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Actualités - REPORTAGES

SOCIÉTÉ - Voiture, lave-linge, réfrigérateurs, canettes à la casse « Terminator » libanais pour objets encombrants...

Six minutes. Pas plus. Six minutes durant lesquelles votre voiture – ou plutôt votre tas de ferraille – est transportée par une sorte d’araignée aux énormes pinces, qui l’avale ensuite avant de la broyer et d’en faire un petit cube de la taille d’une valise de voyage. Non loin de Jdeidé se trouve une entreprise dirigée par Moussa Farhoud qui s’occupe de stocker pour broyer, sans pitié, tout ce qui est ferraille jetable et inutilisable. On se croirait dans un film américain, avec victimes et bourreaux, style Terminator dans lequel une multitudes de machines défectueuses, voitures, jantes, lave-linge, réfrigérateurs, sont condamnés à mourir, avant d’être transformés en de véritables petits cubes pour finalement être vendus et recyclés. En visitant cet endroit et en assistant en direct à cette mise à mort, on a presque mal au cœur pour l’engin écrasé par une pression de plus de 300 tonnes, et on finit par se dire que finalement, on n’est pas si mal là ou on est, bien au chaud. Un véritable carnage donc, où se mêlent dans nos têtes curiosité, peur, angoisse et un peu de sadisme aussi. Eh oui ! Tant qu’on s’attaque à plus faible que soi et que ça n’a pas d’âme. Cette entreprise géniale par sa conception est celle de Moussa Farhoud. Cet homme, âgé de 37 ans, possède une maîtrise en Business Administration obtenue à l’Université de San Diego aux États-Unis. Il a en fait repris le travail de son père Diab Farhoud, qui , dès son jeune âge, était attiré par toutes sortes d’objets métalliques. «Mon père s’est fait tout seul. En 1960, il a monté son entreprise, tout d’abord avec une seule machine qui lui servait de compresseur, pour ensuite agrandir son atelier et se procurer plusieurs grues». En fait, Moussa Farhoud est désormais le seul responsable à bord, il continue néanmoins à prendre les conseils de son père, bien plus expérimenté que lui dans ce domaine. «Dans cet atelier, on s’occupe du fer et de l’aluminium. Il faut s’assurer que la pièce métallique inutilisable ne contient que du fer. Il faut donc la nettoyer, et ce, avant que nos machines ne s’occupent à la broyer. Elle se trouve ensuite transformée en cube, ce qui facilite son transport et nous la vendons au prix du marché, qui dépend en réalité de la cote boursière quotidienne du fer». Les Farhoud trouvent leurs clients surtout à l’étranger. La Turquie, l’Italie, Chypre et la Grèce sont des acheteurs potentiels. Là-bas, le fer est traité, fondu, avant d’être recyclé. Le prix du fer en tonne est de 40 dollars américains. Pas cher du tout donc. Par contre, celui de l’aluminium varie entre 550 et 600 dollars. Grande différence ! L’entreprise de Moussa compte une dizaine d’employés, tous étrangers. «Malheureusement, le Libanais refuse ce genre de travail et c’est dommage», précise-t-il. Les employés travaillent 6 jours sur sept, 8 heures par jour pour un salaire de 300 dollars par mois. Avant les évènements, l’entreprise s’occupait du cuivre. Le fer ne représentait qu’une petite portion du chiffre d’affaires de l’atelier. Après la guerre, et suite à une fermeture de 15 ans à peu près, on a finalement laissé tomber le cuivre pour nous occuper seulement du fer et de l’aluminium». L’aluminium au fait, parlons-en. «Nous avons une machine, une mini- broyeuse, qui a pour rôle d’écraser toutes les canettes de boissons gazeuses, les casseroles... Nous procédons de la même façon qu’avec le fer. Avec toutes les canettes écrasées, on forme des cubes pas trop lourds pour le transporteur, et on les vend». L’entreprise fait-elle beaucoup de bénéfices ? «Pas vraiment. Comme tout business, il y a des hauts et des bas. Avec le salaire des employés qui ont chacun leur rôle bien spécifique, et mes dépenses, c’est difficile de dire que nous faisons de réels bénéfices». Et vos clients ? Qui sont-ils ? «Nous traitons avec un peu tout le monde, les particuliers et les grandes entreprises. En fait, nous sommes au service de quiconque souhaite se débarrasser de tout ce qui est métal ou aluminium». Voilà qui est clair. Si vous avez donc un lave-linge ou un réfrigérateur défectueux ou hors service à la maison, vous saurez désormais à qui vous adresser. Alors qu’à l’étranger, ce sont les clients qui payent l’entreprise pour les aider à se débarrasser des objets devenus inutiles, là, dans le cas de Moussa, c’est l’entreprise qui débourse. «Je paye la personne qui souhaite se débarrasser de sa machine ou de son accessoire, et je revends la pièce après traitement». Moussa travaille dans la même optique que l’État, la protection de l’environnement, mais il n’est pas vraiment aidé financièrement pour autant. «L’environnement doit être respecté par tous. C’est de ce point de vue que nous nous forçons à travailler proprement, en contrôlant le plus possible les matières polluantes. On essaye, avec nos petits moyens, de copier le modèle européen, d’atteindre les mêmes objectifs, tout en préservant la nature». Très bonne initiative donc. Moussa Farhoud aime son travail. Et malgré une crise économique qui touche véritablement tous les secteurs du pays, il entend conserver cette «affaire de famille». Avec ces deux araignées géantes, de véritables machines hydrauliques, dont le prix varie de 120 mille à 200 mille dollars américains, Moussa restera encore longtemps le «Terminator» de nos engins encombrants. Raji GABRIEL
Six minutes. Pas plus. Six minutes durant lesquelles votre voiture – ou plutôt votre tas de ferraille – est transportée par une sorte d’araignée aux énormes pinces, qui l’avale ensuite avant de la broyer et d’en faire un petit cube de la taille d’une valise de voyage. Non loin de Jdeidé se trouve une entreprise dirigée par Moussa Farhoud qui s’occupe de stocker pour...