SANTÉ - « Réduire les risques et promouvoir une vie saine » L’OMS appelle le monde à sortir de sa léthargie

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rendu public son rapport pour l’année en cours sur la santé dans le monde, placé sous le titre « Réduire les risques et promouvoir une vie saine », au cours d’une conférence de presse organisée hier au siège de l’Ordre de la presse. Prenant la parole en premier, le Dr Mostafa el-Nakib, directeur médical du Programme national pour la lutte contre le sida, a affirmé que la stratégie adoptée par celui-ci consiste à limiter l’expansion de la maladie et à lutter contre elle en atténuant ses répercussions négatives sur les plans médical, social et matériel. Dans ce cadre, le programme organise des campagnes de sensibilisation à l’intention de la population à risque, des jeunes et des femmes, portant sur les causes d’atteintes de ce virus, les modes de transmission et les moyens de prévention. De même, il assure les traitements médicaux et hospitaliers des sidéens en leur fournissant, à travers le ministère de la Santé, les médicaments nécessaires. « Nous engageons également des négociations avec les agents des produits pharmaceutiques afin d’obtenir des prix réduits sur les médicaments et d’assurer ainsi la continuité des traitements », a-t-il conclu. Après avoir rappelé les buts du Programme national des maladies non transmissibles, Mme Danielle Daccache Farhat, coordinatrice, a déclaré qu’en l’an 2002, le programme a pu lancer, avec le soutien du ministère de la Santé et de l’OMS, le premier registre national du cancer, le premier du genre relatif aux maladies chroniques. Actuellement, il jette les bases pour la création d’un registre national des maladies cardio-vasculaires, en coopération avec l’Association libanaise des cardiologues. « Les registres nationaux sont importants puisqu’ils permettent de donner une image réelle des maladies chroniques au Liban afin de pouvoir établir une stratégie globale d’intervention pour lutter notamment contre les facteurs de risque, le tabac demeurant le plus important », a-t-elle précisé. En effet, le diabète, dont souffre 13 % des Libanais âgés de plus de 25 ans, touche davantage les fumeurs. » En ce qui concerne les autres maladies chroniques, les études ont montré que 26 % des Libanais souffrent d’hypertension artérielle, 18 % d’excès de cholestérol, 42 % de triglycérides et environ 40 % de maladies cardio-vasculaires. « Cela est dû au changement des habitudes alimentaires, a expliqué Mme Daccache. De fait, une alimentation riche en matières grasses réduit de 20 à 30 % l’énergie de notre organisme, ce qui incite à une paresse évidente se traduisant par une inactivité physique (76 % des Libanais ne pratiquent pas de sport). » 47 % des élèves fument Les méfaits du tabac ont été évoqués par le Dr Georges Saadé, directeur du Programme national pour la lutte contre le tabagisme. « Environ 500 millions de fumeurs dans le monde sont en danger de mort, sachant que les enfants et les adolescents sont les plus touchés par l’accoutumance à la cigarette, a remarqué le Dr Saadé. Les dernières statistiques prévoient le décès de 8,4 millions de ces fumeurs en l’an 2020, 70 % d’entre eux se trouvant dans les pays en voie de développement. » Au Liban, les chiffres sont des plus inquiétants. Une étude menée en 2002 par le Programme national pour la lutte contre le tabagisme dans des écoles des différentes régions montre que 47 % des élèves fumeurs sont âgés de 13 à 15 ans, 12 % d’entre eux développant une accoutumance à la cigarette. D’après cette même étude, 43 % des enfants et adolescents consomment le tabac principalement à travers le narguilé. « En 2002, le registre national du cancer a enregistré 1 370 nouveaux cas au Liban, a poursuivi le Dr Saadé. Quatre pour cent des cas sont diagnostiqués chez les femmes et 22 % chez les hommes, sachant que dans 86 % des cas, la tumeur pulmonaire est due à une consommation excessive du tabac. » « Que ces chiffres soient pris au sérieux et coopérons avec les ministères concernés pour promulguer des lois dissuasives, des règlements interdisant la cigarette dans les lieux publics et des lois pour protéger les mineurs contre la consommation du tabac et poursuivre ceux qui le leur vendent », a invité le Dr Saadé qui a conclu : « L’industrie du tabac menace notre jeunesse. Elle fait passer la mort pour la vie, la maladie pour la santé et l’addiction mortelle pour un goût de liberté et une célébration de la vie. » Améliorer l’espérance de vie M. Habib Latiri, représentant de l’OMS au Liban, a indiqué que les grandes avancées de la santé publique ont consisté à réduire ou supprimer des facteurs de risque. Ainsi, les progrès de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement aux XIXe et XXe siècles sont directement liés à la lutte contre les micro-organismes qui provoquent le choléra et autres maladies diarrhéiques. De même, les campagnes de vaccination systématique ont permis d’éradiquer le fléau de la variole et de réduire la menace que font peser sur des individus et des populations entières des maladies infectieuses telles que la poliomyélite, la fièvre jaune, la rougeole et la diphtérie. « Le but principal du rapport sur la santé de l’OMS est d’aider les gouvernements des différents pays à réduire ces risques afin d’améliorer l’espérance de vie de leur peuple, a-t-il souligné. Le rapport définit dix facteurs considérés comme étant les ennemis de la santé. Il s’agit de l’insuffisance pondérale, des pratiques sexuelles dangereuses, du tabagisme, de la consommation excessive d’alcool, de l’usage d’eau non potable, du défaut d’assainissement et d’hygiène, de la carence en fer, de la pollution de l’air à l’intérieur des habitations qu’entraîne l’usage de combustibles solides, de l’hypercholestérolémie et de l’obésité. Tous ces facteurs sont à l’origine de plus de 30 % des décès dans le monde. » Précisant que l’amélioration de la santé peut se faire à travers la prévention et la culture médicale, M. Latiri a conclu son allocution en insistant sur le fait que le bureau de l’OMS œuvre à atteindre ce but en collaborant avec les clubs sportifs dans les écoles, l’institut de formation d’aides-soignants à Beyrouth, l’institut de formation d’aides infirmières à Khiam et la presse, ainsi que par des activités menées auprès des habitants des régions de la Békaa, du Liban-Sud et du Liban-Nord et dans les dispensaires et les hôpitaux privés et gouvernementaux. Mieux vaut prévenir que guérir Le mot du parrain de la conférence, le ministre de la Santé, Sleiman Frangié, a été prononcé par son représentant, le Dr Albert Joukhadar. « L’essor qu’a connu le XXe siècle, notamment dans le domaine de la santé, n’aurait pas été possible, dans les pays développés, sans l’importance accordée à la prévention, a-t-il indiqué. Au Liban, malgré le coût excessif de la santé, nous demeurons bien au-dessous du niveau atteint par les pays occidentaux, et cela parce que nous dépensons en traitement plus que nous ne le faisons sur la prévention. » « Il est anormal de consacrer des dizaines de millions de livres pour les opérations à cœur ouvert, alors qu’un maigre budget est consacré à la prévention des maladies cardiaques, a-t-il déploré. Le facture médicale est exorbitante au Liban pour plusieurs raisons, principalement l’expansion anarchique des nouvelles technologies, le surnombre des médecins et le désordre qui règne sur le marché des médicaments. Le ministère de la Santé œuvre à trouver des solutions à ces problèmes à travers un Programme de réforme sanitaire. » Étaient notamment présents : le président de l’Ordre de la presse, Mohammed Baalbacki, le président de l’Ordre des médecins, Mahmoud Choucair, et le représentant du président du syndicat des journalistes, Kamal Fadlallah. Nada MERHI