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Actualités - REPORTAGE

ARCHÉOLOGIE - L’équipe de l’USJ poursuit les fouilles et les prospections à Yanouh Temples et tombes révèlent leurs secrets (photos)

Les fouilles de l’équipe de l’USJ travaillant sur le site de Mar Girgios al-Azraq à Yanouh, dans la vallée de Nahr Ibrahim (caza de Jbeil), ont dévoilé l’existence de tombes médiévales inconnues jusqu’alors et ont éclairci bien des mystères sur l’architecture du temple romain. En fait, le travail multidisciplinaire des membres de l’équipe (archéologues, architectes, céramologues, géographes, préhistoriens et dédologues) a permis d’établir la chronologie du site et d’expliquer son extension. Ce site, l’un des plus importants de la vallée de Nahr Ibrahim, est l’exemple type d’un lieu de culte romain christianisé à l’époque byzantine. Son histoire s’est toutefois étendue au Moyen Âge, époque à laquelle Yanouh a servi de résidence patriarcale maronite. Depuis 1999, le département d’archéologie de l’Université Saint-Joseph mène une campagne d’études et de fouilles de ce site. « Les objectifs fixés pour notre deuxième saison de fouilles, qui a eu lieu en juin, consistent, d’une part, à effectuer une étude architecturale complète du site et, d’autre part, à définir les périodes d’occupation et à comprendre les transformations du lieu », explique Pierre-Louis Gatier, directeur de la mission de Yanouh et chercheur à l’Institut Fernand Courby. Les blocs de pierre qui étaient éparpillés aux quatre coins du site ont été rassemblés, numérotés et dessinés par les architectes. Ces derniers ont effectué aussi des relevés de toutes les façades, murs des chapelles et péribole (mur d’enceinte) par photogrammétrie. Les résultats de ce travail permettent à l’équipe de réaliser la restitution graphique du temple. Cette étude architecturale du temple a été complétée par une autre de type archéologique définissant les différentes phases de construction de cet édifice datant de la deuxième moitié du IIe siècle ap. J-C. Un sondage a d’ailleurs été effectué à l’intérieur du temple mettant au jour les fondations de l’escalier de l’adyton, ainsi qu’une tombe médiévale, creusée lors de la réutilisation du temple comme église. « Si ce temple est considéré d’architecture romaine classique en raison de la symétrie qui le carctérise, il conserve toutefois des éléments d’architecture purement sémitique, tels que l’adyton (chambre réservée aux prêtres) et d’autres plus rares tels que les portes-fenêtres latérales », affirme M. Gatier. « La fonction exacte de ces portes-fenêtres n’est pas définie, mais elles devaient permettre aux fidèles de suivre la procession tout en étant à l’extérieur », poursuit-il. Les études architecturales effectuées cette année ont permis à l’équipe de faire une grande découverte : il s’agit d’un deuxième temple romain, situé en dehors du péribole du grand temple. Ce second lieu de culte diffère du premier par son orientation vers le sud alors que le grand temple est orienté à l’ouest. Si ce temple n’avait pas été repéré auparavant, c’est parce qu’il ne conserve plus qu’un pilastre in situ, deux assises en calcaire bleu et les murs de fondation. Le site de Yanouh aux périodes byzantine et médiévale À l’ère chrétienne, le temple de Yanouh a été converti en église dédiée à saint Georges. « Les quatre colonnes et escaliers monumentaux de la façade du temple ont été démontés pour être remplacés par l’abside », explique M. Gatier. « Le pourtour du temple a été remblayé et les portes-fenêtres sont devenues des portes d’entrée. Les éléments de décoration du temple ont été réutilisés dans les différentes constructions chrétiennes », poursuit le directeur de la mission. En plus de l’église Saint-Georges, d’autres chapelles ont été construites dans les environs immédiats du temple. En fait, les résultats des fouilles ont permis aux archéologues de s’assurer qu’à l’époque byzantine, Yanouh était devenu un complexe cultuel, à proximité des installations agricoles et domestiques. « À l’intérieur des périboles, nous avons déterré cette année une série de petites chambres dont l’une contenait encore un pressoir à olive et une autre un four », indique M. Gatier. S’agit-il alors d’un monastère ? Yanouh était-il un vrai centre religieux habité par des moines ? « Aucune preuve tangible ne peut garantir ces hypothèses, qui demeurent cependant une probabilité », affirme-t-il. Ce centre religieux chrétien s’est développé au Moyen Âge. La basilique byzantine construite au nord du temple romain a été modifiée : de gros piliers ont remplacé les colonnes, un mur de fond a été construit et des tombes y ont été creusées. « Nous avons découvert cette année trois tombes médiévales à l’intérieur de la basilique. L’une d’entre elles était même creusée sous l’autel et les deux autres dans les nefs. Malheureusement, ces tombes ne conservaient que quelques fragments d’os sans mobilier funéraire ou inscription pouvant nous révéler l’identité des personnes enterrées », note M. Gatier. Selon les rares références historiques mentionnant Yanouh en tant que patriarcat maronite, deux églises y étaient édifiées. L’une d’entre elles est celle de saint Georges le Bleu (le temple romain) et la seconde est dédiée à la Sainte Vierge. Selon les archéologues, cette seconde église n’est autre que la basilique médiévale fouillée par l’équipe. En plus des fouilles archéologiques et des études architecturales, l’équipe de l’USJ mène une campagne de sensibilisation au patrimoine à partir de ce site. Des groupes d’élèves y ont été reçus pour une visite guidée, des étudiants universitaires y ont effectué un stage de formation à la photogrammétrie et le projet envisagé à la fin des fouilles, prévue en 2004, consiste à réhabiliter le site pour accueillir les touristes. Des panneaux explicatifs seront alors placés sur les lieux et des circuits seront aménagés. Enfin, ces campagnes de fouilles ont réussi à joindre l’aspect scientifique au volet économique. Car, d’une part, elles ont défini l’historique de ce site et, d’autre part, elles permettront à la vallée de Nahr Ibrahim de bénéficier de l’existence de ce site archéologique en lui assurant un développement économique. Deux nouveaux volumes de Baal bientôt sur le marché Après cinq ans d’arrêt, la revue scientifique annuelle de la Direction générale des antiquités, Baal, vient de publier deux nouveaux volumes. Ces deux numéros du Bulletin d’archéologie et d’architecture libanaise (Baal) ont été consacrés aux travaux archéologiques réalisés entre 1998 et 1999 et aux fouilles et prospections effectuées en 2000. En publiant ces deux volumes, Baal rattrape un peu le temps perdu, étant donné que le dernier numéro date de 1997. En fait, l’effort ne se limite pas à la publication de ces deux numéros mais se poursuit « pour sortir un troisième avant la fin de 2002 », comme l’assure Anne-Marie Affeiche, rédactrice en chef de la revue. Les articles sont publiés en anglais, français ou arabe, selon le choix de l’auteur, mais un résumé en langue arabe est réalisé par le comité de rédaction. C’est à partir de 1996 que Baal a remplacé le Bulletin du Musée de Beyrouth (BMB) dont le premier volume remontait à 1937. Baal vise à informer les chercheurs et lecteurs des activités scientifiques de la Direction générale des antiquités et à diffuser l’information archéologique en la mettant à la portée des chercheurs locaux et internationaux. Dans le but de mettre la culture à la portée du plus grand nombre, la Direction générale des antiquités offre le volume de Baal à 30 000 LL, prix très raisonnable pour une publication scientifique d’un tel niveau. « Notre objectif est de diffuser l’information sur l’archéologie et l’architecture libanaises et de permettre aux étudiants de se procurer ces revues », affirme M. Frédéric Husseini, directeur général des antiquités. D’ailleurs, toujours dans l’objectif de faciliter la diffusion de cette revue, la DGA a décidé de fixer à ce même prix les deux premiers volumes de Baal. Toutefois, la grande contradiction réside dans le fait que le prix du volume a obtenu l’aval du ministère des Finances, mais les volumes ne sont pas encore mis en vente. Le retard vient des Finances qui n’ont pas encore fixé les modalités de perception des prix, bien que la vente se fasse uniquement, et malheureusement, à la DGA. En attendant, les deux volumes sont consultables dans les bibliothèques spécialisées. Les sommaires des deux volumes Le volume trois de Baal a été consacré en grande partie aux rapports des fouilles du centre-ville de Beyrouth, complétant ainsi les numéros un et deux. Les archéologues Mountaha Saghieh, Helga Seeden, Reuben Thrope et Hans Curvers ont publié les résultats des campagnes des fouilles des sites de la région dite des souks et du parc archéologique, données tant attendues dans les milieux scientifiques, car la plupart de ces sites ont disparu. Outre les fouilles de Beyrouth, ce volume résume les prospections et fouilles qui se sont produites en 1997 et 1998. Ainsi, retrouve-t-on les rapports des prospections de l’équipe de l’Université de Berlin (Karen Brad) au Akkar ; les résultas des fouilles archéologiques de Saïda menées par le British Museum (sous la direction de Claude Doumet Serhal), celles de Tyr menées par l’Université de Barcelone (sous la direction de Maria Eugenia Aubet). La prospection maritime entreprise par Honor Frost à Byblos et les études géomorphologiques et paléoenvironnementales dans les ports de Saïda et de Byblos (sous la direction de Christophe Morhange) ont aussi trouvé leur place dans ce numéro qui comprend aussi l’étude d’un poisson fossile unique exposé au musée des Fossiles à Byblos (Raymond Gèze et Souad Hraoui Bloquet). Quant au volume quatre de Baal, il réserve une grande part aux résultats des fouilles de Arqa menées entre 1992 et 1998 (sous la direction de Jean-Paul Thalman). Les résultats des fouilles de Saïda menées par l’équipe du British Museum sont au menu de ce volume aussi. Les autres articles sont des études de sites ou d’objets archéologiques, tels que le château médiéval de Akkar el-Aatiqa (Jean-Claude Voisin et Thibault Fournet), le temple d’Eschmoun à Saïda (Rolph Stucky), la « mosaïque du Nil » et une tablette cunéiforme de Kharayeb (Renata Tarazi et Thomas Waliszewski) et les sculptures romaines trouvées au centre-ville de Beyrouth (Hans Curvers et Ans Braakenburg). Découverte de sites archéologiques dans la vallée de Nahr Ibrahim La mission archéologique de Yanouh de l’Université Saint-Joseph ne se limite pas à l’étude du site de Mar Girgios al-Azrak, mais englobe la prospection de la vallée de Nahr Ibrahim. Appelée autrefois la vallée d’Adonis, cette région regorge de sites archéologiques. « La mission a d’ailleurs repéré deux villages médiévaux, de nombreuses installations agricoles et un type de tombeau bien particulier qui n’existe nulle part ailleurs au Liban et que nous avons baptisé : « Tombeau de Yanouh », souligne M. Gatier, directeur de la mission archéologique à Yanouh. La prospection a permis aux archéologues d’affirmer que la région de Nahr Ibrahim a connu un important habitat, dès l’époque romaine, qui a été accompagné d’une mise en valeur agricole de la montagne caractérisée par le défrichement et le développement des terrasses. Les vestiges archéologiques repérés lors de ces prospections ont été inventoriés, relevés et décrits. Les résultats seront publiés dans les rapports de la mission. Quant à la fouille de ces vestiges, elle nécessite l’organisation d’un autre programme scientifique. Joanne FARCHAKH
Les fouilles de l’équipe de l’USJ travaillant sur le site de Mar Girgios al-Azraq à Yanouh, dans la vallée de Nahr Ibrahim (caza de Jbeil), ont dévoilé l’existence de tombes médiévales inconnues jusqu’alors et ont éclairci bien des mystères sur l’architecture du temple romain. En fait, le travail multidisciplinaire des membres de l’équipe (archéologues,...