Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Vie politique - Les questions litigieuses ne sont plus soumises au vote en Conseil des ministres La dévalorisation des institutions, une affaire de praxis

Est-ce l’entente présidentielle qui bloque les institutions ? N’est-ce pas plutôt une faille dans les textes ? Certains soutiennent qu’en se réunissant avant le Conseil des ministres pour accorder leurs violons, les présidents court-circuitent l’institution et marchent sur les plates-bandes des ministres. Ils réclament donc que l’aparté en question soit aboli, ce qui a été fait lors du dernier rendez-vous du Conseil. Une exigence d’ailleurs un peu candide, sinon puérile, car les deux intéressés peuvent toujours se parler à d’autres moments. D’autres pensent que le Conseil est paralysé principalement parce que son règlement intérieur découle d’un simple décret et non d’une loi. Un ancien dirigeant parlementaire relève pour sa part que le défaut de la cuirasse ne se trouve ni dans la Constitution ni dans les lois, mais bel et bien dans la praxis qui ignore les textes avec superbe. Il souligne que nul ne peut empêcher l’entente entre les présidents, surtout pas la Constitution qui prend soin, au contraire, de la recommander. Ce n’est pas l’harmonie présidentielle qui, à son avis, torpille le Conseil des ministres, mais le comportement que tous adoptent. Est-ce qu’un ministre, se demande cette personnalité, a jamais été empêché de prendre la parole sur un sujet qui le concerne en séance ? Et si cela s’est produit, est-ce qu’on en a entendu protester et menacer de démissionner ? Dans la pratique courante du Conseil, peu de responsables ministériels interviennent pour exposer leur avis, positif ou négatif, pour se ranger aux côtés de la majorité ou se soumettre à ses décisions s’ils y sont hostiles. Pourtant certains ministres critiquent ouvertement, et vertement, au-dehors les résolutions adoptées alors qu’ils s’étaient gardés de le faire en Conseil. Cette sorte d’attitude, et de ministres, resterait inchangée, que le règlement intérieur soit ou non modifié, qu’il soit promulgué par décret ou par une loi, qu’il y ait ou non une entente présidentielle. Ils renoncent eux-mêmes à leur droit de parole officielle, se dessaisissent de leur fonction, puis s’indignent en public contre leur relégation sur le banc de touche. Cette personnalité note que l’entente présidentielle contourne le litige d’interprétation que suscite l’alinéa 5 de l’article 65 de la Constitution. Disposition fonctionnelle qui s’énonce comme suit : « Les résolutions du Conseil des ministres sont prises à l’amiable. Au cas où cela s’avère impossible, par vote à la majorité simple des assistants. Les sujets fondamentaux nécessitent l’approbation des deux tiers du gouvernement tel que numériquement déterminé dans le décret de formation. » En fait, le mécanisme cité se trouve gelé depuis belle lurette. Le dernier vote enregistré (au profit du camp Hariri et aux dépens d’une minorité pro-Lahoud) remonte à l’époque où le pouvoir devait se prononcer sur des questions concernant Solidere. Depuis lors, le chef de l’État n’encourage pas le recours à la procédure de vote. Il prend soin d’assister à tous les Conseils, alors qu’il n’y est pas tenu, pour éviter que l’on n’adopte des résolutions dans son dos. De son côté, le président du Conseil n’insiste pas pour que l’on vote, afin de ne pas heurter le régime de front. Il est donc devenu d’usage de ne pas mettre au vote les questions litigieuses, mais de les ranger de côté jusqu’à ce qu’un accord soit conclu à leur sujet. De ce fait, le Conseil des ministres ne peut tout simplement plus fonctionner en tant qu’organe de vraie décision comme le veut la Constitution. Ainsi, l’entente présidentielle se substitue au Conseil des ministres et à la Constitution, à cause de sa non-application en séance. Damas, qui prête beaucoup d’importance à l’harmonie au sein du pouvoir libanais, préfère qu’il n’y ait pas de bras de fer à travers un vote en Conseil, et favorise la recherche d’un accord aussi parallèle que préalable. La coutume prend donc force de loi. Jusqu’à nouvel ordre. Émile KHOURY
Est-ce l’entente présidentielle qui bloque les institutions ? N’est-ce pas plutôt une faille dans les textes ? Certains soutiennent qu’en se réunissant avant le Conseil des ministres pour accorder leurs violons, les présidents court-circuitent l’institution et marchent sur les plates-bandes des ministres. Ils réclament donc que l’aparté en question soit aboli, ce qui a...