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Actualités - REPORTAGES

PHOTOGRAPHES - Comment on devient un homme-caméra Bassam Lahoud, l’architecte de l’image

Architecte (diplômé de l’Esib), spécialisé en restauration (L’école de restauration de Florence) et en urbanisme (beaux-arts de Rome), Bassam Lahoud est surtout connu en tant que... photographe. Sa silhouette longiligne est presque devenue, pour les gens, synonyme d’homme à la caméra. De vernissages en manifestations, mais surtout aussi en voyage, il pose partout où il passe son regard de photographe. «Je fais en permanence des photos dans ma tête. Et pourtant, on me voit rarement la caméra autour du cou, je la déteste d’ailleurs», dit-il. Surprise ? «Je n’aime pas trimballer partout l’appareil. D’une part, parce qu’avec une caméra à la main, je n’arriverai jamais à un rendez-vous, tellement je prendrai de photos en chemin. D’autre part, parce que je préférerai avoir des objectifs incorporés dans mes yeux, je cliquerai en clignant de l’œil, et le film sortira de ma bouche». Voilà ce qu’on appelle un homme-caméra. Qui, à part la photographie mentale, a déjà à son actif un nombre incalculable de photos réelles. «Quand un site, un lieu, un paysage, une personne m’interpelle, je reviens alors avec mon appareil». Ce passionné de l’image fêtera l’année prochaine ses quarante ans... de photo. «Je compte publier un livre, qui retracera toutes ces années de photographie. Depuis la première prise de vue (le palais Lahoud à Amchit) réalisée à dix ans avec l’appareil de mon père, aux toutes dernières images». Quand il regarde ses anciens clichés, Bassam Lahoud ne peut s’empêcher de regretter d’avoir perdu l’innocence du regard. «Ce côté primitif, qui s’estompe en cours de route, parce qu’à un certain moment, on joue le jeu de la demande des magazines, des journaux... Mais là, je redeviens à nouveau moi-même». C’est en 1983, lorsqu’il fonde avec Stavro Jabra et Nadia Gamal la revue Scoop, que Bassam Lahoud se lance dans la photographie. «Je faisais moi-même les portraits, les photos touristiques et de patrimoine de la revue. Stavro se réservait les photos de charme». L’aventure durera jusqu’en 1990. À la fermeture de la revue, il part consolider ses acquis techniques à Florence où il fait un Master en Fine Arts. Il est alors pris définitivement dans les filets de la photographie professionnelle. Aujourd’hui, tout à la fois architecte, photographe artistique, publicitaire et de presse (il fait des reportages touristiques et des photos d’architecture et de décoration pour Prestige), enseignant (il donne des cours –photojournalisme, photographie pour architectes et designers, pour publicistes et photo d’art – à la LAU), Bassam Lahoud, à travers ces activités multiples, reste toujours centré sur l’image. « Patience et longueur de temps » De sa formation en architecture, «qui est pour moi la base de tous les arts», il a acquis «le sens de la lumière, celui de l’équilibre des volumes, très importants quand il faut construire une image. Ce qui ne veut pas dire faire une image montée, mais découvrir l’instant à partir d’un certain angle». Néanmoins poète dans l’âme, cet «architecte de la photo», comme il aime qu’on le surnomme, a besoin de «sentir l’instant pour prendre une photo déterminée. Je ne peux pas me forcer. Je peux refuser un travail sur commande (un portrait, une photo d’architecture) si le sujet ne m’inspire pas. Et, dans le cas contraire, je peux faire spontanément le portrait d’une personne, parce que quelque chose en elle me plaît». Ce grand marcheur dans la nature réalise beaucoup de photos de paysages. Il prépare d’ailleurs actuellement, avec Viviane Ghanem, un livre illustré sur la Békaa. «J’ai deux façons de “faire” des paysages : en images classiques. Et en clichés retravaillés». Il a dans ce dernier registre réalisé une série de clichés, intitulée «la beauté de la pollution ou la pollution de la beauté», sur les éléments de destruction de l’environnement (déchets, huiles, bateau rouillé), montrés sous un angle esthétique, à la limite du surréalisme. La préparation d’une exposition de Bassam Lahoud peut se dérouler en plusieurs étapes et sur plusieurs années. Sur le thème «Du début... jusqu’à la femme», cet éternel amoureux des femmes a monté une exposition dont le premier tirage, une photo d’embryon, a été artificiellement réalisé par un procédé de pigmentation exposée... pendant 8 ans au soleil et à l’humidité. Le reste des photos suivait les phases d’une vie de femme : enfance, adolescence, jeunesse, au sommet de sa beauté, maturité, etc. Il a appliqué le même principe de «patience et longueur de temps» dans ses séries sur les grands changements du XXe siècle. À l’instar de Berlin, dont il a immortalisé certains quartiers – et leurs habitants– en 1984, avant la chute du Mur, puis en 1998, quatorze ans plus tard. Après avoir été exposés l’an dernier à Beyrouth (au Goethe Institut) puis à Tripoli, à Damas et à Amman, ces «parallèles photographiques» sont accrochés à Berlin, à l’East Side Hotel situé face à la East Side Gallery, qui n’est autre que la partie du Mur (1 300 mètres) qui n’a pas été détruite. Photo tout à la fois réflexion, mémoire, témoignage, expression ultime, l’image de Bassam Lahoud se veut la plus «authentique» possible. «Je fais le moins possible de manipulations sur ordinateur, je me contente de jouer sur le cadrage. Et de toute façon je n’ai pas encore commencé à utiliser l’appareil numérique, souligne-t-il. Je suis de ce point de vue assez traditionnel». Il n’y a pas de photo parfaite. Il y a des instants parfaits. «Il faut juste, comme dirait l’autre, bien viser et tirer vite», conclut l’homme à la caméra. Z.Z.
Architecte (diplômé de l’Esib), spécialisé en restauration (L’école de restauration de Florence) et en urbanisme (beaux-arts de Rome), Bassam Lahoud est surtout connu en tant que... photographe. Sa silhouette longiligne est presque devenue, pour les gens, synonyme d’homme à la caméra. De vernissages en manifestations, mais surtout aussi en voyage, il pose partout où il...