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Actualités - CHRONOLOGIE

Hariri : L’armée syrienne est au Liban parce que le Liban en a besoin

Sur les libertés, la loi électorale, la stabilité monétaire, la réforme administrative, les privatisations, le chef du gouvernement, M. Rafic Hariri, a eu hier, dans sa réponse finale aux députés, des paroles tranchantes. Par contre, M. Hariri a adopté une attitude conservatrice au sujet des rapports libano-syriens. Il s’est opposé en particulier à toute idée d’un «congrès national» qui en débattrait, comme l’a préconisé M. Omar Karamé, ajoutant qu’en ce qui le concerne, l’Assemblée nationale actuelle est ce «congrès national» en question. Mais pouvait-on attendre autre chose du chef du gouvernement ? Au cours de ce débat parlementaire sur la présence syrienne au Liban, l’essentiel a été oublié, a fait valoir M. Hariri, c’est qu’Israël est toujours en état de guerre avec son environnement arabe, y compris le Liban. Pour la défense des soldats syriens, M. Hariri a souligné, par ailleurs, que ce n’est pas en raison du sang versé par les soldats de l’armée syrienne que cette dernière doit rester au Liban, comme si par le paiement de ce tribut, l’armée syrienne avait gagné un droit. «Si l’armée syrienne reste au Liban, c’est parce que le Liban en a besoin. Et dès que ce ne sera plus le cas, la question sera soulevée entre les gouvernements des deux pays», a ajouté M. Hariri. Au sujet de la loi électorale, qui n’a pas été mentionnée dans la déclaration ministérielle, M. Hariri a ensuite reconnu que l’un de ses gouvernements précédents avait adopté une mauvaise loi électorale, et a promis solennellement que s’il est encore au pouvoir, la prochaine loi électorale satisferait aux exigences de l’égalité entre les électeurs et les circonscriptions, quelle que soit la nature du découpage électorale adopté. Du reste, a-t-il noté, ce n’est pas le gouvernement seul qui fait la loi électorale ; le Parlement y est également engagé. Non aux ingérences illégales Mais c’est sans doute sur les libertés que les propos de M. Hariri ont le plus frappé. Aussi bien en ce qui concerne les ingérences occultes et les intimidations dont la presse fait l’objet, qu’en ce qui concerne la liberté d’expression et de manifestation, les arrestations arbitraires, la violation de l’intimité des domiciles, les écoutes téléphoniques, M. Hariri a été très clair, revenant plusieurs fois sur ses phrases, pour bien montrer qu’il ne plaisanterait pas avec ces choses. M. Hariri a même été jusqu’à déclarer que s’il constate que son action gouvernementale se heurte en la matière à un mur, il déciderait de se retrouver sur les bancs des députés. «Notre politique antérieure, en matière de libertés de la presse, était floue, elle ne le sera plus», a reconnu M. Hariri, qui s’est fait fort d’accueillir «à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit» n’importe quelle plainte qui émanerait d’un journaliste qui aurait reçu un coup de téléphone d’intimidation. «Une nouvelle salle d’opération», a lancé sous forme de boutade M. Nicolas Fattouche, trait d’esprit dont le chef du gouvernement a relevé la gratuité. Dans le même ordre d’idées, M. Hariri s’est engagé à combattre les «arrestations illégales» et toutes les pratiques policières dignes d’une «dictature», en affirmant que ces pratiques minent les fondements même de la société libérale libanaise. «Les mères ont leurs droits et leur dignité garanties par la Constitution», a-t-il dit. Mais là aussi, M. Hariri a nuancé sa position. Il a déclaré que dans toutes les démocraties parlementaires, des individus au passé trouble sont placés sous surveillance, et contraints de se présenter régulièrement devant un officier de police, pour rendre compte de leurs agissements. Il a enchaîné en affirmant que dans tous les autres cas, les arrestations et interrogatoires arbitraires, que les députés, la presse et les instances religieuses ont dénoncés ces dernières semaines, doivent cesser, ainsi d’ailleurs que la violation de l’intimité du domicile, de nuit ou de jour, ainsi que les écoutes téléphoniques. Sur cette dernière question, M. Hariri a été prolifique, affirmant que des «services officiels» pratiquent l’écoute téléphonique en dehors du cadre légal qui lui a été défini par une loi votée sous un précédent gouvernement présidé par lui. C’est au point, a-t-il dit, que mon téléphone et celui du président de l’Assemblée sont sur écoutes. À une plaisanterie que M. Berry lançait à ce sujet, M. Hariri a demandé que l’on revienne à un climat de sérieux, précisant qu’il avait eu la preuve qu’au moins une de ses conversations téléphoniques avec M. Berry avait été espionnée. Dénonçant la dérive des États dictatoriaux qui contournent la loi, M. Hariri a annoncé également qu’il ne permettra plus les arrestations préventives «pour les besoins de l’enquête», qui s’étendraient au-delà d’un délai raisonnable. L’affaire Siniora Le chef du gouvernement a tout de suit enchaîné sur la justice, mais n’a pas réussi à être aussi convaincant à ce sujet que sur les libertés. Il a notamment pris la défense de M. Fouad Siniora, en affirmant que la question qui doit être posée n’est pas : «Comment se fait-il qu’une personne mise en examen est nommée ministre ?», mais «Comment se fait-il que M. Siniora est mis en examen ?». Il a ajouté être parfaitement convaincu de son innocence. Toutefois, M. Hariri a refusé d’emboîter le pas à ceux qui réclament une indépendance totale de la justice par rapport au pouvoir exécutif. Répondant ensuite aux critiques formulées par les députés qui accusent les ministres du gouvernement de s’être «partagés le gâteau», M. Hariri a déclaré que dans tous les pays du monde, ce qu’on appelle au Liban «partage du gâteau» s’appelle tout simplement «gouvernement de coalition». Et de plaisanter sur le fait qu’un gouvernement réellement représentatif de toutes les nuances politiques et régionales du Parlement devrait comprendre 74 députés ! L’économie Le chef du gouvernement a ensuite abordé le volet économique de l’action de son gouvernement, passant en revue les divers moyens qu’il envisage pour sortir le pays du marasme. Il a commencé par affirmer que l’un de ses objectifs sera de dissiper l’espèce de rapport d’antagonisme qui s’est établi entre certains investisseurs et l’État. Ainsi, il a affirmé qu’il serait «fondamental» pour l’État de respecter ses engagements dans les contrats signés avec les entreprises. Il a poursuivi en affirmant qu’il mettrait l’accent sur la croissance, et qu’il n’y aura certainement pas augmentation des impôts, mais plutôt allègement de ces derniers et détaxation de certaines importations et des matières premières destinées à l’industrie. M. Hariri a également annoncé l’intention de son gouvernement de renvoyer en commission le projet de budget établi par le gouvernement sortant, afin d’y faire figurer un plan de croissance de l’agriculture et de l’industrie, tout en soulignant qu’il respectera la politique de stabilité monétaire qu’il avait lui-même instaurée, au début de son action gouvernementale, dans les années 90. Affirmant être au courant des rumeurs et théories qui préconisent une dévaluation de la monnaie nationale, M. Hariri a affirmé que toutes les expériences de dévaluation dans le monde se sont révélées négatives, et a réaffirmé que «l’un des fondements de l’action gouvernementale sera la préservation du pouvoir d’achat de la livre». Certes, M. Hariri s’est montré conscient du poids que représentent le service de la dette, le budget des Forces de sécurité, celui des fonctionnaires, sur le budget général, mais il a affirmé qu’il en combattra les effets, notamment par une réforme administrative qui commencerait pas la simplification des formalités administratives. Il a enchaîné en affirmant ne pas croire en l’efficacité d’un contrôle a priori des dépenses publiques, qui retarde la libération des sommes nécessaires, affirmant qu’il est toujours possible pour le fonctionnaire cupide d’utiliser ce moyen pour subordonner ses services à la perception de commissions. Un ciel ouvert L’un des atouts dont M. Hariri a déclaré vouloir user est la «politique du ciel ouvert», sur laquelle il affirme vouloir compter pour attirer les touristes et voyageurs au Liban. Si nous subordonnons l’autorisation d’atterrissage des avions étrangers au principe de la réciprocité, nous n’irons nulle part, a-t-il fait valoir, d’autant que la MEA n’a que 9 appareils ! En ce qui concerne les privatisations, et donnant en cela satisfaction à M. Salah Honein, M. Hariri s’est engagé à ce qu’aucun membre du gouvernement ne prenne part aux appels d’offres qui seront lancés par le gouvernement pour la privatisation de certains services publics. «À moins que ce ne soit sous des prête-noms», a lancé M. Antoine Haddad, dont la repartie a profondément déplu au chef du gouvernement, qui a référé le député du Metn à des avocats dans la salle, pour lui expliquer la nature et la gravité du délit dont se rendraient responsables, dans ce cas, les membres du gouvernement. Le chef du gouvernement s’est ensuite attaqué à la question de l’émigration des jeunes, affirmant que la seule manière d’y mettre fin est de créer des emplois et de développer des industries capables d’absorber les jeunes diplômés, dont la plupart le sont dans les sciences nouvelles liées au développement de la technologie des communications. Au sujet du secret bancaire, M. Hariri a déclaré que son gouvernement chercherait à respecter ce principe, tout en essayant de répondre aux critères de transparence que les instances monétaires internationales ont commencé d’exiger, en la matière, dans un effort pour dépister des opérations de blanchiment de l’argent. Il a affirmé que le gouvernement supprimera la loi sur la création de sociétés financières off-shore, perçues comme pouvant servir au blanchiment de l’argent sale, et du reste jamais utilisée. En conclusion, M. Hariri a déclaré que, bien que placé sous le signe du relèvement économique, son gouvernement était un gouvernement «pour tout le Liban et tous les secteurs, et qu’il n’existe pas de frontières claires entre l’économie, la sécurité, les affaires étrangères, la justice, les libertés, l’information... et tout ce qui touche à la vie des citoyens».
Sur les libertés, la loi électorale, la stabilité monétaire, la réforme administrative, les privatisations, le chef du gouvernement, M. Rafic Hariri, a eu hier, dans sa réponse finale aux députés, des paroles tranchantes. Par contre, M. Hariri a adopté une attitude conservatrice au sujet des rapports libano-syriens. Il s’est opposé en particulier à toute idée d’un...