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Actualités - ANALYSE

Vie politique - La rupture semble consommée entre la Syrie et le leader du PSP Joumblatt et les membres de son bloc parlementaire indésirables à Damas

La nouvelle a fait l’effet d’une véritable bombe politique sur la scène locale. Le leader du Parti socialiste progressiste, M. Walid Joumblatt, est désormais «persona non grata», en Syrie. L’information a été annoncée en début d’après-midi par la radio française Radio-Monte-Carlo – Moyen-Orient, basée à Paris. Elle a été confirmée en soirée par un député proche du leader du PSP. Le parlementaire en question a précisé qu’outre M. Joumblatt, les ministres et députés membres du bloc parlementaire du leader du PSP sont eux aussi indésirables en Syrie. L’interdiction de séjour en Syrie visant M. Joumblatt constitue une conséquence directe de la prise de position en flèche adoptée par le leader du PSP lors du débat de confiance à la Chambre, à la fin de la semaine dernière. M. Joumblatt s’était alors prononcé pour un redéploiement de l’armée syrienne au Liban et pour un rééquilibrage des rapports entre Damas et Beyrouth. La mesure prise par Damas engloberait non seulement M. Joumblatt mais également les 15 députés membres de son bloc parlementaire – trois druzes, trois musulmans et neuf chrétiens – dont les deux ministres Marwan Hamadé et Fouad el-Saad. Une incertitude règne sur ce plan concernant le ministre de l’Information, Ghazi Aridi, qui est membre du PSP mais qui a été élu à Beyrouth sur la liste de M. Rafic Hariri. Les sources proches de M. Joumblatt laissent entendre que l’interdiction de séjour pourrait inclure aussi M. Aridi. Ce développement n’a pas été confirmé officiellement à Damas. Les médias officiels ne l’ont pas évoqué et les hauts responsables syriens à la présidence et aux ministères de l’Information et des Affaires étrangères, interrogés par le correspondant de l’AFP à Damas, se sont refusés à tout commentaire. Tard en soirée, des sources syriennes, citées par Radio-Monte-Carlo, affirmaient toutefois qu’aucune mesure d’interdiction de séjour n’avait été prise à l’encontre de M. Joumblatt. Les mêmes sources précisaient que le leader du PSP pouvait se rendre en Syrie «comme n’importe quel citoyen ordinaire». Cette petite phrase signifierait que M. Joumblatt n’est pas «interdit» de séjour en Syrie, mais s’il se rend sur les bords du Barada, il ne serait reçu par aucun responsable officiel. En annonçant la mesure frappant le leader du PSP, Radio-Monte-Carlo avait cité une circulaire émise par de hauts responsables syriens stipulant que «Walid Joumblatt et les hauts responsables du Parti socialiste progressiste n’ont pas le droit de pénétrer sur le territoire syrien (…) car l’entrée de la Syrie est interdite à celui qui désire servir Israël au Liban et celui qui veut être avec Israël ne peut pas être avec la Syrie». Cette information devait être par la suite confirmée par un député proche de M. Joumblatt qui a indiqué que «M. Joumblatt lui-même, son clan politique, les ministres et députés de son bloc parlementaire sont indésirables en Syrie». Une source digne de foi à l’Ouest a indiqué dans ce cadre qu’au moins l’un des membres du bloc parlementaire du leader du PSP a été personnellement notifié par un responsable des services spéciaux de l’armée syrienne au Liban que «M. Joumblatt et ses ministres et députés ne sont pas les bienvenus en Syrie». Le député en question a ajouté qu’à sa connaissance, «M. Joumblatt n’a pas été personnellement informé mais on lui a fait parvenir le message indirectement, et il a l’air de considérer que c’est exact». La cible des prosyriens Qu’une mesure d’interdiction de séjour en bonne et due forme ait été décidée ou non à l’encontre de M. Joumblatt et des membres de son bloc parlementaire ne change rien à une réalité qui apparaît désormais au grand jour, à savoir que le leader du PSP est, au moins, «indésirable» à Damas et qu’il est de plus en plus la cible directe des milieux prosyriens à Beyrouth. Le député Assem Kanso – qui l’avait pris violemment à partie au cours du débat de confiance – a repris hier ses attaques contre le leader du PSP, soulignant que l’information selon laquelle ce dernier serait «indésirable» en Syrie est «probablement exacte». Selon M. Kanso, qui est membre de la branche libanaise et du commandement panarabe du parti Baas au pouvoir en Syrie, «il s’agit de mettre fin au jeu de M. Joumblatt qui veut jouer les deux rôles et avoir un pied dans chaque camp». Auparavant dans la journée, la section libanaise du Baas prosyrien avait violemment critiqué le leader du PSP, se demandant «comment des députés comme Walid Joumblatt acceptent de participer au déferlement de haine contre la Syrie et de transformer le débat de politique générale en un débat sur la présence syrienne au Liban». «Notre peuple, a affirmé un communiqué de la branche libanaise du Baas, connaît ceux qui ont tué des gens en raison de leur appartenance religieuse et ceux qui ont cherché à morceler le pays». Même son de cloche au niveau du Parti syrien national social (PSNS) dont le commandement, réuni en soirée sous la présidence du ministre Ali Kanso, a vivement critiqué M. Joumblatt et ceux qui s’en prennent à la Syrie. Cette prise de position adoptée par le parti conduit par le ministre Ali Kanso en dit long sur l’impact que cette tension entre Damas et le leader du PSP aura sur la situation gouvernementale. Les milieux proches de la Syrie à Beyrouth parlent ouvertement d’un «divorce politique» consommé entre M. Joumblatt et Damas. «Les Syriens ont donné à M. Joumblatt une chance de modifier ses positions, mais il ne l’a pas fait. C’est donc maintenant le divorce politique», soulignaient en soirée les sources prosyriennes. Dans de telles conditions, on voit mal comment M. Hariri pourrait maintenir une cohésion ministérielle au sein de sa nouvelle équipe. Le Cabinet Hariri prend ainsi un très mauvais départ avec des ministres totalement acquis aux thèses syriennes (comme MM. Ali Kanso et Nazih Beydoun) et trois ministres (Marwan Hamadé, Fouad el-Saad et Ghazi Aridi), qui sont sinon interdits de séjour à Damas, du moins «indésirables» sur les bords du Barada. D’une certaine façon, le divorce politique entre le pouvoir syrien et le leader du PSP constitue un coup dur beaucoup plus pour M. Hariri que pour M. Joumblatt. Ce dernier, au contraire, pourrait sortir quelque peu renforcé de l’épreuve si l’on se place d’un point de vue strictement libanais, dans la mesure où le leader du PSP pourrait acquérir une envergure nationale peu négligeable en se démarquant ouvertement de la Syrie tout en poursuivant sa politique de rapprochement avec les chrétiens. Il est significatif sur ce plan que l’alliance tripartite constituée du Parti national libéral, le courant aouniste et des Forces libanaises se soit empressée hier soir de se solidariser sans détour avec M. Joumblatt. Les développements des prochains jours permettront, en tout état de cause, de déterminer si le divorce entre le PSP et Damas augurerait, à terme, de l’apparition d’un nouveau paysage politique sur la scène locale. Michel TOUMA
La nouvelle a fait l’effet d’une véritable bombe politique sur la scène locale. Le leader du Parti socialiste progressiste, M. Walid Joumblatt, est désormais «persona non grata», en Syrie. L’information a été annoncée en début d’après-midi par la radio française Radio-Monte-Carlo – Moyen-Orient, basée à Paris. Elle a été confirmée en soirée par un député...