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Actualités - CHRONOLOGIE

Justice - La cour de cassation militaire interroge les inculpés Hindi, Bassil et Younès dénoncent les interrogatoires préliminaires à Yarzé

Le décor est le même, les inculpés et leurs avocats aussi, mais l’atmopshère est totalement différente. Devant la cour de cassation militaire, présidée par le magistrat Tarabay Rahmé, pas question de plaisanter, la réouverture du procès de Toufic Hindi, d’Antoine Bassil et de Habib Younès est une affaire sérieuse. Et si, hors de ce bâtiment, la justice est malmenée, dans la salle du tribunal nul n’oserait élever le ton devant le président, qui joue à merveille de sa prestance, alternant intimidations et propos rassurants. En plus de huit heures d’audience, il achève l’interrogatoire des inculpés et fixe le prochain rendez-vous au 11 juillet pour l’audition des témoins et peut-être les plaidoiries et le réquisitoire, avant de passer au jugement final. Que l’opposition vient de marquer un point ne semble nullement impressionner le président Rahmé, qui procède à l’interrogatoire du Dr Toufic Hindi sans égard particulier. Il le fera même très souvent taire, en lui précisant que ce n’est pas parce qu’il est professeur d’université que chacune de ses réponses doit se transformer en conférence. Mais le conseiller politique du chef des FL dissoutes en a gros sur le cœur et, depuis sa condamnation par le tribunal militaire permanent, en avril dernier, sa frustration n’a cessé d’augmenter, le poussant à raconter inlassablement son histoire à la moindre occasion. L’audience s’ouvre à dix heures précises et dans le box des accusés, il n’y a plus que trois personnes, Toufic Hindi, tellement amaigri que, malgré la ceinture, il est tout le temps obligé de remonter son pantalon, Antoine Bassil, toujours aussi effacé, et Habib Younès, souriant en permanence à sa femme, Mireille, qui travaille elle aussi au quotidien al-Hayat et aide les journalistes à prendre des notes. En face d’eux, le président Tarabay Rahmé et ses quatre assesseurs militaires affichent des expressions si graves qu’elles en deviennent austères. Le magistrat Amine Bou Nassar occupe le siège du procureur et échange des sourires avec les avocats dont Mes Boutros Harb et Joseph Nehmé pour Hindi, Antoine Chmorr pour Antoine Bassil et Riad Mattar pour Habib Younès. D’emblée, le président explique aux inculpés qu’ils sont jugés pour une seule charge : la collaboration avec l’ennemi israélien et ses agents, et il les prie donc de concentrer leurs réponses sur ce dossier. Me Chmorr demande la parole pour affirmer que, selon lui, le dossier est inexistant et s’il faut absolument juger Bassil, c’est le tribunal des imprimés qui devrait le faire. Me Boutros Harb rappelle que les inculpés avaient émis des réserves sur les procès-verbaux des audiences du tribunal militaire permanent, dans lesquels leurs propos n’avaient pas été rapportés fidèlement et demande au président de tenir compte des enregistrements. Suggestion fermement refusée par la cour, qui considère que des cassettes ne peuvent en aucun cas être considérées comme des pièces officielles. Le président entame ensuite l’interrogatoire des inculpés. Les négations des inculpés Toufic Hindi, que le président appelle familièrement par son prénom, passe en premier. Le président l’interroge sur quatre faits qui figurent dans l’acte d’accusation: ses visites en Israël au milieu des années 80, ses deux voyages à Paris en 1995 et 1996 où il aurait rencontré Oded Zaraï et Uri Lubrani et son contact téléphonique avec Zaraï à Paris en 2001. Hindi nie les quatre points, affirmant n’avoir jamais rencontré Zaraï ni Lubrani et n’être même pas allé à Paris en 1995. Il reconnaît avoir effectué un voyage en septembre 1996. Il a d’abord été reçu par le pape à Rome puis s’est rendu à Paris pour rencontrer Michel Aoun, Amine Gemayel et Raymond Eddé. Il a acheté une carte téléphonique pour son portable et a appelé le représentant des FL à Paris Élie Baraghid. Ce dernier aurait communiqué le numéro à Joseph Jbeyli, réfugié aux États-Unis. Hindi nie avoir eu le moindre contact avec Ghassane Touma qui, dans l’acte d’accusation, lui aurait assuré un contact avec Zaraï. Hindi revient sur les mauvais traitements subis lors de l’enquête préliminaire à Yarzé et sur son effondrement moral et physique pendant les premiers jours de sa détention. Le président l’interrompt souvent, parfois assez vivement, lui demandant d’être précis et concis. « Pour un mathématicien, vous êtes plutôt porté sur la dialectique », lui dit-il. C’est pourquoi lorsqu’il lui demande son analyse de certains faits, toute la salle éclate de rire. Ce qui pousse le président à retirer sa question. Boutros Harb lui demande si les accusations portées contre lui sont vraies et Hindi répond : « Elles sont à cent pour cent fausses ». Le magistrat Bou Nassar lance : « S’attendait-on à ce qu’il dise oui ? ». Antoine Bassil revient sur certaines de ses déclarations devant le tribunal. Il affirme ainsi que lorsque Joseph Abou Khalil, alors rédacteur en chef du quotidien des Kataëb al-Amal, lui a présenté Karam Zaarour (alias Oded Zaraï), ce dernier ne devait pas devenir un collaborateur du journal. Il précise aussi avoir appris qu’il était israélien lors de son arrestation uniquement. Il raconte lui aussi les mauvais traitements subis à Yarzé et la peur d’y être renvoyé. « C’était donc l’enfer », demande le président. « Encore plus », répond Bassil. Habib Younès revient aussi sur certaines de ses précédentes déclarations, au sujet notamment de son voyage à Chypre, dans le but de rencontrer, non pas Étienne Sakr (Abou Arz), mais Chawki Raya qui voulait publier un ouvrage sur Saïd Akl. Apprenant qu’Abou Arz est à Chypre, il décide d’aller le voir, mais ce dernier ne lui a jamais demandé des rapports sur ce qui se passe ou quoi que ce soit d’autre. Le président demande ensuite aux avocats de présenter chacun sa liste de témoins. Harb et Nehmé demandent l’audition de Melhem Karam, le Dr Paul Karam et l’enquêteur Karim Fahl qui a signé les interrogatoires préliminaires de Toufic Hindi. Me Chmorr souhaite que MM. Farès Boueiz et Henri Sfeir soient entendus, mais le représentant du parquet proteste. La cour reporte sa décision et le prochain rendez-vous est fixé au 11 juillet... Le temps que les tempêtes se calment. Scarlett HADDAD
Le décor est le même, les inculpés et leurs avocats aussi, mais l’atmopshère est totalement différente. Devant la cour de cassation militaire, présidée par le magistrat Tarabay Rahmé, pas question de plaisanter, la réouverture du procès de Toufic Hindi, d’Antoine Bassil et de Habib Younès est une affaire sérieuse. Et si, hors de ce bâtiment, la justice est malmenée,...