Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

De sourdes appréhensions alourdissent le climat politique

 Certains officiels ne craignent pas d’avouer que les sourdes appréhensions concernant la formation du Cabinet ne sont pas loin d’être justifiées. Un malaise que partagent nombre de politiciens et d’observateurs. Pour qui il est évident que cette fois encore, malgré les positions affichées par les instances concernées, c’est-à-dire en clair par les présidents Lahoud et Hariri, il ne sera pas possible d’éviter la «mouhassassa», ce traditionnel système de partage du gâteau. Pour la bonne raison que pour former un gouvernement, il faut faire participer les forces politiques ainsi que les composantes majeures de la société civile. Et que tout ce beau monde pose à qui mieux mieux des conditions aussi précises que contradictoires. Sans compter que les proches de Baabda comme de Qoraytem ont des vues sur des lotissements déterminés. Les premiers lorgnent ouvertement vers la frange dite stabilitaire du Cabinet, c’est-à-dire l’Intérieur, la Défense, la Justice et l’Information. Tandis que les deuxièmes veulent contrôler les Finances, l’Économie, les Travaux publics et les Ressources. Le problème c’est que personne ne reconnaît à personne un quelconque droit d’exclusivité. Entre autres exemples, il est notoire que les amalistes du président Nabih Berry veulent arracher les Finances aux haririens pour attribuer ce département-clé aux chiites, entendre à l’un des leurs, en soutenant que c’est ce qui avait été décidé à Taëf. Ces mêmes sources officielles relèvent cependant en substance que «le gros problème, qu’il est difficile d’occulter dans un pays où tout finit par se savoir, c’est que malgré les deux rencontres entre les présidents Lahoud et Hariri, il subsiste entre eux des points multiples de désaccord. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les consultations parlementaires ont été reportées. Il s’agit d’élargir le cercle des concertations pour tenter d’arranger les choses avant que les dés ne soient jetés». À partir de ces données, certains politiciens n’hésitent pas à envisager une récusation de M. Hariri. En ajoutant toutefois que «des efforts sont déployés pour qu’une telle éventualité ne provoque pas de crise politique majeure dans le pays. Ce serait en quelque sorte un forfait à l’amiable. Le cas échéant, le camp haririen participerait au gouvernement, mais pas à travers la personne de son chef et ne serait pas rejeté dans l’opposition». Une approche que cependant la plupart des observateurs jugent comme trop pessimiste. En affirmant, comme le souligne un ministre, que «tout le monde est conscient de la nécessité absolue de surmonter les problèmes, pour répondre à l’attente manifeste d’un pays qui a besoin d’un gouvernement fort, dirigé par l’homme du moment. Sans quoi les parties en jeu se rendraient responsables d’une aggravation impardonnable de la crise économique déjà très pénible». Selon cette même personnalité, «la situation reste politiquement sous contrôle et il n’y a pas d’effondrement à redouter. La sérénité des marchés financiers prouve d’ailleurs que le capital, frileux de nature, ne se fait aucun souci quant à l’évolution sur le plan ministériel. Il n’y a aucune panique, aucune ruée sur le dollar ou sur les autres devises fortes aux dépens de la monnaie nationale. C’est là un signe positif qui ne trompe pas». Ce même ministre jette volontiers la pierre «aux alarmistes professionnels qui visent des objectifs déterminés». Mais alors que selon certains loyalistes, les entretiens entre les présidents Lahoud et Hariri se sont déroulés on ne peut mieux, d’autres affirment qu’il leur a été impossible d’accorder leurs violons sur la composition du Cabinet. Au milieu, des politiciens pensent que des difficultés persistent, comme le prouve le report des consultations, mais qu’elles ne sont pas insurmontables. À cette nuance près qu’il existe justement des nuances assez complexes. Ainsi les loyalistes rappellent que, dès son investiture, «le chef de l’État avait proclamé qu’il n’était pas pour le partage et ne voulait rien pour lui-même, son but étant d’édifier en toute transparence l’État de droit et des institutions. L’ère de la troïka est terminée». Ces mêmes sources ajoutent cependant ensuite que «le président de la République est déterminé à faire respecter les équilibres politiques, à réguler le jeu en fonction des données sur le terrain, pour qu’il n’y ait pas d’abus ni de discriminations, pas plus entre les pouvoirs qu’entre les forces actives. Il compte donc assumer pleinement son rôle d’arbitre». Ce qui signifie qu’il n’est pas question de laisser carte blanche au président du Conseil désigné. Tandis que le camp haririen de son côté cherche à élargir ses alliances, à ne pas les limiter au bloc joumblattien, pour pouvoir neutraliser à la Chambre, le cas échéant, l’influence du président Nabih Berry. Une orientation tout de suite critiquée par des députés qui soupçonnent le milliardaire de vouloir monopoliser derechef le pouvoir. Bref, dans les coulisses, ce n’est pas vraiment un esprit d’union nationale qui domine aujourd’hui. Quoi qu’en disent les leaders. Philippe ABI-AKL
 Certains officiels ne craignent pas d’avouer que les sourdes appréhensions concernant la formation du Cabinet ne sont pas loin d’être justifiées. Un malaise que partagent nombre de politiciens et d’observateurs. Pour qui il est évident que cette fois encore, malgré les positions affichées par les instances concernées, c’est-à-dire en clair par les présidents Lahoud...