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Actualités - ANALYSE

Un carrousel plutôt improductif d’initiatives conciliatoires

Embrasser pour mieux étouffer ? En ouvrant la porte à tout venant, en laissant les initiatives de conciliation se multiplier à l’infini, les décideurs diluent le débat, et noient le poisson. Il faut certes dire à leur décharge, que ce n’est peut-être pas leur objectif, car rien ne permet objectivement de contester leur volonté d’ouverture ou de leur faire un procès d’intention. Il n’empêche qu’en pratique trop de projets d’arrangements, souvent contradictoires, se trouvent maintenant proposés. Ce qui démontre, une fois de plus, que le mieux est l’ennemi du bien. Et ce qui tend aussi à faire croire qu’en définitive les autorités libanaises avaient bien raison de vouloir s’attribuer l’exclusivité du dossier, pour un traitement d’État à État. À cette différence près, tout à fait capitale, que la polémique publique, la médiatisation poussée de l’affaire, le remue-ménage, le tohu-bohu des relances d’ordre privé rendent bien plus difficile, sinon impossible, l’astuce classique qui consiste à enterrer un problème en l’officialisant. Un expert local, commentant le défilé de notables bien libanais au palais des Mouhajirine, souligne que «la question n’est pas d’exposer au jeune président Assad les craintes, les appréhensions, les doléances, les revendications du camp chrétien discriminé. Il s’agit, au-delà de ces considérations élémentaires, de trouver des solutions et d’identifier les mécanismes nécessaires à cette fin. – Faudra-t-il en passer par un congrès de dialogue national ? L’idée paraît séduisante à première vue. Mais elle se heurte, dans la mosaïque locale, à de sérieux problèmes d’ordre pratique, comme le choix des courants ou des personnalités qui pourraient y participer. Sans compter qu’une telle conférence serait une sorte de camouflet à la légitimité des institutions comme du pouvoir politique en place, qui sont censés être la référence de recours en matière de questions nationales. – Faudra-t-il instituer une commission mixte libano-syrienne qui servirait de trait d’union entre les centres de décision des deux pays pour normaliser, harmoniser et parfaire les relations bilatérales ? Une telle formule reviendrait sans doute à classer le dossier sans suite, car nul n’ignore qu’il n’y a rien de mieux qu’une commission pour enterrer dignement un projet. De plus, il existe déjà un Conseil supérieur libano-syrien doté d’un secrétariat général permanent qui est censé traiter tout problème relatif aux rapports bilatéraux. – Du moment que dans tous les cas de figure, qu’il y ait congrès national ou commission mixte, la décision finale de fait doit revenir aux institutions officielles, pourquoi ne pas les charger directement, d’entrée de jeu, du dossier ? Ces instances auraient pour tâche d’établir des contacts avec les différents pôles actifs de la nation, pour mettre au point, ensemble, un système correctif permettant d’améliorer les relations avec la Syrie et de dissiper les craintes ou les ressentiments des chrétiens. À partir de quoi, il n’y aurait plus besoin de prolonger indéfiniment la présence des forces militaires syriennes dans ce pays, ni de laisser leurs services continuer à s’immiscer dans la vie politique ou la vie courante des Libanais. Et de répéter que «le président Assad n’a certainement pas besoin qu’on lui explique les états d’âme de l’Est car il en sait plus long, sans doute, sur le dossier local que bien de nos compatriotes. Ainsi, le chef de l’État syrien dispose d’un document de travail établi en 1997 pour servir de plate-forme de dialogue libano-syrien. À l’époque, le président Hafez el-Assad s’était abstenu de toute réaction, de tout commentaire, au sujet de cette initiative qui recensait déjà les motifs d’amertume des chrétiens, et plus particulièrement des maronites. L’ancien ministre, M. Joseph Hachem, récemment reçu par le président Bachar el-Assad, a joint à cette pièce un exposé objectif de la période relationnelle d’après-Taëf qui peut servir de mémento. Cependant, redisons-le, ce ne sont pas les récapitulatifs qui comptent mais la volonté de prendre des décisions déterminées, ce qui ne s’est jamais fait».
Embrasser pour mieux étouffer ? En ouvrant la porte à tout venant, en laissant les initiatives de conciliation se multiplier à l’infini, les décideurs diluent le débat, et noient le poisson. Il faut certes dire à leur décharge, que ce n’est peut-être pas leur objectif, car rien ne permet objectivement de contester leur volonté d’ouverture ou de leur faire un procès...