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Actualités - CHRONOLOGIE

Téléphonie mobile - Cardahi a émis des réserves mais le document du Conseil supérieur de la privatisation a été adopté Le transfert de propriété se fera désormais sans problème, mais la bataille continue

Le nouvel épisode du feuilleton de la téléphonie mobile a connu hier une « fin heureuse », période d’entente entre les présidents oblige, mais la guerre n’est pas pour autant terminée. C’est au cours des trois prochains mois, lors de l’évaluation des appels d’offre que tout se jouera, mais, pour l’instant, le Conseil des ministres a adopté, sans la moindre discussion, mais avec les réserves du ministre des Télécommunications Jean-Louis Cardahi, le document de transfert de propriété à l’État des équipements et des avoirs comptables des deux sociétés de téléphonie mobile, élaboré par le Conseil supérieur de la privatisation. Selon des témoins, la séance du Conseil des ministres d’hier était l’une des plus calmes de ces deux dernières années. Lorsque le secrétaire général du Conseil a annoncé, selon l’ordre du jour, le thème du cellulaire, un silence total a régné. Pas un ministre présent n’a voulu émettre une opinion ou poser une question. Pendant quelques secondes, on aurait même pu entendre une mouche voler. Conscients de l’entente entre le chef de l’État et le président du Conseil depuis la fameuse séance de « lavage des cœurs », qui s’est illustrée hier par un aparté d’une heure et demie entre les deux hommes, les ministres présents n’ont pas voulu s’aventurer sur un terrain miné ou prendre le moindre risque. Le secrétaire général a dû réitérer son annonce, et le ministre des Télécommunications lui a alors remis une note comportant ses réserves sur le document élaboré par le Conseil supérieur de la privatisation. Le secrétaire général l’a soigneusement rangée, pour l’histoire, et le Conseil des ministres a ainsi adopté le document du Conseil supérieur de la privatisation sans la moindre discussion. Le silence de Cardahi Interrogé sur ses réserves, le ministre Jean-Louis Cardahi a refusé d’émettre le moindre commentaire ou de répondre aux questions. Mais selon des sources bien informées, il ne serait pas d’accord avec le processus en cours. Les mêmes sources précisent que dans le dossier des téléphones cellulaires, il y avait une date butoir, celle du 31 août 2002. Avant cette date, il y a eu la résiliation unilatérale des contrats, contre laquelle le ministre avait déjà émis des réserves, se demandant pourquoi prendre une telle décision à la hâte, avant d’avoir établi un plan d’action. C’est d’ailleurs lui qui a demandé que le dossier soit soumis au Conseil des ministres et cette période a été marquée par une confrontation ouverte entre Cardahi et les sociétés, leurs actionnaires et leurs alliés. À partir du 31 août, le ministère a considéré, sur base de la décision du Conseil des ministres, que la propriété des sociétés de téléphonie mobile, et notamment leurs équipements et leurs avoirs comptables ont été transférés de facto, de plein droit à l’État, car le transfert de propriété se fait à l’expiration du contrat, donc le 31 août. Les deux sociétés contestaient ce fait, soulignant qu’il reste des détails à régler avant le transfert et retardant ainsi le lancement de l’appel d’offres. Les « détails » en question se résumeraient en fait à trois points : d’abord, le paiement par l’État d’environ 180 millions de dollars qu’il doit aux deux sociétés réunies pour leurs équipements et avoirs comptables, ensuite l’abolition des deux mandats de recouvrement de trois cents millions de dollars chacun, émis par le ministère qui estime que les sociétés lui doivent cette somme pour leur exploitation abusive du réseau en ne respectant pas les clauses du contrat de BOT et la question de l’arbitrage international. Sursis de paiement, sans garantie Dans le document préparé par le Conseil supérieur de la privatisation, les sociétés cessent de contester le transfert de propriété, en recevant les 180 millions de dollars, en contrepartie d’une « suspension de l’exécution des mandats de recouvrement », ce qui revient en quelque sorte au « sursis de paiement » réclamé par le ministre Cardahi, qui, selon certaines informations parues dans la presse, souhaitait toutefois obtenir des garanties de paiement, parallèlement à l’octroi du sursis. Le document final retient le délai de paiement, au lieu de l’abolition pure et simple des mandats de recouvrement, mais ne prévoit aucune garantie. Par contre, au sujet de l’arbitrage international, il a été convenu, conformément à la décision du Conseil d’État, de garder le recours présenté par FTML (qui possède en grande partie Cellis), en vertu de la Convention franco-libanaise pour la protection des investissements, devant UNCITRAL, qui tranche les litiges selon les règlements des Nations unies et qui est basée à Genève, mais de ne pas tenir compte des recours présentés devant la Chambre d’arbitrage international par Cellis et LibanCell. Depuis le Conseil des ministres d’hier et après des concertations discrètes en France (avec des responsables des deux sociétés en question), à la veille de la tenue de Paris II, et dont le ministère des Télécommunications n’a nullement été informé, la page est donc tournée. Le transfert de propriété devient ainsi effectif et les appels d’offre peuvent enfin être lancés, dès la semaine prochaine, annoncent les sources bien informées. Mais une nouvelle bataille se profile à l’horizon. Et elle s’annonce encore plus dure que les précédentes. Déjà, la HSBC avait été sollicitée pour établir les conditions de préqualification. Son travail n’a toutefois pas été jugé satisfaisant, puisque le Conseil supérieur de la privatisation a adopté d’autres conditions, « revues à la baisse » et permettant à LibanCell d’être dans la course, alors que Cellis l’est déjà. D’ailleurs, beaucoup d’experts se demandent si tout ce scénario ne serait en fait destiné qu’à accorder les deux licences aux sociétés déjà existantes. Quant à Liban Télécom, qui doit naître prochainement et qui appartient à l’État (contrairement à certaines rumeurs qui parlent de partage des parts entre certains pôles politiques), elle serait chargée de gérer l’ensemble du réseau de téléphones et posséderait ultérieurement la troisième licence. En tout cas, un comité spécial, formé de 5 membres, trois nommés par le ministère et deux par le Conseil supérieur de la privatisation, sera chargé d’évaluer les offres dans un délai de trois mois, et c’est là que se jouera désormais la bataille décisive. Tout en restant muet comme une carpe avec la presse, pour ne pas mettre en cause l’entente présidentielle, le ministre Cardahi continuera à défendre son point de vue, indifférent aux rumeurs évoquant son éventuelle révocation, dans le cadre d’un remaniement ministériel. Pourtant, de plus en plus de ministres parlent des mauvais effets du « lavage des cœurs » entre Lahoud et Hariri, qui se traduisent essentiellement par une sorte d’accord global pour éviter les conflits et les secousses, parfois aux dépens des droits de l’homme et de ceux du contribuable. Scarlett HADDAD
Le nouvel épisode du feuilleton de la téléphonie mobile a connu hier une « fin heureuse », période d’entente entre les présidents oblige, mais la guerre n’est pas pour autant terminée. C’est au cours des trois prochains mois, lors de l’évaluation des appels d’offre que tout se jouera, mais, pour l’instant, le Conseil des ministres a adopté, sans la moindre...