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Actualités - CHRONOLOGIE

Lire en français et en musique - Concert unique de Jacques Higelin au lycée Abdel-Kader Rien comme personne

Il ressemble un peu à Paul McCartney, il a la voix qui déraille comme celle de Tom Waits, il est drôle et gai comme Charles Trénet, il a l’énergie d’un rappeur, il joue du piano, du synthé, de la guitare et de l’accordéon comme personne, et il se donne à son public comme à une femme. C’est Jacques Higelin, 60 ans, de père alsacien et de mère belge et copain des enfants qui l’adorent au premier coup d’œil. Pendant plus de trois heures, sans aucune interruption, sans aucune inhibition, il a offert un moment inoubliable à 250 personnes qui ne se doutaient presque pas de ce qui les attendait. Cet artiste qui passe comme un météore dans le ciel de la chanson française a 35 ans de carrière et monte sur scène comme si, à chaque fois, c’était la première fois. Élancé sans être maigre, il «surgit» des coulisses, pour employer un verbe qu’il aime. Mauvais sujet Et il est sublime : il parle pendant des heures de la vie, de Beyrouth, de la politique, de l’ambassadeur de France au Liban qui n’en demandait pas tant, de Dieu, de l’Eurovision, de la guerre, de l’amour, de l’homme. Un raz-de-marée d’images, de jeux de mots, de boutades, de moqueries cinglantes aussi : «Je suis un mauvais sujet», clame-t-il avec un sourire de jubilation, parlant de «cette autre France», celle qui ne fait pas partie du (star-) système, celle qui ne râle pas, qui n’est pas raciste, qui n’habite pas à Paris, qui ne zappe pas en voyant la mort à la télévision, qui accepte les homosexuels. «Une France non officielle, la mienne» : voilà pour les convictions. Les chansons ? Pars, Mona Lisa Klaxon, Irradié, Champagne pour tout le monde, Paris-New York ou Je suis amoureux d’une cigarette : en concert, l’artiste ne les interprète jamais deux fois de la même façon : son talent d’improvisation est tel qu’il s’interrompt fréquemment au beau milieu d’un couplet pour raconter une anecdote, sentir la salle accrochée à sa veste, et repartir de plus belle, l’entraînant avec lui, de gré ou de force : le public francophone libanais est un dur à cuire. Qui devient d’une douceur d’agneau sous les coups de boutoir de ce formidable homme de spectacle capable de réveiller un cimetière. Planète bizarre Jacques Higelin transpire sur scène, Jacques Higelin tousse, perdant presque la voix sur scène, boit sa «boisson pour cyclistes», interpellant l’éclairagiste, le caméraman sur scène, puis s’assoit au piano, se lève sans rien demander à personne ou distribue ses mouchoirs sales comme des souvenirs. Là, le contestataire se moquant toujours de la «starisation» se fait prendre au piège : une petite fille lui en demande un. Les enfants l’aiment autant que leurs parents. Ceux qui étaient samedi dernier au lycée Abdel-Kader entre 21h45 et 1h sont des chanceux et ils le savent. Ils savent qu’ils ont assisté à quelque chose de très particulier, et ils se partageront sûrement longtemps les mots, les mimiques, les accords, les histoires que leur a offertes un grand bonhomme aux cheveux gris tombé d’une planète bizarre, qui ne peut être comparée à aucune autre. À 60 ans, Jacques «Guiguelin» ne fait toujours rien comme personne. Et c’est tant mieux. D.G.
Il ressemble un peu à Paul McCartney, il a la voix qui déraille comme celle de Tom Waits, il est drôle et gai comme Charles Trénet, il a l’énergie d’un rappeur, il joue du piano, du synthé, de la guitare et de l’accordéon comme personne, et il se donne à son public comme à une femme. C’est Jacques Higelin, 60 ans, de père alsacien et de mère belge et copain des...