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Actualités - OPINION

Damas se trompe d’interlocuteurs, affirment des opposants de l’Est

«Ainsi de miroir en miroir, Andromaque traque Andromaque », écrivait jadis le critique littéraire Marcabru. Une image de serpent qui se mord la queue, de spirale qui tourne en rond sur elle-même qu’évoquent des opposants de l’Est. Au sujet du cycle de concertations initié dernièrement par Damas. Et plus précisément par le président Bachar el-Assad. Un dignitaire religieux local relève en effet, et en substance, que le chef de l’État syrien a limité ses audiences à des formations ou à des personnalités issues d’un même courant global. Taëfiste et prosyrien, bien entendu. Ce qui fait, ajoute ce prélat, qu’on doit parler en l’occurrence de monologue plutôt que de dialogue. À son avis, il serait bien plus profitable pour l’autorité syrienne de prêter l’oreille à l’opinion d’en face qu’aux vues de son propre camp. C’est-à-dire qu’il lui serait utile de procéder à des échanges en profondeur avec l’Est opposant. Pour en comprendre les motivations, les accepter ou les rejeter à bon escient, persuader ou se laisser convaincre. Bref, dialoguer vraiment pour arriver à un résultat positif. En mettant fin de la sorte à la pratique courante qui veut qu’une ligne se trouve imposée par la contrainte à une partie des Libanais. Cette fraction, poursuit la personnalité religieuse, sait qu’elle ne peut pas toute seule corriger les aberrations dont le pays pâtit. Mais elle ne compte pas pour autant baisser les bras. Ni renoncer aux constantes nationales, à la souveraineté, à l’indépendance, à la démocratie, aux libertés, à l’égalité de tous face à la loi, etc. Ces principes premiers ne souffrent aucune variation, aucune interprétation. Il est même absurde qu’ils puissent donner lieu à des litiges entre Libanais, du fait que certains leur attribuent un sens qu’ils ne sauraient avoir. Parce qu’ils les considèrent sous l’angle d’intérêts ponctuels déterminés et non dans une perspective nationale. L’on voit ainsi des dirigeants, poursuit cette source, fermer les yeux sur d’innombrables abus, par complaisance ou pour garder les rênes en main. Quitte à dénoncer ces scandales ou ces dérives une fois qu’ils ne sont plus au pouvoir. Quand ils sont en charge, ils soutiennent toujours que le pays jouit de sa pleine souveraineté ; et quand ils se retrouvent hors circuit, ils clament qu’il est dépendant. Faisant ensuite écho au patriarche Sfeir, le prélat reconnaît volontiers que Kornet Chehwane ne représente pas l’ensemble des maronites. Mais, ajoute-t-il, la Rencontre, qui n’est pas un parti, cristallise une thèse déterminée, exposée dans le manifeste des évêques maronites publié en septembre de l’an 2000. C’est un même but qui unit les membres de la Rencontre que peuvent rallier ceux qui ont les mêmes vues. Si d’autres, en quête d’objectifs différents, le veulent, il n’y a évidemment aucune objection à ce qu’ils forment un deuxième rassemblement. Au Liban, il y a toujours eu beaucoup de partis. Et l’essentiel c’est que chacun tente d’œuvrer dans l’intérêt national bien compris. Dans cet esprit, ajoute le prélat, il n’y a aucune raison à ce qu’il y ait de l’animosité quand il y a diversité d’opinions. Les divisions accentuées et les querelles nuisent au pays. Dont l’une des richesses reste la liberté, ainsi que l’esprit démocratique, même si les pratiques sont souvent tronquées. Grâce à son attachement aux libertés, et malgré ses difficultés, la situation du Liban apparaît comparativement meilleure que celle de nombre de pays arabes, même sur le plan économique. Revenant à l’actualité politique, le dignitaire religieux souhaite que les Libanais, ou à tout le moins les chrétiens, unifient leurs positions. Pour cesser de s’entendre répéter, chaque fois qu’ils veulent traiter avec autrui, qu’il leur faut d’abord s’entendre entre eux. Après cette allusion aux conseils récemment prodigués par Damas, la personnalité citée proclame sa pleine approbation de la position adoptée par le cardinal Sfeir au sujet d’une éventuelle visite en Syrie. On sait en effet que le patriarche, interrogé à ce propos, a répondu que la déception serait trop forte si le dialogue envisagé ne devait produire aucun résultat en termes d’amélioration des relations entre les deux pays. Il a répété que les impératifs de la géographie comme de l’histoire imposent certes au Liban d’entretenir avec la Syrie des rapports de bonne harmonie et non de mésentente. Mais qu’en même temps chaque partenaire doit se sentir et se savoir indépendant de l’autre. Au sujet des États-Unis, le patriarche, rappelons-le, souligne qu’il ne faut pas miser sur le rôle de cette puissance. Car elle suit une politique dictée par ses intérêts propres. Et les Libanais, échaudés par nombre d’expériences précédentes, doivent savoir éviter d’en être victimes. De leur côté, des professionnels de la politique affirment que la Syrie, focalisée sur la dangereuse situation régionale, ne veut pas avoir à se soucier des problèmes libanais. Elle préconise donc la stabilité, le calme sur la scène locale. À leur avis, cet élément a pu être déterminant dans le règlement du conflit sur le cellulaire. Tout comme il a pu infléchir les appels à la formation d’un groupe à l’Est, en mettant l’accent sur les appels au dialogue plutôt que sur l’opposition frontale à la Rencontre de Kornet Chehwane. Émile KHOURY
«Ainsi de miroir en miroir, Andromaque traque Andromaque », écrivait jadis le critique littéraire Marcabru. Une image de serpent qui se mord la queue, de spirale qui tourne en rond sur elle-même qu’évoquent des opposants de l’Est. Au sujet du cycle de concertations initié dernièrement par Damas. Et plus précisément par le président Bachar el-Assad. Un dignitaire...