La défonce des libertés

Y a des États qui gouvernent et d’autres, plus généreux, qui te donnent la trique à l’ombre du bananier. Le nôtre, indiscutablement, fait partie de cette dernière engeance. Alors, au lieu de te répandre en jérémiades mouillées autour de la défense des libertés, profite de la chance inouïe qui t’est offerte pour apprendre la technique de la défonce des libertés. Règle numéro un : tu commences d’abord par jouer le bon cheval syrien. Puis tu en uses et en abuses comme d’un épouvantail pour effrayer la piétaille qui caquète en sens inverse. Règle numéro deux : la presse, les radios, les télés sont là seulement pour couvrir ton carnet mondain, dire que tu es beau, intelligent… Honnête surtout, parce que si théoriquement l’honnêteté est une qualité normale chez un individu, ici, elle reste un concept à moulinette puissamment vendable. En outre les médias de nos contrées n’étant pas trop branchées sexe, elles devront aussi vanter tes qualités de bon papa. En Orient, ça fait bien. Règle numéro trois : dès qu’une télé s’écarte du bon chemin, tu débranches son antenne et fais asseoir le patron dessus. Pour ça, pas besoin de connaître la loi. Suffit de connaître le bon fonctionnaire. Règle numéro quatre : à chaque fois que des naïfs expriment le souhait de manifester, balance-leur des niaiseux de la communauté d’en face pour leur cracher dessus. T’auras beau jeu ensuite d’interdire les manifs et d’envoyer tous ces gueux brouter ailleurs. Voilà, t’as plus qu’à copier/coller ces règles et ton autorité sera bien assise. Et si par malheur tes détracteurs se rassemblent en congrès, suffira d’envoyer cette lanterne de Kandil leur japper aux chevilles. Pour briller en société, il mangerait du cirage et, de toute façon, il n’est pas plus crétin qu’un autre. Le hic, c’est qu’on ne connaît pas encore l’identité de l’autre… Gaby NASR