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Actualités - BIOGRAPHIE

LIVRES Une belle et riche biographie Par Georges FARCHAKH*

 Nombreux sont les ouvrages qui paraissent sur l’histoire récente du Liban. Comme si, au lendemain du cataclysme qui a secoué notre pays, nos historiens et intellectuels n’en finissaient pas de chercher la réponse à tant de questions qu’ils se posent, et qui finissent par se résumer en une seule : était-il inéluctable que nous en arrivions là ? Cette réponse, Roger Gehchan nous l’a fait entrevoir dans cette belle et riche biographie qu’il consacre à une éminente figure de la politique libanaise et arabe : Hajj Hussein Aoueini. C’est un ouvrage(1) dont l’iconographie, à elle seule, suscite chez le lecteur un profond sentiment de nostalgie. Ces hommes de dialogue et d’ouverture, qui savaient par leur sagesse et leur connaissance du Liban et du monde arabe faire avancer les choses, sans pour autant renoncer à leurs convictions ou aliéner la souveraineté de leur pays, les avons-nous assez appréciés de leur vivant ? En avons-nous écouté les leçons ? Avons-nous failli à notre devoir d’en assurer la relève ? Cet homme en particulier, au visage affable, au sourire fin, à l’intelligence pétillante derrière ses lunettes, qui va, tarbouche dressé sur la tête, rencontrer au fil des années tous ceux qui comptent au Liban, dans le monde arabe et sur la scène internationale, cet homme, Hajj Hussein Aoueini, nous donne l’impression, sur chaque photo, d’être en compagnie d’amis de longue date, avec lesquels il devise aimablement. Mais qu’on ne s’y trompe pas, il est en train de contribuer, page à page, à l’écriture de l’histoire de son pays de 1920 à 1971. Roger Gehchan – et là réside l’intérêt de cet ouvrage – a su replacer cette biographie dans le contexte national et régional de son époque. Il ne s’agit pas d’un simple rappel de faits historiques servant d’encadrement à la vie de Hussein Aoueini, mais d’un véritable travail d’historien, courant sur une cinquantaine d’années, qui, par sa richesse et les liens tissés entre la vie de Hussein Aoueini et les événements qui se déroulent (quand ils ne se bousculent pas dans les moments de crise), donne toute sa profondeur à l’action de cet homme politique, sans sombrer dans l’hagiographie. Ce livre s’adresse aussi bien au lecteur désireux d’en savoir plus sur cette période et sur l’homme, qu’à l’historien ou au chercheur qui pourra utilement se référer, en fin d’ouvrage, à la chronologie, à l’index des noms propres et, bien sûr, à la bibliographie abondante et remarquablement classée par thèmes et par sources. La vie de Hajj Hussein Aoueini commence comme un roman d’aventure : la Première Guerre mondiale bouleverse les données au Proche-Orient, l’Empire ottoman agonise, le nationalisme arabe gagne du terrain, les puissances mandataires répriment. Un jeune orphelin libanais, sans fortune, banni par les Français, débarque à Djeddah et, déjà apprécié pour son intelligence et ses capacités de dialogue, se voit confier une mission délicate et part, revêtu de l’Ihram vers la ville sainte de La Mecque, chargé par Amine Rihani et Ali, dernier maître du royaume chancelant des chérifs hachémites du Hedjaz, d’une délicate mission auprès du «léopard du désert» Abdel Aziz Ibn Séoud... Pressent-il, à cette époque, qu’il deviendra plusieurs fois ministre et chef du gouvernement, qu’il jouera un rôle de premier plan dans la vie politique du Liban et de la région ? En tout cas, il se pose, dès sa jeunesse, comme l’homme des situations complexes et des patientes négociations. C’est le même homme que nous retrouverons, 35 ans plus tard, artisan d’une rencontre décisive pour l’avenir et la souveraineté du Liban, celle des présidents Fouad Chéhab et Gamal Abdel Nasser, à la frontière libano-syrienne. C’est enfin le même homme qui, à sa mort, est salué à l’unanimité comme le grand défenseur, en toutes circonstances, de l’unité nationale libanaise. Entre ces points saillants d’une vie au service de son pays, des rencontres, des efforts, des discours, une diplomatie lucide, toujours empreinte de fermeté dans les convictions et d’ouverture dans le dialogue, dans un Moyen-Orient gravement ébranlé par la création d’Israël et ballotté par les luttes idéologiques et les querelles intestines. L’homme qui ne cessa d’appeler au calme, à l’entente et à la raison méritait qu’on lui consacre cet ouvrage. Roger Gehchan s’est très honorablement acquitté de cette tâche. Il mérite, lui aussi, notre reconnaissance. *Écrivain-journaliste (1) Hussein Aoueini, un demi-siècle d’histoire du Liban et du Moyen-Orient, Éditions FMA. 
 Nombreux sont les ouvrages qui paraissent sur l’histoire récente du Liban. Comme si, au lendemain du cataclysme qui a secoué notre pays, nos historiens et intellectuels n’en finissaient pas de chercher la réponse à tant de questions qu’ils se posent, et qui finissent par se résumer en une seule : était-il inéluctable que nous en arrivions là ? Cette réponse, Roger...