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Actualités - OPINION

Tribune Libérez la justice !

Par Alexandre NAJJAR* Le spectacle auquel nous assistons aujourd’hui au Liban est affligeant : nos dirigeants semblent avoir oublié que la justice, quand elle est sélective, n’est plus la justice ; que la justice, quand elle devient instrument de vengeance, est la négation même de la justice. Alors, ils embastillent, ils musellent une chaîne de télévision qui employait des centaines de personnes et constituait l’un des fleurons de notre paysage audiovisuel, ils exhument des dossiers poussiéreux, fabriqués de toutes pièces, comme à l’ère du stalinisme où, pour noyer un opposant, on l’accusait de la rage... À quoi riment ces mesures ? Elles ne conduiront qu’à affaiblir davantage la cohésion interne, à aggraver le sentiment de frustration chez une grande partie de la population, à hâter l’exode de ces jeunes qu’on tabasse parce qu’ils ont l’outrecuidance de s’exprimer, à rendre impopulaire le régime lui-même, dont les promesses ne concordent pas avec la triste réalité que nous vivons, à ternir l’image du Liban à l’heure où nous accueillons une cinquantaine de chefs d’État francophones (la francophonie est d’abord communauté de valeurs !), à l’heure aussi où nous espérons une alliance avec l’Union européenne – qui ne badine pas avec les libertés publiques et qui a récemment exigé (et obtenu !) l’abolition de la peine de mort en Turquie. Certains jettent la pierre aux magistrats. Mais il ne faut pas se tromper de cible. Comme l’affirmait le pamphlétaire Zo d’Axa, à la fin du XIXe siècle : « Les commissaires et les substituts n’ont, il faut le reconnaître, qu’une responsabilité relative. Tous les abus de pouvoir leur sont indiqués par le faux-noble préposé aux vengeances du gouvernement... » Il est temps, il est grand temps, de mettre fin à ce cycle de Terreur et de honte. De ne plus prendre la justice en otage, de ne plus l’embarquer dans des querelles politiques mesquines qui ne la concernent pas, au risque de la discréditer aux yeux de l’opinion publique qui, à en croire un sondage récemment publié par le quotidien an-Nahar, ne lui accorde plus sa confiance... Nous avons encore, Dieu merci, d’excellents magistrats, des juges à la probité exemplaire, qui souffrent de voir la justice malmenée et accusée de la sorte. Pour eux, pour que le Liban devienne enfin un véritable État de droit, une seule exigence : libérer la justice ! * Avocat à la cour, écrivain.
Par Alexandre NAJJAR* Le spectacle auquel nous assistons aujourd’hui au Liban est affligeant : nos dirigeants semblent avoir oublié que la justice, quand elle est sélective, n’est plus la justice ; que la justice, quand elle devient instrument de vengeance, est la négation même de la justice. Alors, ils embastillent, ils musellent une chaîne de télévision qui employait des...