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Actualités - CHRONOLOGIE

Malgré deux points de presse, peu de détails sur la réunion à huis clos Des débats chaleureux, mais il ne faut pas attendre des miracles, selon Charles Rizk(photos)

«Le plus mauvais service qu’on puisse rendre à ce sommet, c’est d’en attendre plus qu’il ne peut donner. » Par cette phrase précise, le Dr Charles Rizk, représentant personnel du président de la République libanaise au Conseil permanent de la francophonie, a résumé l’atmopshère générale des séances d’hier. Il ne faut donc pas espérer des condamnations claires d’Israël ou une prise de position contre les frappes américaines en Irak par exemple, et encore moins des miracles sur le plan économique. Mais cela n’ôte rien à l’importance de la tenue de ce sommet à Beyrouth, ville du dialogue des cultures par excellence, qui a permis à chacun de s’exprimer et surtout qui a permis, comme l’a dit un diplomate, de mettre le doigt sur les vrais problèmes. Au second jour du IXe Sommet de la francophonie, une image marque les esprits des journalistes du centre de presse, celle du secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, aux côtés du patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, assistant à la séance d’ouverture. Les Libanais n’en reviennent pas et les étrangers ne comprennent pas. L’homme dont le parti figure sur la liste américaine des organisations terroristes, accueilli le plus naturellement du monde par les officiels libanais et d’autres, il y avait de quoi perdre ses repères. Selon la formule d’un journaliste, Nasrallah était un homme politique en habit religieux et Sfeir un homme de religion en habit politique et, côte à côte, ils étaient la concrétisation des efforts de l’État d’absorber toutes les parties. Interrogé d’ailleurs sur la question, le Dr Charles Rizk a estimé que la présence de sayyed Nasrallah est normale et celle « des chefs religieux a donné une dimension intéressante à la séance, dans l’esprit du dialogue des cultures ». Des valeurs humanistes universelles Ce même dialogue des cultures qui constitue le grand titre du sommet et qui n’a été effectivement abordé que lors de la séance de l’après-midi d’hier. Selon le Dr Rizk, ce thème a été présent tout au long du sommet, mais les chefs d’État et de délégation en ont longuement parlé hier. Le prince héritier du Maroc, Moulay Rachid, le Premier ministre du Québec, Bernard Landry, la présidente de l’Association des parlementaires francophones, Mme Louise Harel, et le président du Sénégal ont exposé leur point de vue sur la question. Moulay Rachid a ainsi mis l’accent sur la dualité entre les valeurs humanistes qui sont universelles et les particularismes dus aux environnements différents et qui forment les cultures différentes. Le président sénégalais a, lui, rappelé que son pays, dont la population est à 95 % musulamne, a eu pendant vingt ans un président chrétien, Léopold Senghor. On se serait en quelque sorte cru dans un séminaire philosophique, mais les présidents et chefs de délégation avaient en fait détaillé les thèmes politiques dans la séance du matin, qui s’est déroulée à huis clos, sur une initiative du président français Jacques Chirac, pour permettre aux chefs d’État de s’exprimer sans contrainte. Ce qui a filtré de cette séance reste assez succint. Quatre grands thèmes ont été abordés : la lutte contre le terrorisme, la situation au Moyen-Orient, la situation en Afrique et le bilan et les perspectives de l’action politique de la francophonie. Selon le Dr Rizk, c’est le président français qui a introduit le sujet, réclamant une lutte globale et sans merci, mais qui ne doit pas se limiter à la répression. Une lutte civilisée contre le terrorisme Apparemment, les présidents et chefs de délégation n’ont pas pu aboutir à une définition commune du terrorisme, même si, interrogé sur la question, le Dr Rizk a précisé qu’il ne s’agit pas d’un « séminaire de réflexion » pour procéder à ce genre d’exercice. De même, il n’a pas voulu préciser si le Hezbollah a été évoqué dans ce cadre, mais la théorie du président algérien Bouteflika sur le fait que les grandes inégalités entre les pays du Nord et ceux du Sud constituent le terreau idéal pour le terrorisme a été reprise. Selon le Dr Rizk, qui est le porte-parole du sommet, le président Chirac a développé l’idée d’une lutte sans merci contre le terrorisme, mais dans les limites du respect des droits de l’homme. Il a été aussi question de la contribution des francophones à cette lutte, de manière à ce qu’elle reste « civilisée », afin de ne pas tomber dans les excès et sous prétexte de lutter contre le terrorisme d’en faire soi-même. La résolution 1 373 du Conseil de sécurité de l’Onu sur le terrorisme (sur laquelle le Liban avait émis des réserves) et celle 4 651 de l’Assemblée générale de l’Onu ont aussi été évoquées, comme bases de la lutte contre le terrorisme. Au sujet du Moyen-Orient, le président Émile Lahoud a présenté sa vision de la situation, précisant qu’il ne s’agit pas seulement d’un conflit israélo-palestinien, mais d’un conflit israélo-arabe. L’approche libanaise est donc multilatérale, sur base de la conférence de Madrid de 1991. Selon le Dr Rizk, le débat a été très riche et le Liban a été écouté très attentivement et avec une certaine sympathie. Le ministre égyptien des AE aurait même fait une intervention sur le sujet. Mais ce que le porte-parole ne dit pas, c’est que tous les pays n’étaient pas forcément d’accord avec la vision libanaise. Ce qui est un peu normal, puisque la francophonie, qui regroupe 52 membres à part entière, représente le tiers des Nations unies et comme celles-ci, elle est tiraillée entre divers courants, certains pays ayant des relations très étroites avec Israël, d’autres avec les États-Unis. Ainsi va le monde et, pour aboutir à un consenus, il faut se contenter généralement de grandes lignes. La sécurité et la paix en Afrique D’ailleurs, selon un diplomate qui connaît bien le monde arabe, la Syrie, par exemple, serait très intéressée à entrer dans l’OIF, surtout que le régime actuel opère une grande ouverture dans ce sens, favorisant la multiplication des écoles francophones. Mais si jamais elle devait faire une demande en ce sens, Israël pourrait à son tour vouloir le faire et cela pourrait poser des problèmes... Selon le Dr Rizk, la question irakienne n’a pas été abordée pendant la séance à huis clos, même si elle a marqué les discours officiels tout au long de la journée de vendredi et les réunions bilatérales, dans les coulisses du sommet. Ce sujet ne semble en tout cas pas faire l’unanimité, même si, grâce notamment à la France, la plupart des pays présents au sommet sont contre l’unilatéralisme et préconisent une voie de concertations, que pourrait offrir la francophonie. Troisième sujet évoqué pendant la séance à huis clos : la situation en Afrique et plus particulièrement en Côte d’Ivoire. Dans l’après-midi d’hier, une rumeur sur une éventuelle rencontre entre le Premier ministre ivoirien, qui préside la délégation de son pays, et le présdident du Burkina Faso a circulé, ce qui constituerait une amorce de dialogue positif entre les deux pays. De même, le président de Madagascar, dont l’élection n’a pas encore été reconnue par la Côte d’Ivoire et l’OUA, pourrait aussi rencontrer le Premier ministre ivoirien, dans un signe évident de détente. À la séance à huis clos, il a donc été question de la sécurité et de la paix en Afrique. Dernier sujet de la séance à huis clos, l’évaluation de l’activité politique de l’OIF, qui se confirme de plus en plus. Le virage a été amorcé à Hanoi, s’est poursuivi à Moncton et aujourd’hui, il est devenu une réalité incontournable. Mais, comme le répète le Dr Rizk, il ne faut pas s’attendre à ce que ce virage produise des miracles. L’après-midi d’hier a donc été consacré au dialogue des cultures et aujourd’hui, les chefs d’État devront aborder le volet économique, discuter du projet de résolution finale et élire un nouveau secrétaire général, l’ancien président sénégalais, Abdoul Diouf étant le candidat favori. Concernant le volet économique, le Dr Rizk a rappelé que si les pays membres de la francophonie représentent 30 % de l’Onu, économiquement, ils ne représentent que 11 % du PNB mondial et si on excepte la France, le Canada, la Suisse, la Belgique et le Luxembourg, on tombe à 1 %. C’est dire qu’il faut surtout compter sur les accords bilatéraux, notamment avec la France, soit directement, soit par le biais des institutions internationales. Enfin, avant de clôturer ses travaux, le sommet fixera la date et le lieu de sa prochaine rencontre. On parle déjà du Burkina Faso, en 2004. D’ici là, tant de choses peuvent se passer. Scarlett HADDAD
«Le plus mauvais service qu’on puisse rendre à ce sommet, c’est d’en attendre plus qu’il ne peut donner. » Par cette phrase précise, le Dr Charles Rizk, représentant personnel du président de la République libanaise au Conseil permanent de la francophonie, a résumé l’atmopshère générale des séances d’hier. Il ne faut donc pas espérer des condamnations claires...