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Actualités - OPINION

Critique pointue, à l’Est, des projets politiques du pouvoir

Passant au crible les projets politiques du pouvoir, comme la sublimation nationale des législatives et la création d’un Sénat, une personnalité religieuse de l’Est mitraille les remarques suivantes : – Si les Syriens sont d’accord, la majorité parlementaire approuvera sans coup férir le projet de faire du pays tout entier une seule circonscription. Mais s’ils n’en veulent pas, l’idée restera évidemment lettre morte. – Le système convient aux chefs des grands blocs parlementaires, car il leur facilite le partage des sièges entre eux, tout en augmentant en principe la part de chacun d’eux, en vertu de l’effet bulldozer surmultiplié qu’aurait la fusion des régions. Cela au détriment des indépendants, mais aussi, dans une moindre mesure, des têtes de listes à spectre purement local ou régional. L’attelage d’un équipage officiel rendrait difficile la constitution d’une liste adverse. On voit mal en effet qui pourrait s’opposer avec succès à une éventuelle coalition entre Hariri, Berry, Joumblatt, le Hezbollah et Frangié. Il ne resterait aux autres qu’à solliciter une place individuelle à bord de ce superbus. – Dans le même esprit, le Liban circonscription unique favorise les éléments peu représentatifs en termes de proximité. Et qui n’ont de chance de se faire élire qu’en se noyant dans une grande masse. Autrement dit, c’est un cadeau de plus au parachutage. Les tickets, dont les tarifs seraient naturellement relevés en conséquence, l’échelle étant élargie, seraient délivrés comme toujours sinon à la demande, du moins avec l’aval des parties dites influentes. – Dont l’avantage serait d’évincer à coup sûr les opposants. Pour doter ce pays sinon d’un parti unique, du moins d’une pensée politique unique, absolument monochrome. Déjà, on le sait, trois grands alliés, Hariri, Berry et Joumblatt, contrôlent la majorité à la Chambre. La prochaine législature fera encore mieux, puisqu’elle ne comptera qu’un seul et même bloc, obéissant plus que jamais au doigt et à l’œil. – Le code électoral annoncé serait donc pire que les précédents, aussi mauvais qu’ils aient été. Les voix minoritaires, qui parviennent encore à se faire entendre un peu, seraient réduites à un silence total. Et les gens pourraient faire leur deuil d’une représentation effective, tant au niveau des convictions politiques qu’à celui de la défense de leurs intérêts courants. À l’exception, bien sûr, des happy few qui ont la bénédiction du pouvoir ou des démiurges. – Du même coup, on enterrerait pour de bon le pacte national dit de Taëf. Puisque ce document prévoit, comme un élément institutionnel tout à fait essentiel, que les circonscriptions seraient taillées dans les mohafazats, dont le nombre devrait passer à neuf aux termes d’une révision du découpage administratif. – On laisse entendre que le Sénat va être la moitié du Parlement. Non pas dans le sens conjugal, mais en termes de nombre de sièges. Il faut espérer dès lors qu’on compte réduire le paquet parlementaire. Parce que 128 députés et 64 sénateurs, cela fait beaucoup trop de frais pour un Trésor exsangue. Surtout si l’on décide, ce qui paraîtrait normal, que les anciens sénateurs toucheraient des indemnités à vie, comme les anciens députés. – Institutionnellement, quelles seraient les prérogatives respectives de la Chambre et du Sénat ? Quelle instance va être dominante ? De quel côté va se porter l’intérêt politique ou social des élections ? Quels moyens les sénateurs, qui seraient élus au niveau de la petite circonscription, auraient dans les textes pour assurer la représentation de proximité qui leur serait dévolue ? Dans l’esprit des lois, il y a d’ailleurs contradiction au sein du système prévu. Car le rôle du Sénat c’est de se pencher sur des questions cruciales ou essentielles, comme le budget ou la proclamation de l’état d’urgence, et non sur les problèmes de la vie quotidienne des électeurs. Or les responsables prévoient de ne pas mêler les sénateurs à des questions politiques, comme l’élaboration du code électoral, et de laisser à la seule Chambre des députés d’élire le président de la République ou de se prononcer sur la confiance à donner à un gouvernement. Une orientation prudente, puisque la majorité parlementaire serait absolument acquise au pouvoir. – En pratique, pourquoi se tracasser pour un faux problème. Chaque régime fabrique une loi électorale qui serve ses intérêts. Mais le régime suivant peut la changer. Or les prochaines législatives devraient intervenir après la présidentielle. Émile KHOURY
Passant au crible les projets politiques du pouvoir, comme la sublimation nationale des législatives et la création d’un Sénat, une personnalité religieuse de l’Est mitraille les remarques suivantes : – Si les Syriens sont d’accord, la majorité parlementaire approuvera sans coup férir le projet de faire du pays tout entier une seule circonscription. Mais s’ils n’en...