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Actualités - ANALYSE

Les chancelleries portent un regard critique sur le pouvoir local

«L’homme, la femme du siècle» ; le «top-model de l’année» ; «la meilleure entreprise». Et «votre horoscope pour le nouveau millénaire» : c’est le temps, médiatique, des bilans comme des prévisions. On décerne partout des prix et les cotations battent leur plein. Des diplomates en poste à Beyrouth se sont livrés à leur tour à ce petit jeu à la mode. Et malheureusement, ils n’ont voulu attribuer au Liban, ou plutôt à ses mécanismes de direction, qu’un regrettable accessit de docilité aveugle à la volonté des décideurs-tuteurs. L’un de ces observateurs étrangers relève que les responsables libanais «se laissent engluer facilement dans la gadoue des dossiers que l’on ouvre et que l’on referme les uns après les autres. Comme si le seul but était d’entretenir la scène politique libanaise dans un état de tension perpétuelle et de la faire tourner à vide». Faisant écho à cette constatation, une source ministérielle, en veine de sincérité comme de prudente discrétion, murmure en confidence, mezza voce, que «la ronde mobile des controverses, qui a l’air incontrôlé, est en réalité destinée à étouffer des questions épineuses comme la présence militaire syrienne. Ainsi, malgré la gravité que constitue le problème, on n’hésite pas à monter en épingle l’implantation des Palestiniens, pour faire oublier cette histoire de présence syrienne. Or le jeu américain se dévoile assez clairement : dans le cadre de la reprise des négociations, les Palestiniens sont invités à fermer les yeux sur le droit de retour de leur diaspora, moyennant des concessions israéliennes sur Jérusalem. Le danger de l’implantation se précise donc et ce n’est pas du tout le moment de le traiter dans une perspective purement tactique. C’est-à-dire de l’utiliser à la seule fin, du reste discutable, de démontrer que le Liban a toujours besoin de la présence militaire syrienne, pour contrôler les camps de réfugiés». Et de souligner ensuite que «le président de la République a amplement prouvé, depuis son avènement, qu’il est parfaitement conscient du danger que représente l’implantation. Il en a même fait une condition supplémentaire pour les pourparlers régionaux sur le volet libanais. Mais les autres pôles influents du pays ne semblent pas partager avec autant de conviction ses préoccupations. Certains d’entre eux ont même l’air de considérer l’implantation comme un fait acquis et ils vont jusqu’à évoquer les barèmes d’indemnisation que le Liban devrait négocier. D’autres encore, répétons-le, ne se soucient du péril que comme d’un moyen pour faire diversion au sujet du dossier de la présence syrienne. En tout cas, il n’y a de la part de notre pouvoir, ni plan d’action clair ni positions concrètes solidement unifiées. On constate ainsi, au-delà des protestations d’amitié mutuelle, que nos dirigeants s’opposent sur de multiples dossiers de base. La démonstration en a été faite avec éclat lors des réunions du Conseil supérieur de la défense et du Conseil des ministres consacrées à l’affaire des disparus. Mais on ne peut pour autant négliger des questions également majeures, comme les options au Sud, notamment en ce qui concerne Chebaa. Des dirigeants estiment qu’il faut laisser à la Résistance active le soin de récupérer ce territoire. D’autres soutiennent qu’on doit recourir à la négociation par les canaux diplomatiques. De même, des responsables pensent que l’instabilité doit continuer à prévaloir au Sud ; alors que d’autres conviennent que le devoir de l’État est d’y envoyer l’armée. Ces divergences, on ne peut les camoufler plus longtemps. Il faut que le pouvoir se décide». Et de conclure en indiquant qu’avec d’autres ministres, il se propose «de soumettre prochainement au pouvoir une sorte de charte d’honneur en vertu de laquelle les dirigeants s’engageraient à tenir tous un même langage, sur toutes les questions. Le Conseil des ministres pourrait de la sorte adopter un plan politique et informationnel cohérent, pour cesser justement d’être taxé d’incohérence». Ces aveux, les diplomates étrangers y souscrivent. En rappelant au passage qu’en ce qui concerne Chebaa, le précédent gouvernement avait proclamé dans un communiqué que la récupération s’en ferait pas des voies pacifiques. «Nous entendons aujourd’hui un autre son de cloche. Et nous ne savons plus très bien ce que le Liban officiel veut au juste. Si vos dirigeants n’accordent pas bien leurs violons, ils auront peu de chance de bien se faire entendre au-dehors, notamment pour contrer l’implantation», disent ces diplomates. Tandis que les haririens de leur côté déplorent les polémiques et l’instabilité politique ou de terrain, qui font fuir les investisseurs. Mais les haririens, s’ils participent au pouvoir, ne le détiennent pas tout entier. Du reste, les autres parties locales non plus. Philippe ABI-AKL
«L’homme, la femme du siècle» ; le «top-model de l’année» ; «la meilleure entreprise». Et «votre horoscope pour le nouveau millénaire» : c’est le temps, médiatique, des bilans comme des prévisions. On décerne partout des prix et les cotations battent leur plein. Des diplomates en poste à Beyrouth se sont livrés à leur tour à ce petit jeu à la mode. Et...