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Actualités - OPINION

Spéculations sur les raisons du rabibochage interprésidentiel

Les présidents Lahoud et Hariri ont, enfin, épanché les ressentiments de leur cœur réciproque. La semaine précédente s’est donc clôturée sur une note de lyrisme, pour ne pas dire de sentimentalisme. En effet, les loyaux loyalistes des deux bannières rivalisent maintenant entre eux de bonnes manières. Avec presque des larmes d’attendrissement dans les yeux, et des trémolos dans la glotte. Tout le monde s’en réjouit pour eux. Et pour ce pauvre pays que les déchirements des chefs déchiquettent. Mais, insidieux par fonction d’état, des opposants relèvent que si l’on sait parfaitement pourquoi les deux hommes se supportent mal, on ne distingue pas les motifs précis qui les amènent à apurer leurs comptes plutôt qu’à les régler. Quel serait le détergent employé pour cette lessive de famille, et peut-on être sûr qu’il va effacer toutes les taches ? À ces interrogations, il n’y a pas (encore) de réponses précises. Mais le recoupement des analyses, les indications fragmentaires distillées d’ici ou de là, permettent un début d’éclairage. Par les raisons plausibles ci-après : – L’afflux de conseils pressants, régionaux mais aussi internationaux, d’unifier les rangs libanais, dirigeants en tête, pour parer à toute périlleuse éventualité. Surtout quand cela va si mal dans les Territoires autonomes palestiniens. Et qu’il est de plus en plus question d’une lourde frappe américaine contre l’Irak, au risque d’un séisme de dislocation régionale sans précédent. – La nécessité de faire bonne figure lors du prochain sommet de la francophonie. Et de ne pas répéter, devant des étrangers, les déplorables couacs protocolaires ou autres qui avaient marqué le sommet arabe. D’autant que les querelles intestines commençaient à se répercuter négativement sur les relations avec la France, importantes pour ce pays. – La crainte que les tiraillements ne finissent par torpiller Paris II, cette planche de salut, cette bouffée d’oxygène quasi indispensable pour éviter l’effondrement économique et financier à moyen terme. On sait que la Banque mondiale et le FMI posent des conditions préalables déterminées. Dont le démarrage d’un programme cohérent de privatisations, que les démêlés du cellulaire semblaient compromettre. – Dans le même esprit, un sursaut de lucidité élémentaire : l’échec du plan de redressement gouvernemental entraînerait l’écroulement du temple sur la tête de tous, sans exception. Il serait donc suicidaire, pour tous répétons-le, de pousser à la roue de la récession à seule fin de provoquer le départ des Trente. Ou, plus exactement, d’écarter du pouvoir M. Rafic Hariri. Pour le moment, le contentieux est refroidi, sinon gelé. Les observateurs s’accordent à souligner qu’il faut profiter de cette trêve vite et bien car elle pourrait ne pas durer. À leur avis, le pouvoir devrait s’atteler sans tarder aux dossiers suivants : – Une solution de fond pour le cellulaire, après les éventuels arrangements transitoires, à travers une opération d’adjudication en règle. – La mise en chantier des études en vue de la privatisation du secteur de l’énergie électrique, éventuellement fractionné, tout comme de la Régie et des offices d’eau. – La finition du projet de budget général, qui devrait être marqué par une compression des dépenses d’au moins 10 %. Le ministère des Finances a déjà élaboré les grandes lignes de la loi de finances de l’an prochain. Et le grand argentier, M. Fouad Siniora, en a informé le chef de l’État. Une démarche prioritaire car, en pratique, l’état de santé des finances publiques ne peut s’améliorer que s’il y a bonne coordination entre les pouvoirs. Surtout que l’assainissement passe par le dégraissage du mammouth. Il faudra donc larguer les fonctionnaires excédentaires ou parasites qui se comptent par milliers. Et qui sont, comme on dit, protégés par tel ou par tel. Les pôles d’influence devront donc consentir des sacrifices sans rechigner. S’y résoudront-ils ? En tout cas, du côté des haririens on indique que M. Siniora a l’intention de tenir régulièrement au courant le président Lahoud des projets ou des initiatives gouvernementales en matière financière et économique. Notamment pour que Baabda cesse de se plaindre d’un manque de transparence et de réclamer un plan quinquennal ou assimilé. Dans le même ordre d’idées, le chef du gouvernement lui-même se promet de réunir fréquemment divers ministres concernés autour du président de la République. Pour un travail commun sur divers dossiers sensibles ou d’intérêt public. Comme on voit, on est en pleine lune de miel. Pourvu que cela dure, comme le soupirait il y a deux siècles Letizia Bonaparte. E.K.
Les présidents Lahoud et Hariri ont, enfin, épanché les ressentiments de leur cœur réciproque. La semaine précédente s’est donc clôturée sur une note de lyrisme, pour ne pas dire de sentimentalisme. En effet, les loyaux loyalistes des deux bannières rivalisent maintenant entre eux de bonnes manières. Avec presque des larmes d’attendrissement dans les yeux, et des...