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Actualités - ANALYSE

Téléphonie mobile - Le clivage de mentalités se creuse entre Baabda et Koraytem Le sort des privatisations lié au différend sur le cellulaire

Signe des temps. Le débat politique (et non politicien) portant sur les grands dossiers qui se posent à l’échelle nationale est marginalisé, voire vidé de son contenu, sous le poids des contraintes régionales. En l’absence de vie politique active, le débat se transpose souvent au niveau socio-économique. Cela explique, dans une certaine mesure, que les feux de l’actualité aient été braqués ces derniers jours sur le mécanisme de privatisation du réseau GSM. Si cette affaire suscite des réactions aussi fiévreuses, c’est d’abord parce qu’elle concerne la vie quotidienne de tous les Libanais. Et c’est aussi, surtout, parce qu’elle met en jeu de gros contrats particulièrement juteux. Mais il ne s’agit là que de la partie visible de l’iceberg. Car le différend sur les modalités et les conditions de la privatisation de la téléphonie mobile cache en réalité un clivage qui s’approfondit de jour en jour entre deux camps, ou plus précisément deux mentalités, deux conceptions de la chose publique : le camp du président Émile Lahoud et celui du Premier ministre Rafic Hariri. Dans le contexte présent, il serait, certes, totalement erroné d’avoir une vision manichéenne d’une telle situation. Le mieux serait peut-être de s’en tenir aux faits. Dans les milieux proches de Baabda, on souligne dans ce cadre que contrairement à certaines informations filtrées à la presse, le président Émile Lahoud et le ministre des Télécommunications, Jean-Louis Cardahi, ne sont nullement opposés d’une quelconque façon au principe de la privatisation du réseau GSM. Leur souci premier est, bien au contraire, que cette opération se fasse dans des conditions loin de tout soupçon, affirment les milieux en question. L’octroi de deux licences d’exploitation de la téléphonie mobile, sur une période de vingt ans, constitue la première grande opération de privatisation mise sur pied par le gouvernement dans le cadre de la ligne de conduite économique que s’est fixé l’Exécutif. Si cette opération, qui constitue un premier pas, est, d’emblée, entaché de magouilles financières, c’est l’ensemble de l’entreprise de privatisation, au niveau des autres services publics, qui risquerait d’être discrédité aux yeux des instances et des entreprises internationales. Or, dans ce cas précis, on semble mal parti. Nul n’ignore, désormais, les circonstances dans lesquelles le gendre du Premier ministre a acquis tout récemment 86 pour cent des parts de LibanCell grâce à un prêt accordé, au pas de charge, par la banque ... du Premier ministre. Une opération qui aurait fait sourciller plus d’un haut responsable, notamment au sein des organisations financières occidentales. Ce qui rend aussi ce rachat de parts quelque peu embarrassant c’est, évidemment, le fait qu’un grave contentieux financier et juridique oppose cette même société LibanCell à l’État libanais. Les sources proches du ministre des Télécommunications soulignent dans ce cadre qu’en réalité, la bataille actuelle autour du cellulaire constitue une tentative de « lutter contre la mentalité mercantile, les magouilles et les trafics d’influence qui caractérisent depuis quelques années la gestion des affaires publiques ». D’où le souci d’organiser l’appel d’offres en vue de l’octroi des deux licences d’exploitation du réseau GSM sur base d’un cahier des charges préparé par une entreprise étrangère prestigieuse, dont la crédibilité ne saurait être mise en cause, en l’occurrence HSBC. En pratique (et c’est là que resurgit la partie visible de l’iceberg), le différend actuel est axé essentiellement (en apparence) sur la nature de la période transitoire qui nous sépare encore de la privatisation de la téléphonie mobile (laquelle devrait intervenir dans le courant du dernier trimestre de l’année). Les milieux du ministre des Télécommunications soulignent sur ce plan qu’il serait illusoire d’espérer attirer des entreprises étrangères en vue de l’exploitation du réseau GSM sur une période de 20 ans si l’État ne contrôle pas ce réseau, ou tout au moins s’il ne le place pas sous sa supervision directe. Le gouvernement ne peut, en effet, « vendre » un service qui demeure sous la coupe de sociétés privées qui, de surcroît, sont en conflit avec le ministère. C’est ce genre de considérations qui a poussé le ministre concerné à proposer qu’une société internationale prenne en charge, pour le compte de l’État, la gestion et l’exploitation de la téléphonie mobile, dans l’attente de la signature des nouveaux contrats avec les entreprises qui remporteront l’appel d’offres préparé par HSBC. Cette option est toutefois rejetée par le Premier ministre, qui insiste pour que LibanCell et Cellis continuent à gérer et à exploiter le réseau durant la période transitoire, arguant du fait que le laps de temps qui nous sépare de l’octroi des nouvelles licences ne permet pas, pratiquement, à une société internationale de prendre en main tout le dossier pour uniquement quelques mois. Les sources proches de M. Cardahi rétorquent à une telle argumentation en suggérant que Cellis et LibanCell continuent de gérer la téléphonie mobile pour le compte de l’État, tout en fournissant les garanties juridiques nécessaires permettant de lever toute équivoque possible quant à la propriété du réseau. Cet imbroglio sera sans doute éclairci grâce à la réponse de HSBC aux deux questions soulevées par le gouvernement, concernant le rôle des deux sociétés actuelles durant et après la phase transitoire. Mais c’est sans compter avec les manœuvres et les calculs politiciens des deux camps en présence. Et c’est, surtout, sans compter avec les retombées du clivage de mentalités qui se creuse entre Baabda et Koraytem. Michel TOUMA
Signe des temps. Le débat politique (et non politicien) portant sur les grands dossiers qui se posent à l’échelle nationale est marginalisé, voire vidé de son contenu, sous le poids des contraintes régionales. En l’absence de vie politique active, le débat se transpose souvent au niveau socio-économique. Cela explique, dans une certaine mesure, que les feux de...