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Actualités - OPINION

Tribune Que faire après l'échec de Genève ?

Les deux versions syrienne et américaine de ce sommet sont radicalement opposées : «La balle est dans le camp du président Assad», affirme le président Clinton. «Nous n’avons rien à donner, c’est aux Israéliens de faire les concessions nécessaires à la reprise de la négociation», répond le ministre syrien des Affaires étrangères. Peut-on parler, comme le font certains commentateurs de presse, d’un «traquenard» dans lequel serait tombé le chef de l’État syrien, qui attendait des assurances israéliennes «définitives» de son homologue américain alors que ce dernier n’avait pour objectif que de lui soumettre une proposition qu’il savait inacceptable dans le but de lui faire assumer la responsabilité de l’échec de la négociation ? Ou bien faut-il accepter le point de vue américain selon lequel la Syrie ne peut plus se cantonner dans une position permanente de refus et doit présenter des propositions concrètes pour faire avancer la paix ? En tout état de cause, un fait est certain : le «sommet de la dernière chance», pour reprendre l’expression utilisée par la presse, a été un échec. S’agit-il d’un échec définitif comme l’affirment les Israéliens ou bien faut-il attendre que la période des trois semaines, que les États-Unis ont demandée à Israël avant de fermer définitivement la porte à la négociation, s’écoule ? Il est encore tôt, dans l’état actuel des choses, pour répondre à cette question. Mais d’ores et déjà, les Israéliens ont mis au point les grandes lignes de leur nouvelle stratégie. Le retrait du Liban, dont la date pourrait être avancée, devrait se faire dans le cadre de l’application de la résolution 425, ce qui signifie en clair que les Nations unies vont être sollicitées pour définir les modalités de ce retrait et fixer le rôle que leurs forces devraient jouer pour assurer la sécurité dans la zone frontalière. Que va faire le Liban ? Nos dirigeants ne semblent pas en avoir une idée claire, comme en témoignent tout aussi bien les déclarations du ministre de la Défense qui menace de déployer des forces syriennes à la frontière avec Israël et de mettre ainsi Tel-Aviv à la portée des missiles syriens, que la mise au point effectuée par une «source officielle» affirmant que ces déclarations ne reflètent que «l’opinion personnelle» de leur auteur. Or cette absence de stratégie risque de coûter cher au Liban. Le temps n’est plus aux surenchères verbales qui ont marqué la période précédente, car le sommet de Genève a marqué un tournant dangereux dans la négociation et cela pour trois raisons essentielles : • La première est que les États-Unis, qui, jusque-là, tempéraient les ardeurs des uns et des autres, ne sont plus dans la position de médiateur mais ont clairement choisi leur camp puisqu’ils ont fait assumer au président syrien la responsabilité de l’échec de la négociation. Ce retournement de situation est dangereux et rappelle le précédent de la Serbie dont le président était considéré, peu de temps avant la guerre du Kosovo, comme un «élément de paix» dans les Balkans. • La deuxième raison est que le recours au Conseil de sécurité risque d’internationaliser la crise actuelle, ce qui placerait le Liban dans une situation extrêmement délicate car il pourrait se retrouver, en cas de conflit avec les instances onusiennes, placé au ban de la communauté internationale. • La troisième raison est que le Premier ministre israélien, qui n’a jamais été connu pour être une colombe, va se retrouver renforcé par sa détermination à ne pas céder aux exigences syriennes et pourra ainsi mettre un terme à la fronde latente qui existe au sein de la coalition au pouvoir. À la lumière de ce qui nous attend, plusieurs questions se posent : • N’est-il pas temps d’instaurer un dialogue en profondeur entre les Libanais pour parvenir à une position unifiée ? Ou bien doit-on se contenter du discours officiel et accepter que tous ceux qui remettent en question la langue de bois en vigueur dans le pays se retrouvent accusés d’être des agents stipendiés à la solde d’Israël ? • La solidarité nationale peut-elle être imposée par la force ou bien nécessite-t-elle l’adoption d’une politique d’ouverture et de dialogue ? • Comment convaincre les Libanais de lier leur sort à celui de la Syrie si cette dernière ne procède pas à une révision radicale de sa politique au Liban ? En 1982, peu de temps après le début de l’invasion israélienne, le président Élias Sarkis a mis sur pied un comité de salut public qui a groupé les représentants des forces actives dans le pays. Cette initiative n’a pas réussi à changer le cours des événements, mais le chef de l’État a eu le mérite de l’avoir tentée. Peut-on espérer pareille initiative aujourd’hui ?
Les deux versions syrienne et américaine de ce sommet sont radicalement opposées : «La balle est dans le camp du président Assad», affirme le président Clinton. «Nous n’avons rien à donner, c’est aux Israéliens de faire les concessions nécessaires à la reprise de la négociation», répond le ministre syrien des Affaires étrangères. Peut-on parler, comme le font...