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Actualités - REPORTAGES

Conseil de la Ligue - Pour Hoss, l'essentiel du document libanais a été adopté La modération l'a finalement emporté

«La réunion historique» annoncée vendredi par le secrétaire général de la Ligue arabe Esmat Abdel Méguid n’a pas vraiment eu lieu. C’est plutôt à une rencontre ordinaire sur laquelle ont plané les habituelles dissensions arabes – aiguisées par la reprise des négociations entre les Israéliens et les Palestiniens sous parrainage égyptien – qu’ont eu droit les 400 journalistes autorisés à couvrir l’événement qui s’est déroulé hier au Grand Sérail de Beyrouth. Des délégations pittoresques En quittant l’impressionnant bâtiment, certains membres des délégations cherchaient d’ailleurs à se justifier en précisant que l’importance de cette réunion du Conseil de la Ligue réside dans le fait qu’elle s’est tenue au Liban et qu’elle a consacré la totalité de ses travaux à l’examen des moyens d’aider ce pays face aux agressions israéliennes. Des moyens essentiellement moraux qui se contentent d’appeler les pays arabes ayant des relations avec Israël à reconsidérer celles-ci. Ce point a d’ailleurs failli provoquer un conflit entre les Syriens et les Égyptiens, poussant même M. Farouk el-Chareh à quitter précipitamment la réunion de l’après-midi, officiellement «pour entreprendre un contact». Mais, en dépit de ce qu’il avait annoncé en partant, il n’est plus revenu au Sérail. Le matin, pourtant, l’optimisme était encore de mise. Investi depuis la veille par un impressionnant service d’ordre, le Sérail gouvernemental était, à lui seul, la preuve concrète de l’importance de l’événement. Déjà, devant la place Riad el-Solh, les proches des personnes détenues en Israël côtoyaient les partisans des Japonais membres de l’Armée rouge qui brandissaient des banderoles pour tenter d’attirer l’attention des délégations arabes. Le président du Conseil Sélim Hoss est cependant arrivé comme d’habitude vers 8h30. Il a eu du mal à reconnaître son cadre habituel tant les préparatifs pour l’accueil des délégations avaient transformé l’aspect des lieux. Le secrétaire général de la Ligue, le Dr Esmat Abdel Méguid, et le ministre égyptien des Affaires étrangères, M. Amr Moussa, sont arrivés vers 10h. Véritable star de cette réunion, Amr Moussa n’a pas hésité à faire plusieurs déclarations et même à lancer des boutades. En voyant le nombre de journalistes de la gent féminine, il s’est écrié : «La moitié de la population féminine du Liban est donc journaliste ?» Les autres délégations ont commencé à se succéder à partir de 11h30. Les Omanais avec leurs turbans multicolores et leurs poignards ciselés accrochés à la ceinture étaient les plus spectaculaires alors que les Qatariotes et les Émiriens ont provoqué les frissons de la foule en arrivant pieds nus dans des sandales malgré la pluie battante. Plus de trois heures de discours Le plus attendu était comme toujours l’émir Séoud Fayçal dont la prestance a impressionné même les plus désabusés des journalistes. C’est d’ailleurs le seul que nul n’a osé interroger. «Ce qu’il a à dire, il le dira dans son discours», expliquaient ses proches. De fait son discours s’est inscrit dans la ligne des récentes déclarations du prince héritier Abdallah : appui total à la Résistance, condamnation ferme des agressions israéliennes, attitude méfiante face à l’annonce du retrait israélien en juillet, appui à la concomitance des volets. Mais le communiqué final ne reflétera pas cet appui inconditionnel. C’est que tout au long de la journée, l’émir Séoud Fayçal a eu fort à faire à essayer d’arrondir les angles entre les Égyptiens et les Syriens et entre d’autres délégations arabes aux susceptibilités exacerbées. Irakiens et Koweitiens s’évitaient ainsi soigneusement, les Libyens adoptaient une position de défi et les Palestiniens manifestaient bruyamment leur mécontentement car ils s’estimaient lésés... Dans les coulisses, les Arabes étaient loin d’offrir une belle image de solidarité. À 12h pile, la réunion est déclarée ouverte. Le ministre irakien Mohamed Saïd Sahhaf prend la parole en premier en sa qualité de président de la 112e session du Conseil de la Ligue. Il tient un discours concis, réclamant un appui clair au Liban et condamnant Israël, mais aussi les États et rappelant au passage le maintien du blocus américano-britannique sur son pays qui dure depuis neuf ans sans aucune justification. Il cède ensuite la place au président de la 113e session, le ministre omanais des Affaires étrangères, Youssef ben Aloui ben Abdallah. C’est ensuite le tour du président du Conseil Sélim Hoss qui expose avec vigueur la position libanaise en rappelant ce que ce pays a enduré du fait de l’occupation israélienne. Le secrétaire général de la Ligue, le Dr Esmat Abdel Méguid, a pris à son tour la parole, suivi des autres chefs des délégations. Le déjeuner prévu pour 13h30 a été reporté à 15h30 pour permettre aux représentants des 21 pays arabes de prononcer un discours. Cela ne s’est pas fait sans heurts, puisque le représentant de l’Autorité palestinienne Farouk Kaddoumi a vivement protesté contre le fait qu’il a été le dernier orateur. «Pourtant, la cause palestinienne est à l’origine de tout le contentieux arabo-israélien et elle devrait passer en premier». Tout au long de la rencontre, M. Kaddoumi a montré qu’il se sentait relégué au second plan, comme si l’on voulait occulter le problème palestinien. Dans son discours, il a insisté sur l’importance de la solidarité arabe. Ce qui a fait dire à un membre d’une autre délégation : «Il aurait dû y penser en 1993 avant qu’Arafat ne signe les accords d’Oslo». En réalité, la récente reprise des négociations sur le volet palestino-israélien a plané sur la réunion arabe. Les analystes considèrent que cette reprise au même titre que l’annonce du retrait israélien du Liban-Sud en juillet avait pour but de calmer les Arabes avant la réunion du Conseil de la Ligue. Il s’agissait surtout, pour les Israéliens, de ménager le président égyptien Hosni Moubarak qui s’était largement impliqué dans le volet palestino-israélien, mais aussi d’empêcher les ministres arabes d’appuyer ouvertement la Résistance libanaise, puisque Israël s’engageait à retirer ses troupes d’ici à quatre mois. Ayant saisi le message, l’Égypte prônait donc la modération, alors que les Syriens et les Libanais attendaient une condamnation ferme d’Israël. Selon les mêmes analystes, c’est pour empêcher les Arabes de se laisser tromper par les «bonnes dispositions» israéliennes que le chef de l’État Émile Lahoud a rappelé récemment que le volet libano-israélien ne serait définitivement clos qu’avec le retour chez eux des réfugiés palestiniens et le retrait israélien du Golan. Un contact qui s’éternise... Pour éviter les polémiques et les débats qui augmenteraient les dissensions arabes, ni l’annonce du retrait israélien du Liban-Sud ni la reprise des pourparlers palestino-israéliens n’ont été évoquées dans le communiqué final. L’émir Séoud Fayçal a d’ailleurs tenu une longue réunion avec MM. Chareh et Moussa, en marge de la séance d’ouverture, dans une tentative de rapprocher les points de vue. Puis estimant que la bonne chère adoucit les mœurs, tout le monde s’est dirigé vers la salle du banquet où les ministres libanais invités à ces agapes attendaient depuis longtemps. Au menu (préparé par le Bristol) : mezzés, sayadieh, mouton farci et baklawa. Les journalistes, eux, ont eu droit à un buffet préparé par «la Mie dorée». Prévu pour 250 personnes, il a dû en nourrir plus de 400... Les ministres n’ont pas eu le temps de se reposer puisque la séance à huis clos s’est ouverte à 16h30. C’est là que les délégations ont débattu du document de travail présenté par le Liban, avant d’étudier le texte du communiqué final. Le malaise a commencé à être perceptible pour les journalistes lorsque le ministre syrien a quitté la réunion (mais il a pris part, plus tard, au dîner à Baabda), en annonçant qu’il devait faire un contact mais qu’il reviendrait certainement. Chareh a aussi déclaré que le communiqué ne serait pas annoncé ce soir (hier). Il est suivi par le prince héritier du Qatar, aussitôt happé par les journalistes au point qu’il a vraiment eu un moment de panique, appelant à la rescousse le service d’ordre. Le prince héritier a quand même eu le temps de déclarer que la réunion n’était pas finie, mais ayant un rendez-vous avec le chef de l’État, il devait se retirer. L’Émirien sort à son tour en niant l’existence de divergences dans les points de vue. Pour les journalistes, le suspense s’est poursuivi, alimenté tantôt par les «confidences» des membres de la délégation égyptienne, tantôt par les dénégations officielles. Finalement, c’est à 19h30 que le président du Conseil, le secrétaire général et le président de la 113e session du Conseil de la Ligue ont dévoilé le contenu du communiqué final. Pour le Dr Hoss, il reprend l’essentiel du document de travail libanais et c’est certainement la position arabe la plus avancée en faveur du Liban. Mais nous sommes loin des aides matérielles promises et des mesures draconiennes contre Israël. «Maintenant, en tout cas, le Liban ne se sent plus seul face aux agressions israéliennes», a déclaré le président du Conseil en guise de conclusion. Il a ainsi exprimé l’essentiel de cette réunion, qui, sans être extraordinaire, se veut avant tout un témoignage de solidarité.
«La réunion historique» annoncée vendredi par le secrétaire général de la Ligue arabe Esmat Abdel Méguid n’a pas vraiment eu lieu. C’est plutôt à une rencontre ordinaire sur laquelle ont plané les habituelles dissensions arabes – aiguisées par la reprise des négociations entre les Israéliens et les Palestiniens sous parrainage égyptien – qu’ont eu droit les 400...