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Actualités - CHRONOLOGIE

Les chauffeurs de taxis à mazout s’insurgent contre l’État

À la réunion qui a regroupé les différentes formations syndicales des chauffeurs de taxi hier, à 10h, au siège de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL), c’est une atmosphère d’attente qui a prévalu, à deux jours de l’application de la loi n° 341, sur l’arrêt des voitures touristiques roulant au mazout. Bassam Tleiss, vice-président de la CGTL, et Abdel Amir Najdé, les présidents des deux unions de syndicats des chauffeurs, se sont accordés à affirmer que « notre principale revendication porte sur la vente de l’essence à un prix préférentiel aux chauffeurs de taxi ». Selon M. Tleiss, les contacts avec les responsables auraient été fructueux, « les bienfaiteurs sont nombreux dans ce pays ». Mais les décisions du Conseil des ministres en soirée n’ont pas répondu à l’attente des syndicats, notamment du point de vue du prix préférentiel de l’essence. Réagissant aux résultats du Conseil des ministres, M. Najdé a affirmé à L’Orient-Le Jour que « les décisions ministérielles n’ont rien apporté de nouveau, et les chauffeurs ne peuvent toujours pas survivre dans ces conditions », l’essence étant trois fois plus chère que le mazout. Selon lui, une assemblée générale devra se tenir aujourd’hui à 11h au siège de l’union, suivie, à 17h, d’une nouvelle réunion au siège de la CGTL. C’est durant ces rassemblements qu’une grève générale et des manifestations pourraient être décidées. M. Tleiss, pour sa part, s’est réuni avec le président de la Chambre, Nabih Berry, en soirée. De toute façon, les appels au calme du matin n’avaient pas rencontré d’échos dans la rue, vu que la manifestation prévue près du siège du Conseil des ministres a eu lieu. Quelque deux mille chauffeurs de taxi en colère ont traversé à pied ou dans leurs voitures, objets du litige, la distance qui sépare le rond-point Cola du Musée, en passant par la corniche Mazraa, bloquant la circulation dans ces artères principales. Très vite, le mouvement s’est transformé en l’expression d’une colère envers le gouvernement et les autorités en général. La première cible était le président du Conseil, Rafic Hariri, qui a écopé de toutes les insultes imaginables dans les slogans scandés par les manifestants, ainsi que son ministre des Finances, Fouad Siniora, et les membres de son bloc parlementaire. « Que le gouvernement Hariri tombe ! », ont crié les manifestants à plusieurs reprises, dénonçant la « mafia qui nous gouverne » et qualifiant l’ensemble de la classe politique de « requins suceurs de sang des pauvres ». Le chef du Parlement, Nabih Berry, n’a pas non plus été épargné. « Il nous a trahis », lancent des chauffeurs. Même le président de la République a reçu quelques pointes. « Pourquoi n’a-t-il pas tenu les promesses qu’il avait faites dans son discours d’investiture d’arrêter tous les voleurs ? », font remarquer quelques-uns. En fait, l’État dans son ensemble était visé hier dans ce qui semblait être une réelle crise de confiance. « Même durant les événements, nous n’avons jamais pensé changer de moteurs et utiliser le mazout », dit l’un des manifestants. « Ce sont “eux” qui nous y ont poussés. Pourquoi ne demande-t-on pas de comptes aux vrais responsables de l’introduction des moteurs à mazout au pays ? » Une interrogation semblait hanter les protestataires : va-t-on obliger les minibus, avec la même fermeté, à renoncer au mazout le 15 juillet ? Ou vont-ils être les seuls visés ? Les différents accès du rond-point Cola ont été bloqués par les taxis dès 16h. Les Forces de sécurité intérieure (FSI) étaient présentes en grand nombre. Dès 16h30, quand la foule a décidé de se diriger vers le lieu de rassemblement, les FSI l’ont devancée, pour éviter les débordements. La foule était surexcitée, de plus en plus agitée à mesure que le temps passait. Elle a défilé sous l’œil quelque peu désapprobateur des automobilistes immobilisés et des commerçants qui sont sortis de leurs boutiques pour s’informer. L’un d’eux, Moustapha Moustapha, nous a confié, en passant sa main sur son front pour essuyer la couche noire qui recouvrait son visage : « Nous n’en pouvons plus du mazout et il faut que la loi soit appliquée. Mais d’un autre côté, nous espérons que l’État aidera les chauffeurs à s’en sortir. » Quand les manifestants sont arrivés dans le secteur du Musée, un nombre encore plus impressionnant de FSI, ainsi que des brigades antiémeutes et même des unités de l’armée les attendaient pour les empêcher d’aller plus loin, vers le bâtiment où le Conseil des ministres était réuni. M. Najdé s’est adressé aux manifestants en ces termes : « Si le gouvernement ne répond pas à nos demandes, nous poursuivrons notre mouvement protestataire dans tout le pays, à partir de samedi matin. » Il a nié toute différence de vue avec l’autre union syndicale, faisant remarquer qu’il n’était pas prévu, au départ, qu’elle participe à cette manifestation. « Pour avoir le million, il faut en débourser autant » Auparavant le matin, les deux unions syndicales avaient présenté à la presse un communiqué commun comportant leurs revendications. Bien que les deux chefs de file aient tenu à répercuter l’image d’un front uni, la préparation du document ne semble pas avoir été de tout repos, comme l’atteste le retard enregistré dans la publication du communiqué. Selon certaines sources, il y aurait eu une distribution des rôles : Tleiss serait chargé des négociations et Najdé de l’escalade et de la revendication, le cas échéant. En tête des revendications évoquées dans ce document, le prix préférentiel du bidon d’essence aux chauffeurs de taxi « sans se suffire du million de livres libanaises d’indemnité, prévu pour chacun ». Les syndicats demandent également au gouvernement de modifier le décret d’application sur l’ancienneté des voitures importées et de la fixer à huit ans, et non trois comme il est précisé dans le texte. Le Conseil des ministres n’a satisfait cette demande qu’à moitié, en adoptant une moyenne de cinq ans. Les syndicats demandent aussi une réorganisation du secteur et une limitation du nombre de travailleurs dans le transport public. Enfin, les présidents des deux unions ont été chargés de suivre cette affaire et de prendre, à la lueur des déclarations du Conseil des ministres, les décisions qui s’imposaient. Une seconde réunion au siège de la CGTL devra se tenir aujourd’hui à 17h. Par ailleurs, sur une décision de son vice-président, le bureau exécutif de la CGTL devra se réunir lundi prochain pour débattre de cette même affaire. La position affichée mercredi en faveur de l’application de la loi par le chef du Parlement, Nabih Berry, est-elle pour quelque chose dans la modération soudaine des syndicats ? « Il est normal que le président de la Chambre milite en faveur de l’application d’une loi adoptée au Parlement, mais il faut également rappeler que, pour M. Berry, les indemnités aux chauffeurs sont sacro-saintes », a répondu M. Tleiss. L’indemnité d’un million pour tout chauffeur désirant vendre son moteur à mazout ne suffit-elle pas ? « Nous ne sommes pas d’accord sur la procédure d’exécution de cette décision », a-t-il précisé. « Cette procédure est non seulement très longue, mais elle requiert des documents et des démarches dont le coût est équivalent, dans le meilleur des cas, à la somme promise. » Il a cependant catégoriquement nié une éventuelle ingérence des services de sécurité dans le mouvement des syndicats, comme l’ont dénoncé ces derniers jours plusieurs députés du bloc parlementaire du président du Conseil. « Je peux affirmer qu’aucun service de sécurité ne peut approcher les deux présidents syndicaux ici présents », a-t-il ajouté. Nouvelles combines pour les moteurs à essence ? Dans quelles conditions les chauffeurs de taxi qui roulent aujourd’hui au mazout vont-ils changer de moteurs après l’interdiction du gazole ? Une chose est sûre : les moteurs à essence sont disponibles sur le marché, comme nous l’a assuré depuis quelques jours Bassam Tleiss, vice-président de la CGTL. Interrogé sur le prix de tels moteurs, Khaled Hazzouri, un chauffeur syndicaliste, nous a confié flairer de nouvelles combines. « Ces engins devraient coûter entre 300 et 400 dollars, a-t-il précisé. Mais j’ai bien peur que l’épisode de l’écoulement sur le marché des moteurs à mazout depuis quelques années ne recommence. Certains importateurs flairent la bonne affaire et le prix des moteurs à essence peut doubler ou tripler, jusqu’à dépasser les mille dollars ! » Go Green pour une meilleure qualité de vie La réduction des émissions de gaz et autres polluants de l’atmosphère, du fait des activités humaines, ne pourra être obtenue sans un engagement solidaire de toute la population. On est tous concernés puisqu’il y va de notre santé et de notre qualité de vie. Il y va aussi de l’avenir des générations futures. La mise en place d’actions coordonnées prend un caractère d’urgence. À titre d’exemples, la production d’électricité à partir du solaire, de l’éolien, de l’hydraulique contribuera positivement à l’assainissement de l’atmosphère puisque ces énergies n’émettent pas du CO2. À l’initiative de Go Green, des spécialistes MM. Ziad Abi Chaker (Cedar Environmental), Fadi Daou (président de Biocop), Naji Chamieh (Envirotech), Serge Soueid (Éco-Tourisme) et Walid Sakr proposent quatre projets à réaliser dans les plus brefs délais. En souhaitant, toutefois, obtenir un soutien financier. – Tout d’abord, pour éviter les embouteillages et par conséquent l’excès d’émanations toxiques, il est impératif d’« organiser la circulation ». Le projet est tout simple : entreprendre le traçage des lignes jaunes sur toutes les voies de communication. L’opération sera suivie d’une campagne publicitaire intitulée « Khallik ala al-khatt », qui sera lancée sur toutes les ondes et les chaînes télévisées. L’exécution de ce projet sera réalisée en collaboration avec les ministères de l’Intérieur, des Travaux publics et de l’Environnement. – Au menu également, la publication d’un guide de produits alimentaires « certifiés bio » (c’est une entreprise française qui contrôle les produits bio au Liban). – Pour inciter les jeunes à la protection de la nature et à sa défense contre la pollution et les nuisances, il est envisagé d’intégrer au programme la promotion de l’« Éco-Tourisme ». – Côté « déchets », les experts mettent sur la sellette le nylon qui, une fois brûlé, dégage beaucoup de gaz carbonique. Ils proposent son remplacement par le sac « textile » ou « papier ». Il sera estampillé du nom du sponsor et sera distribué dans les grandes surfaces. Le coût de l’opération est estimé à 10 000 dollars. Avis aux écolos... Sponsors. Dix arrestations Les forces de l’ordre ont procédé hier soir à une dizaine d’arrestations lors d’un nouveau rassemblement des chauffeurs de taxi qui protestaient contre l’interdiction des voitures au mazout. Après la dispersion de la manifestation qui a eu lieu secteur du Musée, où se tenait le Conseil des ministres, vers 21h, les participants se sont regroupés à nouveau près du siège du syndicat des chauffeurs de taxi, rond-point Cola. Au cours de ce rassemblement, certains manifestants s’en sont pris à des autobus des transports en commun, qui ne sont pas touchés par l’interdiction, les forçant à faire descendre leurs passagers. Après quoi, ils ont tenté de casser les vitres de ces véhicules. Les forces de l’ordre ont arrêté neuf manifestants qui se livraient à ces actes. Un dixième a été arrêté pour port d’arme. Suzanne BAAKLINI
À la réunion qui a regroupé les différentes formations syndicales des chauffeurs de taxi hier, à 10h, au siège de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL), c’est une atmosphère d’attente qui a prévalu, à deux jours de l’application de la loi n° 341, sur l’arrêt des voitures touristiques roulant au mazout. Bassam Tleiss, vice-président de la...