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Actualités - ANALYSE

Vie politique - A l'heure des défis régionaux Le bilan de Taëf reste largement négatif

Selon le mot d’Alexis Léger, «d’une convention de pis-aller, on voit souvent le pire et rarement ce qui peut aller». Taëf en constitue une parfaite illustration. Dix ans après sa conclusion, et alors que la région s’apprête à pénétrer dans une ère nouvelle, que reste-t-il de ce «pacte national»? Pas grand-chose en vérité. Cela se constate tout de suite, quand on énumère les clauses qui étaient censées en constituer l’ossature : 1) – Le Liban est une nation souveraine, indépendante, libre. Une patrie définitive pour tous ses fils. Une et unique, terre, peuple et institutions. Dans le cadre des frontières que la Constitution libanaise définit et qui sont reconnues internationalement. 2) – Le Liban est une république démocratique parlementaire, fondée sur le respect des libertés publiques, principalement la liberté d’opinion et de croyance. La république est fondée également sur la justice sociale, l’égalité dans les droits comme dans les obligations entre tous les citoyens, sans distinction ni discrimination. 3) – Le peuple est la source des pouvoirs et le détenteur d’une souveraineté qu’il exerce à travers les institutions constitutionnelles. 4) – Le régime s’établit sur le principe de la séparation des pouvoirs, de leur équilibre et de leur coopération. 5) – La croissance équilibrée des régions, sur le plan culturel, social ou économique, est l’un des fondements essentiels de l’État et de la stabilité du système. 6) – La justice sociale doit être réalisée à travers une réforme financière, économique et sociale. 7) – La terre libanaise est une, pour tous les Libanais. Chaque Libanais a le droit de s’installer dans n’importe quelle partie de cette terre et d’y prospérer, à l’ombre de l’autorité de la loi. Il ne peut y avoir de tri du peuple en base d’une appartenance quelconque, pas de fractionnement, pas de partition et pas d’implantation. 8) – Aucune autorité contraire au pacte de cœxistence n’est légitime. Il n’est pas besoin de le démontrer point par point car cela saute aux yeux : la plupart de ces beaux principes, dont l’ensemble devait tisser l’entente nationale, restent encore lettre morte. Si changement il y a eu par rapport au système d’avant-guerre, ce n’est généralement ni dans le bon sens ni en application de Taëf. Ainsi au chapitre de la réforme en matière politique, ces accords précisaient que les élections législatives devraient désormais se dérouler en base du mohafazat-circonscription, pour promouvoir la cœxistence et en même temps assurer une saine représentation des différentes composantes socio-politiques du pays. Dans le même cadre de réforme politique, le pays était censé se doter sans tarder d’un gouvernement d’entente nationale. Ce Cabinet d’union n’a jamais vu le jour. Il aurait eu pour première mission d’exécuter dans un délai d’un an un plan global de sécurité visant à redonner à l’État le contrôle de tout le territoire national par le truchement de ses seules forces propres. Objectif également raté. Les élections de 1992 puis de 1996 ont consacré un fait accompli discriminatoire violant les accords de Taëf, au mépris même de la condamnation prononcée par le Conseil constitutionnel. Le système appliqué a divisé les Libanais en deux, les admis et les exclus. Dans presque tous les cas, les décisions essentielles se prennent ailleurs qu’au Liban. Avec l’assentiment et parfois même à la demande expresse des pôles d’influence locaux. On l’a encore vu avec la nouvelle loi électorale qui foule aux pieds le principe d’égalité, pourtant initialement défendu par le pouvoir. À ce propos, il convient de souligner que nul ne saurait être plus royaliste que le roi. Si les Libanais eux-mêmes ne se mettent pas en quête de devenir souverains, personne ne viendra leur offrir une indépendance totale. C’est ce qui ressort des propos récemment tenus devant des étudiants par l’ambassadeur américain, M. David Satterfield. Il a ainsi souligné que «la chose la plus importante est que les Libanais doivent eux-mêmes s’entendre entre eux. Pour dire quel pays, quel État, quel gouvernement, quelle société ils veulent. Depuis la création de l’État libanais jamais les Libanais ne sont parvenus à un consensus unanime sur ce qu’ils veulent pour leur pays. S’ils ne s’y mettent pas, s’ils n’y arrivent pas, le Liban continuera à pâtir d’instabilité, de conflits, de troubles sur le double plan intérieur et extérieur». Il faut donc commencer par l’entente nationale. Et à bon entendeur, salut.
Selon le mot d’Alexis Léger, «d’une convention de pis-aller, on voit souvent le pire et rarement ce qui peut aller». Taëf en constitue une parfaite illustration. Dix ans après sa conclusion, et alors que la région s’apprête à pénétrer dans une ère nouvelle, que reste-t-il de ce «pacte national»? Pas grand-chose en vérité. Cela se constate tout de suite, quand on...