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Actualités - INTERVIEWS

Joseph : huit ans en prison, mais sa mère le croyait aux États-Unis...

«J’ai besoin d’un stage de réhabilitation », lance Joseph Hallit 39 ans, installé à côté d’un grand sapin de Noël dans sa maison de Riyak, un téléphone portable à la main. «Je ne connais ni antenne parabolique, ni Internet, ni cellulaire», explique-t-il en plaisantant. L’ancien détenu a été arrêté le 11 novembre 1992. Son crime : «collaboration avec les Forces libanaises». À cette date, il lui restait encore un an pour achever ses études de médecine. «J’ai passé en tout 2 956 jours, soit 70 740 heures, en prison», indique-t-il en montrant un minuscule bloc-note, où il a inscrit en toutes petites lettres des dates. «Je savais qu’à chaque page achevée j’avais servi déjà quatre mois en prison», dit-il simplement. Et d’ajouter : «Dans une cellule, on a une autre notion du temps». Au début de sa détention, Joseph a vécu 1 600 jours, soit quatre ans et cinq mois, dans une cellule individuelle d’un mètre par un mètre quatre-vingt-dix centimètres. Il a pris les mesures avec un bout de kleenex. Que faisait-il pour tenir le coup ? «Ça dépendait de mon humeur : je chantais, j’essayais de danser, je criais, et parfois je pleurais», répond-il. Plus tard, il a été transféré à Mazzé pour arriver le 17 mars 1998 à «la prison politique de Saydnaya». Dans ces deux geôles, armé de ses études de médecine, il était responsable de la pharmacie de la prison. Il s’occupait également des autres détenus malades. Joseph ne parle pas de torture. «Dans une geôle, c’est la première insulte qui compte», souligne-t-il. «Mais, on réussit toujours à ne pas perdre courage quand on sait qu’on est nés pour être libres», ajoute-t-il avec un air de défi. Durant tout son séjour en prison, l’ancien détenu a reçu six visites de sa famille. Ses sœurs, ses frères, ses oncles et ses cousins ont maintenu la mère de Joseph, qui a déjà perdu un fils en 1989, dans l’ignorance de son sort. «Mon frère, soldat de l’armée libanaise, est mort au combat», précise l’ancien détenu. De 1992 jusqu’à la libération de son fils, Mme Hallit sera persuadée que Joseph a passé huit ans aux États-Unis. Tous les mois, la sœur du détenu donnait de l’argent à la septuagénaire en expliquant : «Joseph a encore envoyé un virement à la banque». Pour les occasions, on imitait l’écriture du prisonnier sur une carte de vœux. Durant huit ans, chaque 21 mars, Mme Hallit recevait un bijou envoyé spécialement pour elle par son fils qui est parti travailler en Amérique. L’ancien détenu parle plus facilement de ses dernières heures en prison au Liban. Joseph n’a pas cru qu’il pourrait figurer parmi les premiers détenus libérés. Il avait en mémoire le numéro de téléphone de son frère et l’adresse de ce dernier à Beyrouth. Or le numéro de téléphone avait été modifié et son frère avait déménagé. Au moment de sa libération, Joseph était tout seul. Il s’est tourné alors vers un journaliste du Diyar, qui l’a accompagné à l’ancienne adresse d’Achrafieh. C’est à partir de cet endroit que le prisonnier libéré a réussi à contacter son frère. Joseph, qui s’est rendu déjà à Bkerké samedi, tient à remercier personnellement le patriarche maronite, les députés Farid el-Khazen, Pierre Gemayel, Nassib Lahoud, Albert Moukheiber, Walid Joumblatt, et Boutros Harb. «Tous ceux qui ont parlé de nous», dit-il. Il n’oublie pas de rendre hommage également aux présidents libanais et syrien. Lui qui voulait s’établir ailleurs en 1992 avant son arrestation, compte-t-il toujours voyager ? «Après mon séjour dans une prison syrienne, plus rien ne pourra m’arracher du Liban», souligne-t-il. Pat. K.
«J’ai besoin d’un stage de réhabilitation », lance Joseph Hallit 39 ans, installé à côté d’un grand sapin de Noël dans sa maison de Riyak, un téléphone portable à la main. «Je ne connais ni antenne parabolique, ni Internet, ni cellulaire», explique-t-il en plaisantant. L’ancien détenu a été arrêté le 11 novembre 1992. Son crime : «collaboration avec les...