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Actualités - DISCOURS

Universités - Le discours du supérieur général de la Compagnie de Jésus Le privilège de l'USJ est d'avoir contribué à l'émergence de la conscience collective d'une nation (photo)

Comme chaque année, l’Université Saint-Joseph a célébré sa fête patronale hier au campus des sciences et technologies à Mar Roukos. Mais à l’occasion du 125e anniversaire de l’USJ, la fête patronale a revêtu cette année un caractère plus solennel puisqu’elle a été présidée par le supérieur général de la Compagnie de Jésus, le RP Peter Hans Kolvenbach. Outre le RP Sélim Abou, recteur de l’université, les vice-recteurs, le secrétaire général, les doyens des facultés et les directeurs d’institut, cette fête a regroupé près de 1 000 enseignants des diverses institutions de l’université à Beyrouth et dans les trois centres régionaux de Tripoli, Saïda et Zahlé. Y ont également participé, des délégations des étudiants, du personnel des services généraux et des laboratoires de l’université et les chefs des services administratifs de l’Hôtel-Dieu de France ainsi que les membres fondateurs de l’Association des anciens, les présidents et des membres des comités des amicales des anciens et les membres libanais du conseil stratégique de l’USJ. Étaient présents aussi, les présidents des ordres professionnels auxquels sont liées les facultés ainsi qu’un groupe de bienfaiteurs qui financent le programme de bourses et d’aides octroyées aux étudiants et qui soutiennent les projets de développement de l’université. La cérémonie a débuté par une messe, concélébrée par le RP Kolvenbach, supérieur général de la Compagnie de Jésus, puis le public s’est retrouvé dans l’amphithéâtre Jean Ducruet pour écouter le message du supérieur général, intitulé : «L’Université Saint-Joseph : une vocation humaniste et nationale». Voici de larges extraits de ce discours (les intertitres sont de la rédaction du journal) : «De toutes les universités fondées par les jésuites à travers le monde, l’Université Saint-Joseph de Beyrouth est celle qui m’est la plus chère, non seulement parce que j’y ai été successivement étudiant et professeur, mais aussi parce que, à mes yeux, elle a eu l’immense privilège de contribuer à l’émergence de la conscience collective d’une nation. En effet, s’il est vrai, comme l’affirme Jean-Paul II, que le «Liban n’est pas seulement un pays mais un message», il faut reconnaître aussi que l’USJ est au cœur de ce message, qu’elle n’a cessé d’élaborer, de promouvoir et de diffuser depuis 125 ans. «Je ne prétends pas retracer ici l’histoire de l’USJ. Qu’il me suffise de rappeler qu’elle a connu un développement compliqué, à tous points de vue, marqué par des négociations, souvent difficiles, d’abord avec l’État ottoman ensuite avec l’État français, enfin avec l’État libanais, afin de sauvegarder son autonomie et de se donner les structures d’une université complète. Entre-temps, elle a survécu aux vicissitudes de deux guerres mondiales et même, plus récemment, aux destructions considérables qu’elle a subies. Les éléments constitutifs de l’identité libanaise «C’est au milieu de ces épreuves que l’USJ a su discerner les éléments constitutifs de l’identité libanaise : c’est au milieu de ces épreuves qu’elle a contribué – par son enseignement, ses recherches et son action – à l’édification d’une nation pluricommunautaire où tous les citoyens vivent ensemble, égaux et différents, et où les différences culturelles se rejoignent dans la production d’un style de vie commun et singulier. C’est ce modèle de tolérance, de convivialité et d’échanges que le pape a appelé «un message». «Ce message, que la nation libanaise a fini par se donner pour vocation explicite en 1943, n’est pas étranger au principe général qui a dominé l’enseignement et l’action des jésuites depuis la fondation de l’ordre : à savoir la promotion de l’éminente dignité de la personne humaine à travers et au-delà de ses appartenances particulières — ethniques, linguistiques, religieuses (...). «À cette tradition, à la fois humaniste et authentiquement chrétienne, à cet esprit d’ouverture inconditionnelle aux hommes et aux femmes de toute origine et de toute communauté au nom de leur commune humanité, à cet idéal de service et d’amour de l’autre en tant qu’autre, quelles que soient ses appartenances sociales et culturelles, l’Université Saint-Joseph a su rester parfaitement fidèle (...)». «Mesdames et messieurs les enseignants, « Votre vocation d’éducateurs est d’être au service de l’étudiant. Servir l’étudiant, c’est lui assurer une formation intégrale qui lui permette d’agir avec compétence et humanité dans le monde de demain, un monde véritablement nouveau, dominé par la globalisation des échanges économiques et technologiques et la mondialisation des moyens de communication et d’information. Les règles du jeu social et interpersonnel ont radicalement changé. Elles exigent de nous une grande capacité d’adaptation mais aussi un sens critique aigu susceptible de discerner ce qui, dans la globalisation, telle qu’elle se profile, contribue à la croissance de la personne et ce qui, au contraire, risque de la détruire. C’est dans ce contexte que je voudrais vous entretenir un moment de l’orientation que l’université est appelée à adopter aujourd’hui dans son triple rapport à la société, à la culture, à l’absolu». Œuvrer dans la perspective chrétienne «Il n’y a guère de société aujourd’hui qui ne subisse, à un degré ou un autre, les effets de la globalisation et qui ne tente d’en orienter le cours en fonction de ses besoins et de ses aspirations. Dans ce contexte, l’université est appelée à jouer un rôle primordial aussi bien au niveau de l’information qu’à celui de la formation. Mais elle ne peut s’acquitter correctement de cette tâche que si, au milieu des mutations sociales qui l’environnent et l’affectent, elle sait sauvegarder son identité. «C’est sans doute une lapalissade de dire que l’identité de l’USJ, comme celle de toute institution similaire, c’est d’abord d’être une université. Mais cet apparent truisme recèle des conditions qu’il convient de préciser. Il est clair qu’une université aujourd’hui ne mérite son nom que si elle satisfait aux exigences du progrès scientifique et technologique fulgurant qui a radicalement transformé les notions d’espace et de temps, jusqu’ici considérées comme les cadres a priori de toute connaissance. «L’université doit en conséquence actualiser constamment ses objectifs, ses programmes, ses méthodologies, son équipement, son style de gestion et les soumettre à une évaluation périodique. Elle doit en même temps discerner, dans la masse des connaissances disponibles, ce qui est le plus fécond; dans les nouvelles technologies, ce qui est le plus rentable ; dans les diverses méthodologies, ce qui est le plus pédagogique, en visant en tout l’excellence. Dans le discours contemporain, l’excellence est devenue un maître mot qui désigne, en ce qui concerne les institutions éducatives en général, la qualité totale de l’enseignement, de la recherche et des moyens d’y accéder. Elle est mesurée à l’aune de la compétence et de la compétitivité. «Mais l’identité de l’USJ est aussi celle d’une université d’inspiration chrétienne. La charte le dit explicitement : “L’Université Saint-Joseph s’engage à œuvrer dans la perspective chrétienne qui fut toujours la sienne depuis sa fondation” (art.IV). Cela signifie en clair que, pour l’USJ, l’excellence académique est vaine si elle ne s’accompagne pas de l’excellence humaine (...). «Le savoir s’accumule apparemment sans limites. Jamais l’humanité n’a connu un progrès scientifique et technique équivalent à celui qui a été accompli depuis un demi-siècle. Jamais l’homme n’a disposé d’un tel pouvoir sur la nature et sur la vie : pouvoir sans cesse accru d’améliorer les conditions de l’existence humaine mais aussi, pour la première fois dans l’histoire, pouvoir exorbitant de se détruire soi-même et de détruire la planète. La compétence seule ne fournit pas à l’homme le moyen d’échapper à son destin d’apprenti sorcier car aucune science ne peut dire quoi faire de la science. Pour conférer sens et orientation à une existence qui a perdu ses repères, il faut un critère qui transcende la compétence et la soumette à ses principes : ce critère est de l’ordre de la sagesse. (...) L’exclusion des faibles «Faute d’une instance éthique fondée en raison et d’une force d’en haut qui soutienne notre sagesse, nous voyons la compétence dégénérer en une compétitivi-té démesurée, qui n’a d’autre fin que la soif du pouvoir. Savoir, c’est pouvoir et savoir plus que les autres, c’est augmenter son pouvoir sur eux (...). Ce qui est en cours, c’est la concentration de la richesse dans les mains d’une minorité réduite, l’exclusion des faibles, l’écart croissant entre les riches et les pauvres, l’exacerbation de l’individualisme et le mépris de la compassion (...). «Or l’éducation elle-même, qui ne peut se soustraire à la globalisation et au marché, court le risque de connaître les mêmes phénomènes qu’on observe dans le domaine économique : concentration du savoir et du pouvoir au profit d’un nombre restreint de gens, exclusion des faibles, accroissement des différences. En éducation aussi, insister sur la qualité, la compétence et l’efficience – aussi inévitable que ce soit de nos jours – peut conduire à des effets contraires à ceux que l’on cherche. Et de fait, on voit l’abîme se creuser de jour en jour entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas. Et dans ce domaine aussi, les perdants sont toujours les pauvres. “Pour les pauvres, dit Jean-Paul II, s’ajoute à la pénurie de biens matériels celle du savoir et des connaissances” (Encyclique Centesimus Annus, n° 33). «En elle-même, la compétitivité est un élément moteur de l’énergie créatrice. Si, dans le contexte de la globalisation, elle engendre des effets pervers, c’est parce qu’elle ne vise que l’accroissement du pouvoir. Or le pouvoir n’est pas une fin mais un moyen. Le pouvoir et le savoir qui en facilite l’acquisition ont pour fin le service des autres. Cela signifie que la compétitivité a pour finalité la solidarité (...). «Le savoir est pour tous et pour tous le pouvoir qu’il confère. Nos institutions éducatives n’ont pas le droit d’être exclusives, elles ne peuvent pas se contenter d’être au service d’un segment social déterminé. Si, malgré les efforts réels qu’elles fournissent pour s’ouvrir à tous les publics, elles ne sont pas accessibles à tous également, c’est, ici comme ailleurs, pour des raisons diverses. Les États, en tout cas, devraient garantir le droit des parents de choisir librement la meilleure éducation possible pour leurs enfants. «Mais les limites imposées à cette liberté ne peuvent servir de prétexte pour nous résigner à exclure les pauvres de notre projet éducatif. Si les pauvres ne peuvent pas venir à l’USJ, que l’USJ aille vers les pauvres. Je n’ignore pas que certaines institutions de l’université ont pour vocation explicite de prodiguer soins et éducation aux défavorisés, aux exclus, aux pauvres. Je n’ignore pas non plus l’existence et le développement d’un système de bourses et de prêts qui permet à des étudiants économiquement défavorisés de poursuivre leurs études à l’université. Mais je suis particulièrement sensible aux deux initiatives prises par l’université à l’occasion du 125e anniversaire de sa fondation : la levée de fonds pour 125 bourses étudiantes et le parrainage de quatre écoles pauvres à Beyrouth et dans les trois régions où sont implantés les centres universitaires. Deux initiatives qui engagent symboliquement toute l’université et attestent son souci d’être, dans la mesure du possible, ouverte à tous. «Je ne puis que vous encourager tous à faire concrètement vôtre cette volonté d’ouverture et ce souci particulier des pauvres. Et à les faire partager spécialement aux étudiants. Nous voulons que l’idéal de la justice sociale soit présent à la conscience de chacun d’eux, de telle manière qu’il imprègne leur pensée et inspire leur action. Ainsi, il vous revient de les aider à faire leur l’option pour les pauvres, comme une sorte de critère pour leurs choix, de sorte qu’ils se demandent toujours avant une décision importante comment elle va affecter ceux qui occupent la dernière place dans la société. Cela fait partie de l’excellence humaine et évangélique que nous visons pour eux». À l’écoute des revendications «Attentive aux aspirations sociales des individus et des groupes, l’université se doit aussi d’être à l’écoute de leurs revendications culturelles. Celles-ci sont souvent, aujourd’hui, d’autant plus vives que les cultures particulières et les identités qu’elles déterminent sont menacées par l’expansion de la culture de masse qui accompagne la globalisation des échanges et la mondialisation des moyens de communication et d’information (...). «Il est évident que les innovations prodigieuses de la civilisation technique peuvent enrichir considérablement notre vie. Mais elles peuvent aussi l’appauvrir, la laminer, voire la mettre en danger ou la détruire. C’est malheureusement trop fréquent dans notre monde actuel, où l’on assiste à l’extension d’une guerre des cultures d’autant plus dure qu’elle utilise le support des techniques les plus avancées (...). «L’alternative est claire : ou la guerre des cultures ou le dialogue des cultures (...). «Ce dialogue, le Liban a le privilège de le mettre en pratique au niveau de la nation, et même d’y voir la principale justification de son existence. Mais, pour durable qu’elle soit, la coexistence n’est pas encore la convivialité. La coexistence dit juxtaposition des communautés et des cultures; elle fait appel à la tolérance. La convivialité dit interaction des communautés et des cultures; elle suppose compréhension et sympathie réciproques. À cet égard, l’USJ, dont la population est pluricommunautaire, a un rôle important à jouer. Au-delà du respect des différences, auquel elle veille scrupuleusement, il lui revient de promouvoir la connaissance et l’estime mutuelles entre personnes des diverses communautés et la conviction que l’interpénétration de leurs traditions culturelles respectives constitue, pour les individus comme pour les groupes, un puissant facteur d’enrichissement. «La promotion de la convivialité n’est cependant possible qu’à certaines conditions, que Jean-Paul II énonce dans son Exhortation apostolique et que je voudrais rappeler ici : c’est l’édification d’“un système politique et social juste, équitable et respectueux des personnes et de toutes les tendances qui composent” le pays; c’est le développement d’un “partage équitable au sein de la nation, pour que tous puissent mettre leurs talents et leurs capacités au service de leurs frères et sentir qu’ils ont une contribution spécifique à apporter à leur pays”, c’est le droit de chacun à jouer “son rôle dans la vie sociale, politique, économique, culturelle et associative, dans la fidélité à ses traditions spirituelles et culturelles, dans la mesure où cela ne s’oppose pas au bien commun”. Mais, comme le dit le pape : “Tout cela suppose aussi que le pays recouvre sa totale indépendance, une souveraineté complète et une liberté sans ambiguïté” (Jean-Paul II, Exhortation apostolique Une espérance nouvelle pour le Liban, nos 94, 95, 121. (…). «Dans une société pluricommunautaire comme la société libanaise, le respect des droits de l’homme conditionne les modalités du dialogue des cultures. L’interaction des communautés et de leurs traditions respectives exige sans doute des compromis, mais non l’acceptation de dispositions statutaires ou coutumières qui iraient à l’encontre de la dignité de la personne humaine (...). «Il va de soi que le respect des droits de l’homme ne concerne pas seulement la société civile : il s’impose aussi, et même au premier chef, à l’État. Cependant, ce n’est pas mon rôle de signaler les violations des droits de l’homme qui peuvent se produire, ici comme ailleurs, sous le masque de la raison d’État. Par contre, l’université, ses enseignants, ses étudiants peuvent avoir un rôle à jouer. Au sein de ses institutions, dans le milieu national et régional qui est le sien, dans les organisations internationales dont elle est membre – l’Association des universités arabes, l’Association des universités francophones, la Fédération des universités catholiques –, l’USJ se doit, en effet, d’être le témoin privilégié d’une convivialité intercommunautaire et d’un dialogue des cultures, régulés par les valeurs universelles inhérentes aux droits de l’homme». Des principes qui constituent un cadre de référence «Les principes régulateurs énoncés dans la Déclaration des droits de l’homme constituent le cadre de référence nécessaire de tout dialogue des cultures qui se veut cohérent et fécond. À leur aune sont jugées les valeurs véhiculées par les cultures en dialogue. Mais dans une conjoncture interculturelle qui implique des différences religieuses, le dialogue des cultures tend naturellement à se prolonger en un dialogue des religions, dont le cadre de référence dépasse celui des droits de l’homme sans pour autant en dispenser. Il ne s’agit plus ici des traditions culturelles issues des diverses religions, il s’agit des croyances qui leur sont inhérentes. Le dialogue ne consiste pas pour autant dans une confrontation des doctrines et des dogmes. Il se situe au niveau de l’expérience fondatrice qui est à la racine du fait religieux en général. Cette expérience radicale est le terrain sur lequel peut et doit s’engager le dialogue des religions (…). «Le dialogue des religions sur la base de l’expérience archétypale qui les fonde suppose le respect absolu et, dans la mesure du possible, la compréhension bienveillante du cheminement personnel du croyant, quelle que soit sa profession de foi. C’est dans cette perspective qu’il convient d’interpréter la disposition de l’article IV de la charte de l’USJ: “La promotion humaine qu’elle vise ne se limite pas à l’acquisition d’une culture et à la maîtrise d’une technique; elle est ouverte aux questions fondamentales qui se posent à la conscience de tout homme; cette ouverture est le chemin habituel vers la reconnaissance d’un Dieu, transcendant toutes les valeurs humaines, qui donne à la vie sa plénitude de sens et garantit la liberté humaine contre toute oppression (...) Cette perspective requiert de la part de tous ceux qui participent à la vie de l’université, l’engagement de promouvoir un esprit de liberté personnelle et d’ouverture à la vie spirituelle”. «C’est dans cet esprit qu’un certain nombre d’institutions de l’USJ, spécialisées dans l’étude du phénomène religieux, cherchent à promouvoir, par l’enseignement et la recherche, le dialogue islamo-chrétien (...). Je suis donc heureux d’encourager ici encore particulièrement l’université à donner toute sa place à ce domaine du dialogue entre religions dans sa mission propre. Ce dialogue, qui ne se limite d’ailleurs pas à sa forme doctrinale mais inclut le dialogue de la vie et de la rencontre quotidienne, celui des engagements communs, celui de l’échange des expériences spirituelles, est de nature à développer le sens de la liberté religieuse dont l’Exhortation apostolique de Jean-Paul II souligne le caractère primordial : “Parmi les droits fondamentaux, dit le texte, il y a aussi celui de la liberté religieuse. Personne ne doit être soumis à des contraintes de la part soit d’individus, soit de groupes ou de pouvoirs sociaux, ni être poursuivi ou mis à l’écart de la vie sociale pour ses opinions ni empêché de mener sa vie spirituelle et culturelle, de telle sorte qu’en matière religieuse, nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou en association avec d’autres” (Jean-Paul II, Exhortation apostolique, Une espérance nouvelle pour le Liban, n° 116)». L’écart se creuse entre riches et pauvres «Mesdames et messieurs les enseignants, «Le souci de lier constamment la compétence à la sagesse et la compétition à la solidarité ; l’attachement aux valeurs universelles issues de l’humanité de l’homme et l’appréciation des valeurs particulières propres aux diverses cultures ; le discernement des figures dialectiques qui jalonnent le rapport de complémentarité entre la foi et la raison ; la disponibilité à rencontrer en vérité ceux qui vivent d’une autre foi que la leur ; telles sont les aptitudes et les attitudes que l’on est en droit d’attendre des jeunes dont vous avez la charge. C’est ainsi qu’ils pourront, dans un monde où l’écart se creuse de jour en jour entre les riches et les pauvres, faire prévaloir les principes de la justice sociale ; dans un monde où la technique mondialisée tend à étouffer la pluralité des modes de vie, affirmer le droit à la diversité culturelle ; dans un monde miné par le matérialisme et l’individualisme, promouvoir les valeurs convergentes de la raison critique et de la foi authentique. «À ces dispositions qui leur permettent d’assimiler les progrès de la modernité et d’en combattre les effets pervers, les jeunes Libanais sont préparés par leur enracinement dans des traditions solides, susceptibles de fournir des gages pour un avenir fécond. Les liens de la solidarité familiale et communautaire sont appelés à s’épanouir au sein d’une solidarité nationale qui les englobe ; la coexistence des communautés est le germe d’une convivialité marquée par des relations interculturelles accrues, articulées autour du partage des valeurs universellement reconnues ; les allégeances religieuses soustraites à la spéculation politique et restituées sur le terrain de la foi doivent pouvoir fournir ce modèle de dialogue islamo-chrétien dont le monde a tant besoin aujourd’hui. «Il me reste à formuler un souhait : que l’année du 125e anniversaire de l’USJ soit aussi l’année de l’instauration d’une paix juste et définitive dans cette région du monde et du recouvrement par le Liban de son entière indépendance et de sa liberté de décision. Pour l’université, déjà engagée dans un vaste mouvement de développement et de réforme, ce sera une nouvelle étape à laquelle elle doit dès à présent se préparer. «Dans un contexte de paix, elle aura à redoubler d’efforts pour rester véritablement compétitive, en se maintenant à la pointe de la modernité mais sans rien sacrifier de sa tradition humaniste et de son inspiration chrétienne. La réputation dont elle jouit et les liens qu’elle a établis dans le monde universitaire, dans la région et au-delà des frontières de la région où elle est implantée, lui permettent d’aborder l’avenir avec confiance et espérance».
Comme chaque année, l’Université Saint-Joseph a célébré sa fête patronale hier au campus des sciences et technologies à Mar Roukos. Mais à l’occasion du 125e anniversaire de l’USJ, la fête patronale a revêtu cette année un caractère plus solennel puisqu’elle a été présidée par le supérieur général de la Compagnie de Jésus, le RP Peter Hans Kolvenbach. Outre...