de l’association Islam et Occident, le Pr français Francis Lamand a fort à faire pour tenter d’établir un dialogue constructif entre les deux mondes musulman et occidental, tant préjugés et héritages du passé empoisonnent la relation entre eux. Mais cet ancien diplomate et professeur d’université n’est pas un avocat international pour rien. Il...