Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Tribune Réflexions juridiques sur la décision du Conseil constitutionnel

La décision du Conseil constitutionnel rendue le 4-11-2002 dans la rocambolesque affaire des élections partielles du Metn nous invite a réfléchir sur sa véritable portée. En premier lieu, la décision relate in extenso les faits avancés par les parties, ce qui a pour mérite d’épargner au lecteur et électeur (même averti !) un effort de mémoire qui lui manquait. C’est ainsi qu’on apprend que la candidate requérante n’avait pu, ni su habiliter son père pour présenter la fameuse lettre de retrait de la bataille de proclamation des résultats électoraux. Le Conseil constate souverainement que ce retrait n’est pas exprès, et est donc inopérant. En revanche, la question hautement constitutionnelle de voir le Conseil se prononcer sur la valeur juridique de la notion de retrait de la bataille de proclamation des résultats reste inexplorée et non débattue par ce dernier. En second lieu, le Conseil, en relevant les irrégularités du procès-verbal de constat rendu par la commission de recensement supérieure, a dissipé un point de droit culminant : désormais, la commission supérieure – malgré ses attributions – n’a pas compétence pour étudier les résultats chiffrés ou non des votes transmis à elle par les commissions de recensement primaires, seules habilitées en la matière. Par ce dictum, le Conseil a écarté tout rôle d’appréciation et d’étude, pourtant clairement attribué dans l’article 24 de la loi électorale à la commission dite supérieure. À moins de donner un sens inutile au texte de la loi, même combiné avec d’autres plus utiles, le Conseil n’a pas défini le véritable rôle de contrôle que cette commission était appelée à jouer. On aurait pu penser, au fil de la lecture de sa décision, que le Conseil, après avoir renvoyé dos à dos le ministère de l’Intérieur et la commission supérieure au motif d’erreur manifeste d’intrusion, allait lui-même résoudre l’énigme du bureau de vote 303 de Hemlaya et apprécier ainsi l’opportunité de la décision de la commission de recensement primaire. Or malgré un dictum bien clair sur sa compétence exclusive d’appréciation, le Conseil s’est refusé à exercer un pouvoir de sanction qu’il était seul tenu d’appliquer. En ne s’exprimant pas sur le sort de ces bureaux de vote aux résultats contestés, le Conseil n’a pu trancher en droit. Pourtant dans un cas similaire outre-Atlantique, la Cour suprême s’est penchée des semaines durant sur le décompte manuel des voix pour départager des candidats que ne liait, il est vrai, aucune parenté proche. En troisième lieu, on ne peut que s’incliner devant le dictum du Conseil qui s’attribue la plénitude du contentieux en matière électorale. Fort de l’article 31 de la loi portant sa création, le Conseil rappelle à plusieurs reprises dans ses considérants que sa compétence ne se limite point aux conclusions des parties, et que sa décision ne se cantonne pas à des logiques de solutions préconçues. Soit. On est donc en droit de penser que le Conseil, fort légalement d’ailleurs, opère de manière casuistique et ultra-petita. Mais hélas, c’est tout un autre procédé qu’il a retenu dans le cas présentement quoique très rare d’après son propre Obiter Dictum : celui de proclamer l’élection d’un troisième candidat étranger au conflit et dont les résultats électoraux sont loin de pouvoir concurrencer ceux des candidats en tête. La raison de son choix, quoique souverain, de la troisième voie nous laisse perplexes. Les irrégularités graves dont a pu seul profiter le candidat élu (dixit le Conseil) auraient du logiquement favoriser le deuxième candidat en lice ayant obtenu le plus grand nombre de voix. Or le Conseil, tout en récusant toute volonté de retrait de la part de la requérante, s’abstient de déclarer sa victoire. Il s’abstient également de procéder à de nouvelles élections comme le semble bien le lui indiquer le texte de l’article de la loi. Finalement, c’est la constatation des irrégularités graves commises par le candidat élu, accusé d’avoir mené haut et fort sa campagne à l’encontre du sacro-saint principe constitutionnel (introuvable ! ?) de vie commune entre Libanais, qui a eu raison de la voix du peuple, privé d’une franche explication et d’une véritable consultation. C’est une traduction libanaise de la notion bien comprise de démocratie de proximité. Badih MOUKARZEL Avocat, enseignant de droit public à la faculté de droit de l’USJ
La décision du Conseil constitutionnel rendue le 4-11-2002 dans la rocambolesque affaire des élections partielles du Metn nous invite a réfléchir sur sa véritable portée. En premier lieu, la décision relate in extenso les faits avancés par les parties, ce qui a pour mérite d’épargner au lecteur et électeur (même averti !) un effort de mémoire qui lui manquait. C’est...