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Actualités - CHRONOLOGIE

Les « rescapés » racontent deux jours de terreur

Visages tuméfiés, bras cassés, brûlures, plaies par balles : une cinquantaine de blessés, assis sous une bâche, se font soigner dans un hôpital de fortune. Rescapés de camps de gendarmerie ou de l’école de police d’Abidjan, ils racontent deux jours de tortures et de terreur. Installés en face de la résidence d’Alassane Ouattara, le leader du Rassemblement de républicains (RDR) dans le quartier cossu de Cocody, une demi-douzaine de médecins et autant d’infirmières ont reçu depuis samedi 476 blessés, dont 92 dans la matinée de lundi. La plupart affirment avoir été victimes de tortures jeudi et vendredi dans un camp de gendarmerie d’Abobo, au nord de la ville, dans celui d’Agban, le plus grand d’Abidjan, ou dans les locaux de l’école de police, situé au centre de la ville. Daouda – qui comme les autres témoins demande que l’on taise son nom de famille – a le dos strié de plaies. Il est brûlé sur le bras et les jambes. Jeudi, après la chute du général Gueï et la reconnaissance de la victoire de Laurent Gbagbo à la présidentielle, il a voulu marcher d’Abobo vers le centre-ville pour «manifester devant la télévision nationale». «On n’était pas encore sorti d’Abobo quand les militants du FPI (NDLR, le Front populaire ivoirien de M. Gbagbo) nous ont repoussés. Ils ont commencé à me frapper, puis m’ont livré aux gendarmes», raconte-t-il. «Au camp, ils nous ont mis à poil. Ils nous frappaient avec la crosse de leur fusil. Moi, ils m’ont roulé dans un barbelé. Ils m’ont dit “tu dois sortir de là en trois minutes”, sinon on t’abat». Ensuite, il a été brûlé en plusieurs endroits du corps avec des sacs en plastique fondus. Siriki, 31 ans, était enfermé dans le même camp, où il a passé toute la journée de jeudi. La plante de ses pieds est à vif. Il ne parle pas très bien le français mais explique comment deux hommes l’ont fait marcher sur un feu dans la cour de la gendarmerie. Baba, 33 ans, lui a été arrêté par des policiers jeudi à Yopougon, une autre vaste commune populaire au nord d’Abidjan. Il avait été appelé par d’autres musulmans pour aller défendre une mosquée, attaquée selon lui par des militants du FPI «armés de machettes». «Devant nous ils ont égorgé trois personnes», raconte-t-il. Des policiers sont intervenus, ont amené les musulmans vers le commissariat. Le lendemain, vendredi, ils ont été transportés à bord de deux camions vers l’école de police. «Il y avait au moins 300 personnes raflées là-bas. Ils nous ont frappés, on nous a torturés. Quand ils frappaient les gens, ils nous disaient de regarder à terre pour qu’on ne voit pas ce qu’ils faisaient». «Les policiers avaient la liste de nos noms. Ils ont fait des groupes de 25 et nous ont dit que toutes les heures ils prendraient un groupe et qu’ils nous tueraient». «Un premier groupe est parti vers 19 heures. Il y avait beaucoup d’étrangers parmi eux. On ne les a pas revus». Baba était sur la seconde liste, le 6e nom. Entre-temps sa sœur, qui connaissait un policier, a pu intervenir. «Ils ont fait sortir les cinq premiers, et moi j’ai pu être sauvé», raconte-t-il, le visage encore tuméfié.
Visages tuméfiés, bras cassés, brûlures, plaies par balles : une cinquantaine de blessés, assis sous une bâche, se font soigner dans un hôpital de fortune. Rescapés de camps de gendarmerie ou de l’école de police d’Abidjan, ils racontent deux jours de tortures et de terreur. Installés en face de la résidence d’Alassane Ouattara, le leader du Rassemblement de...