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ARTS DE LA RUE - Inauguration du « Beirut Street Festival » avec la Brigade d’harmonisation de ville Des spectacles vivants où le public a droit de parole(photos)

19h30, en haut de la rue Maarad. Un attroupement se forme autour d’une BMW 2002 rouge. Au centre de ce cercle de spectateurs qui passe très vite de l’incrédulité à la gaieté, une troupe de balayeurs, de batteurs de casseroles, de poubelles, de musiciens est menée par un homme débordant d’énergie, revêtu d’un gilet de chantier, orange à bande phosphorescente. C’est la première intervention de la Brigade d’harmonisation de ville, qui a inauguré ce soir-là l’«édition 0» du «Beirut Street Festival». Grâce à cette manifestation qui se prolongera jusqu’à septembre prochain, les Beyrouthins pourront se familiariser avec les arts de la rue. L’art de la rue : une facette encore très méconnue dans notre pays qui fait en revanche partie intégrante du paysage culturel français. C’est Pierre Sauvageot, directeur du Centre national de Création des arts de la rue — dont dépend l’association marseillaise Lieux publics — et fondateur de la compagnie Allegro Barbaro, qui a été invité par les organisateurs du festival pour brosser un panorama de cet univers artistique en expansion. « Les arts de la rue ne sont absolument pas la présence réductrice d’œuvres en plein air, rectifie-t-il dès le début de sa conférence, mais bien un rassemblement d’œuvres pensées pour leur lieu de représentation. C’est un spectacle vivant qui se destine à la ville et qui manifeste d’un authentique plaisir à utiliser l’espace. » Et de préciser, d’un point de vue historique, que « cet art pluridisciplinaire a rencontré, après Mai 68, les fêtes populaires qui étaient alors sur le déclin en France. Il a été une des expressions de révolte de la jeunesse, qui vivait dans un cadre trop fermé. » Les arts de la rue sont, selon le conférencier, « politiques, dans le sens étymologique du terme, c’est-à-dire propres à la cité. Les œuvres sont des actes militants, tiers-mondistes et d’extrême gauche, qui veulent reconstituer le tissu social et remettent constamment le système en cause. » La rue au public Le terme de « spectacles vivants » semble de plus en plus adapté à ces formes artistiques essentiellement fondées sur le plaisir immédiat, la part d’éphémère et l’échange avec le public qui, une fois n’est pas coutume, ne sont pas des mots creux, comme les piétons de la rue Maarad ont pu le constater et le vivre samedi dernier. Le plaisir et l’échange étaient la cheville ouvrière de cette Brigade d’harmonisation de ville qui, comme une traînée de poudre, a réveillé la rue. Le rythme est passé et les passants l’ont suivi en tapant des mains, en poussant les tables et les chaises des cafés pour mieux profiter du spectacle. Et une phrase est tombée, révélatrice du succès de cette première expérience, alors qu’un serveur cherchait à empêcher une spectatrice de déplacer un siège : « La rue est à nous », lui a-t-elle rétorqué. La France, atteinte de « festivalite » selon l’expression de Pierre Sauvageot, a décidé de retrouver la fonction première des arts de la rue : le contact avec le public. « Un festival fructueux fidélise quelques milliers de spectateurs mais néglige totalement le reste d’une ville ou d’une région en ne prenant plus la peine d’aller vers elle, explique l’intervenant. C’est pour cette raison que l’idée de “saison” est née, pendant laquelle les compagnies effectuent des tournées à travers les régions de France. » Projets de création et langage gestuel De tous les pays du monde, c’est la France qui offre le plus de subventions aux arts de la rue et à ses compagnies, au nombre de 1 300 environ : « Mais il faut savoir qu’un cracheur de feu peut créer sa propre compagnie, précise Pierre Sauvageot. En réalité, il y a une petite centaine d’artistes professionnels qui sont à même de proposer un vrai projet de création et, parmi eux, 20 bénéficient de subventions d’État pendant trois ans. » Quant à Lieux publics, son directeur la présente comme un espace de résidences qui reçoit près de 10 compagnies par an, mais aussi comme un espace sonore et un atelier de production : « Le quatrième aspect de Lieux publics concerne la coproduction, ajoute-t-il. Elle a déjà commencé en Europe et pourrait bientôt concerner le “Beirut Street Festival” . » Quant à la Brigade d’harmonisation de ville, elle fait partie d’un des projets de la compagnie Allegro Barbaro (nom emprunté à une composition de Béla Bartok), fondée par Pierre Sauvageot. C’est Denis Cabacho, artiste percussionniste, qui a pris en charge pendant trois jours la formation des 30 musiciens de la Brigade beyrouthine : «Quand je les ai rencontrés, je leur ai distribué des sacs en plastique et j’ai commencé une battue à quatre temps, raconte-t-il. J’ai été impressionné par leur capacité à apprendre le langage gestuel nécessaire à la création en temps réel, dont la difficulté consiste à comprendre le mouvement que j’effectue et à enchaîner aussitôt.» L’expérience a été pour le moins concluante pour les organisateurs, gratifiante pour les apprentis-artistes de rue et enthousiasmante pour le public. La réaction de celui-ci était capitale dans la réussite de cet ambitieux projet de Festival des arts de rue, édition 0. Prochain rendez-vous dans Beyrouth samedi 20 juillet avec Nadine Touma, qui présentera son spectacle Sandouk el-Fergeh. *Renseignements au : 03/614355. E-mail: zico_house@hotmail.com Diala GEMAYEL
19h30, en haut de la rue Maarad. Un attroupement se forme autour d’une BMW 2002 rouge. Au centre de ce cercle de spectateurs qui passe très vite de l’incrédulité à la gaieté, une troupe de balayeurs, de batteurs de casseroles, de poubelles, de musiciens est menée par un homme débordant d’énergie, revêtu d’un gilet de chantier, orange à bande phosphorescente. C’est...