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Actualités - OPINION

Exemptions - Coût pour l’office : 60 millions de dollars L’EDL, principale intéressée, n’était pas... au courant !

Un scandale en cache un autre. Ni le ministre, prodigue, de l’Énergie ni la Chambre que dirige, énergiquement, le chef d’Amal n’ont prévenu l’Électricité du Liban qu’ils comptaient la priver de compteur. C’est-à-dire de ses droits. Les exemptions d’arriérés et d’amendes ont été décrétées au débotté, place de l’Étoile. Au moment même où l’office s’engage dans un considérable effort de recouvrement. En établissant une cartographie administrative précise de tout le Grand Beyrouth. Afin d’y mettre fin aux diverses infractions, branchements illicites en tête. Or la direction générale et le conseil d’administration n’ont appris qu’ils étaient joués qu’en même temps que le public, par les bulletins d’information des médias. Ils s’en offusquent d’autant plus que l’État est bien placé pour savoir que l’EDL est fortement endettée, vu qu’il en est le principal créancier et qu’elle fonctionne un peu mal à cause de ses déficiences financières. Les exemptions, disent les spécialistes, vont coûter à l’EDL plus de cent milliards de LL, plus de 60 millions de dollars en somme. En outre, le fait d’encourager les gens à ne pas payer a tout l’air d’être un bâton dans la roue du programme de privatisation. Que pourtant le gouvernement et le ministère concernés prétendent défendre, alors que le personnel de l’office craint pour sa part pour ses statuts, sinon pour ses emplois. Sur un plan parallèle, l’EDL s’étonne que la nouvelle loi prévoit la mise en place d’une commission dirigée par un juge pour trancher les réclamations. Cette disposition enfreint en effet le code instituant l’EDL et qui a créé, au sein même de cette Administration, un bureau des plaintes. Il y a là, à dire vrai, une issue de secours paradoxale. En effet, le double emploi pourrait faciliter la prise en compte, par le Conseil constitutionnel, d’un éventuel recours que signeraient dix députés pour l’annulation de la nouvelle loi. Ce que le ministre de l’Énergie, Mohammed Abdel Hamid Beydoun, avait en tête, il l’avait proclamé dès sa nomination, fin octobre 2000. Représentant et défenseur d’une forte tranche d’impayeurs, il voulait en effacer l’ardoise. Il a mis deux ans pour y parvenir. Ce qui est à l’honneur des autres parties politiques. Dont certaines, comme les haririens, ont quand même fini par céder, malgré le courroux de Siniora. Et malgré le fait que Hariri avait indiqué aux cadres de l’EDL, qui s’inquiétaient des rumeurs sur une relaxe fiscale, qu’il ne laisserait pas passer le projet. Il a changé d’avis. Pourquoi ? Parce que, pour le moment, le Premier ministre ne veut pas de bisbilles avec les autres présidents. Berry compris. L’entente au sommet est une priorité, comme le souligne Aridi, ministre de l’Information, qui y voit un élément éminemment positif. Il reste que la fameuse majorité loyaliste est divisée sur le cadeau électrique fait aux resquilleurs chapardeurs, aux amnésiques de la quittance. Les démagogues de certaine frange se frottent les mains. Mais la plupart des députés, dont plusieurs ont voté la loi par pur respect des consignes de bloc, pensent que c’est là un redoutable précédent. Ils soulignent que, comme pour le cas connu des dérapages de la route, les contrevenants de toutes sortes se trouvent encouragés à ne pas s’acquitter de leurs taxes ou amendes. Dans l’espoir, maintenant renforcé, d’une amnistie, d’un coup d’éponge général. Certains proposent dès lors qu’on étende de suite les exemptions à tous les domaines, pour mieux préciser que cela serait pour une seule et unique fois. Et pour renforcer au passage le système des sanctions. Mais on sait, comme l’exemple de la loi électorale le montre, que la méthode dite pour une seule et unique fois camoufle le plus souvent un mécanisme répétitif. Pour en revenir au ministre de l’Énergie, maintenant qu’il a obtenu ce qu’il voulait, il se met à affirmer que son département va considérablement renforcer le contrôle des compteurs, partout. Et serrer la vis au niveau de la perception, grâce à des équipes de travail renforcées. Il serait curieux de savoir si la plus-value envisagée va compenser les dizaines de millions de dollars perdus par les exemptions. Autrement dit, on se demande si Beydoun va pouvoir reprendre d’une main ce qu’il a donné de l’autre. Et à l’Est, où l’on est forcément sceptique, on pense en général que la main de fer va surtout s’abattre sur les régions qui ont toujours payé pour les autres. Le plus grave, peut-être, reste que les exemptions vont contre Paris II et risquent d’envoyer Paris III dans le mur. En effet, le gouvernement libanais a promis de renforcer ses recettes, de serrer les cordons de sa bourse, et au lieu de cela il se lance dans des libéralités au profit d’illégaux ! Pas très sérieux tout cela, vont sans doute se dire la Banque mondiale, le FMI, les Américains, les Arabes, les Japonais et les Occidentaux. Et ils vont se demander s’ils seraient bien inspirés d’accorder encore une rallonge à un État qui pourrait la prochaine fois, pourquoi pas, exonérer des trafiquants ou des blanchisseurs d’argent. Un État qui promet de se réformer et commence par faire le contraire. Philippe ABI-AKL
Un scandale en cache un autre. Ni le ministre, prodigue, de l’Énergie ni la Chambre que dirige, énergiquement, le chef d’Amal n’ont prévenu l’Électricité du Liban qu’ils comptaient la priver de compteur. C’est-à-dire de ses droits. Les exemptions d’arriérés et d’amendes ont été décrétées au débotté, place de l’Étoile. Au moment même où l’office...