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Actualités - CHRONOLOGIE

CONCERT - La villa Mokbel, rue Sursock, un monument en musique Les notes bleues de Walid Hourani(photo)

Dans une architecture élégante et raffinée, jaillie des atmosphères florentino-vénitiennes, la musique de Walid Hourani, plus éblouissant et pince-sans-rire que jamais dans ses remarquables performances, a admirablement résonné (même si l’acoustique des lieux n’est pas idéale !) dans le cadre de « Monuments en musique » (en collaboration avec l’ École de musique Ghassan Yammine) à la villa Mokbel illuminée, à la rue Sursock. Devant un parterre de choix, trié littéralement sur le volet, notre éminent pianiste a offert au cercle restreint de mélomanes venus l’applaudir un bouquet de partitions, originales dans leur mélange à prédominance de notes bleues. Au menu , alliant fougue et délicatesse romantiques aux emportées et syncopes du jazz américain en passant par des mélodies du cru même du pianiste, pour finir sur les vagues du Danube bleu, la tendance était à un moment décontractée sans pour autant oublier une discrète bravoure et maestria. Ouverture un peu solennelle avec une sonate (en la majeur op 2 n2) de Beethoven. Quatre mouvements pour dire toute la passion et la puissance d’une inspiration touchée par la grâce d’un romantisme aux teintes multiples. Des premières mesures déterminées et interrogatives au rondo final ondoyant et tout en légèreté aérienne en passant par un largo grave, majestueux, presque tendu tout en n’omettant pas un scherzo tendre comme une caresse de plume, la voix du maître de Vienne avait une certaine sérénité où flottaient toutefois de ces moments de doute et d’angoisse, présages latents d’incoercibles tempêtes… Pour prendre le relais, le rondo capriccioso op 14 du plus gai des compositeurs, Félix Mendelssohn. Remarquable pianiste, l’auteur des Romances sans paroles avait écrit de nombreuses pièces pour son instrument de prédilection dont ce rondo, absolument agréable à jouer, mais où l’on ne saurait découvrir un sentiment véritable. Comme un rêve vaporeux, cette narration fluide tout en dentelles de notes fines et diaphanes, se déploie en une mélodie filante et insaisissable. Pour terminer la première partie de ce programme, l’Alma Mater, variations sur le thème de l’hymne de l’AUB, œuvre signée et affectionnée par Walid Hourani et dont on a applaudi déjà la prestation dans des concerts précédents. Nostalgie des années d’études, rythmes variés où se coulent des embardées jazzy (dont le pianiste est si friand) avec des airs échappés subtilement empruntés à notre terroir. Après l’entracte, changement de rives et d’horizons. Direction le Nouveau Monde… Sept chansons de George Gershwin retracent le chemin de ce millionnaire de la musique à qui tout a réussi et qui est mort comme un héros de Francis Scott Fitzgerald ! Comme un chapelet, les airs sont égrenés avec une finesse de perles de nacre qui s’entrechoquent et l’on reste un peu rêveur et un peu heureux, en accompagnant ces mélodies célèbres et célébrées partout au monde, notamment ce morceau qui a fait des ravages Oh Lady Be Good ou ce sensuel et langoureux The Man I Love ou ce I Got the Rythm, chanson reprise par tous les grands du jazz. Dans un sillage proche à Gershwin on écoute ici la Machine de l’âge de William Albright dont l’écriture moderne d’avant-garde nous est peu familière. Des premières notes têtues et obsédantes telle une rafale de pluie qui revient avec insistance jusqu’à la prière finale, douce et fervente, en passant par le spleen de Cristofori, inventeur du piano il y a plus de 300 ans et les balbutiements et les borborygmes de l’ordinateur qui termine sa séquence avec un bruit effroyable de pétard éclaté, cette narration insolite est sans nul doute revêtue du caractère d’une musique expérimentale et exploratoire des ressources du piano. Pour terminer, vent d’euphorie avec le Beau Danube bleu de J. Strauss transformé en concert d’arabesques grâce aux soins de A. Shultz-Evler. Grands arpèges liquescents comme un filet d’écume blanche et tourbillon des mesures emportant l’auditoire sur une embarcation qui tangue au gré des flots. Grappes de notes opalescentes et épanouies pour une œuvre d’une éternelle fraîcheur. Gerbe de fleurs à un pianiste au visage inondé et qui garde comme un joueur sportif une serviette (avec clef de sol et notes noires en barres, s’il vous plaît !) autour du cou. Salve d’applaudissements et un bis avec mélodie à l’américaine. Nouvelle révérence et l’artiste s’engouffre derrière une porte ornée de part et d’autre de grandes tentures en velours bordeaux. Restaient sur scène, entre trois arcades à colonnettes, sous les applaudissements qui vont en mourant du public, telle une toile peinte, un grand et luisant piano à queue noir et une gerbe de fleurs multicolores. Edgar DAVIDIAN
Dans une architecture élégante et raffinée, jaillie des atmosphères florentino-vénitiennes, la musique de Walid Hourani, plus éblouissant et pince-sans-rire que jamais dans ses remarquables performances, a admirablement résonné (même si l’acoustique des lieux n’est pas idéale !) dans le cadre de « Monuments en musique » (en collaboration avec l’ École de musique...