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Actualités - ANALYSE

Ouverture et culture de l’ouverture

 Il apparaît de plus en plus nettement, de tout ce qui se passe sur la scène locale en ce moment, que c’est la cause de l’indépendance du Liban qui avance, à travers une résistance spirituelle, culturelle et politique par excellence à la présence envahissante de la Syrie. Mais cette cause s’avance aujourd’hui autrement qu’elle ne l’a fait pas le passé. Ce n’est pas contre la Syrie que l’indépendance du Liban s’affirme, comme à certains moments de la guerre, mais aux côtés de celle-ci. Il est moins question d’affaiblir la Syrie que de secouer le joug de sa domination politique. On est en train de démanteler l’emprise sur le Liban d’un État, qu’on doit bien reconnaître comme totalitaire, par la seule force de la volonté commune d’un peuple épris de ses libertés et profondément pénétré de l’idée de son originalité par rapport à une Syrie tout aussi originale, mais dont la morphologie historique est bien distincte. Car il ne viendra à personne l’idée de nier la grandeur du passé de la Syrie. Toutefois, l’interaction des communautés au Liban, au fil des trois derniers siècles, le creuset de leur vie commune dans l’empire ottoman, a donné à notre pays une identité originale qu’il serait dommage de condamner à la disparition, faute de volonté politique. Cette identité est porteuse de valeurs universelles uniques qu’elle seule peut produire. La tension culturelle entre l’islam et le christianisme a été résolue au Liban par un modèle de communauté de valeurs, de tolérance, de dialogue et d’égalité civique à bien des égards exemplaire. Ce dialogue a été menacé et continue de l’être par les partisans d’une idéologie figée qui doit être repensée, si elle désire produire des valeurs durables et universelles. Il est tout aussi menacé par certains des modèles politiques mis en application durant la guerre par ceux qui ont déclaré avoir placé la sécurité de la société chrétienne avant tout autre considération, et qui ont cloisonné le pays en ghettos culturels et spirituels. Ce qui a d’abord affaibli le Liban durant les années de guerre, ce sont les diverses atteintes portées à la volonté de vivre en commun. En affaiblissant cette volonté, on a failli porter un coup mortel au Liban. C’est pourquoi c’est d’abord sur cette volonté de vivre en commun qu’il faut agir. C’est elle qui doit être aujourd’hui renforcée, et par tous les moyens, par les Libanais soucieux de sauver leur modèle de société, leur modèle d’être ensemble. Il n’est pas question de permettre aux erreurs de la guerre d’être répétées. C’est une leçon de démocratie que nous devons tirer pour nous-mêmes et donner au monde. Certaines des forces qui luttent aujourd’hui pour secouer le joug de la Syrie doivent se défaire elles-mêmes des méthodes tyranniques qui ont marqué leur émergence et leur affirmation sur la scène politique. La pensée unique doit être traquée partout où elle se manifeste. L’affirmation de l’identité n’exclut en rien le dialogue. Et le type de dialogue qui doit s’instaurer entre le Liban et la Syrie est un dialogue de civilisation autant qu’un dialogue des institutions. Ce n’est pas seulement de la nature de l’État qu’il faut parler – encore que la discussion en soit utile – mais aussi de la nature des civilisations qui se construisent. La Syrie ne peut vouloir l’ouverture économique sans vouloir la culture de l’ouverture. Les rapports économiques sont également des rapports humains, des échanges culturels, un mode de relation. En un sens, ce qui secoue tout aussi bien le Liban que la Syrie, c’est une silencieuse révolution des esprits, l’irrésistible poussée de la conscience que l’homme a de sa propre dignité et dont les effets se manifestent à l’échelle planétaire. Mais il serait tout aussi erroné de croire que les seules menaces qui pèsent sur l’identité libanaise proviennent du dehors, ou des régimes politiques. Ces menaces viennent aussi du dedans, du relâchement propre à la nature humaine, de l’ouverture à une fausse liberté exercée en dehors de toute référence aux normes objectives inscrites par Dieu au cœur de l’homme, et dont le christianisme et l’islam proposent, chacun pour sa part, une interprétation. C’est sur ces plans que la complémentarité qu’on cherche à établir entre le Liban et la Syrie a le plus de chances de produire des fruits. Fady NOUN
 Il apparaît de plus en plus nettement, de tout ce qui se passe sur la scène locale en ce moment, que c’est la cause de l’indépendance du Liban qui avance, à travers une résistance spirituelle, culturelle et politique par excellence à la présence envahissante de la Syrie. Mais cette cause s’avance aujourd’hui autrement qu’elle ne l’a fait pas le passé. Ce n’est...