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Actualités - OPINION

Le Sérail tente de corriger les erreurs d’aiguillage

Quand on est jumelé et que de plus on doit assumer dans ses foyers un étrange ménage à trois, le vaudeville n’est pas toujours drôle. On ne fait pas ce qu’on veut, quand on a tant de cordes au cou. Et si l’on doit en outre distendre les torsions de ficelles, pour avoir plus de laisse, sans trop fâcher le dompteur, il faut se livrer à des exercices périlleux d’acrobatie, ou d’otarie de cirque. Il n’est pas ainsi facile pour M. Rafic Hariri de continuer à protéger les intérêts occidentaux du Liban, qui sont pour l’heure compromis par le durcissement des positions régionales. Il s’est rendu en Amérique et on le lui a reproché. Il faudra voir ensuite quelles retombées aurait, sur sa carrière comme sur la vie politique locale, sa présente tentative de rattraper Valence. C’est-à-dire de corriger cette bévue commise par le Liban, aux dires des diplomates occidentaux, à travers le refus d’assister à la conférence euro-méditerranéenne. Une abstention d’autant plus fâcheuse que, du même coup, Beyrouth a dû renoncer à finaliser la signature de son accord de partenariat avec l’Europe. Pour arranger les choses, M. Hariri fait d’abord savoir que ce n’est que partie remise. Et promet ensuite d’apposer sa propre signature au bas des documents, sans en confier le soin au ministre des Affaires étrangères. Mais quand cela se ferait-il ? Dans une ou deux semaines en principe. Mais, il n’y a rien de définitif, tout étant toujours tributaire comme on sait de la coordination avec les frères, c’est-à-dire avec la grande sœur. Cependant, les haririens, rejoignant sur ce point les opposants de l’Est, se disent convaincus que l’on n’aurait pas dû laisser le champ ouvert à Israël du côté de Valence. À leur avis, il ne faut pas déclarer forfait sur la lice diplomatique internationale, où se livre une partie de la bataille contre l’ennemi. Le Liban doit donc se montrer actif dans toutes les instances, toutes les conférences internationales ou régionales. D’autant plus impérativement qu’il a beaucoup de positions à regagner après une absence forcée due aux longues années de guerre domestique. Ces sources rappellent qu’il y a trois mois, en paraphant à Bruxelles le brouillon de l’accord avec l’Union européenne, le président du Conseil avait souligné l’importance que cette assistance a pour un Liban qui tente de redresser son économie et ses finances publiques, en préparant Paris II. Il avait même ajouté qu’il attendrait avec impatience la finalisation de l’accord, prévue depuis lors pour la conférence de Valence en Espagne. Puis, au moment où cette échéance bénie est enfin arrivée, surprise : le Liban se dérobe. Pourquoi ? Parce qu’il exige, à l’instar de Damas, l’exclusion d’Israël, à cause de ses tueries en Palestine. Bien évidemment, il lui a été répondu qu’on ne pouvait lui donner satisfaction et qu’il ne fallait pas faire d’amalgame. En soulignant que l’Europe a par ailleurs pris position contre Sharon, certains de ses États proposant même la résiliation de l’accord de partenariat avec l’État hébreu. Une façon d’indiquer au Liban qu’il n’avait aucune raison de désobliger les Européens, en leur faisant l’affront de refuser leur invitation et leur offre de coopération économique. Bref, le Liban s’est mis lui-même hors circuit, abandonnant la scène. Et se montrant plus royaliste que le roi puisque Arafat lui-même a prôné la participation à la rencontre en Espagne. Cela après qu’Israël eut empêché le ministre espagnol des Affaires étrangères, dont le pays préside actuellement l’Union, de rencontrer le leader palestinien à Ramallah. L’Autorité palestinienne participe donc à Valence, ainsi que l’Égypte, la Jordanie et la Tunisie. Quoi qu’il en soit, les diplomates occidentaux, dont les propos sont largement répercutés par les opposants locaux, relèvent que, de toute évidence, le Liban se prive lui-même des assistances qu’il espérait. En répétant qu’on ne voit pas pourquoi le Liban reste présent à l’Onu, par exemple, puisqu’Israël y est. Localement, on souligne également l’illogisme et les contradictions de la position officielle inspirée par les tuteurs. En effet récemment, et alors que la répression israélienne dans les territoires autonomes palestiniens battait son plein, le président de la Chambre, M. Nabih Berry, n’a pas hésité à se rendre à une conférence parlementaire internationale organisée au Maroc avec la participation d’Israël. M. Berry, qui a quitté la salle lors du discours israélien, a de son côté mis la tribune à profit pour dénoncer avec virulence l’État hébreu. Selon les opposants, c’est ce choix de combat qui doit être constamment suivi, car les absents ont toujours tort et sont toujours perdants. Sur tous les plans. Philippe ABI-AKL
Quand on est jumelé et que de plus on doit assumer dans ses foyers un étrange ménage à trois, le vaudeville n’est pas toujours drôle. On ne fait pas ce qu’on veut, quand on a tant de cordes au cou. Et si l’on doit en outre distendre les torsions de ficelles, pour avoir plus de laisse, sans trop fâcher le dompteur, il faut se livrer à des exercices périlleux...