Actualités - ANALYSE
Les réfugiés de Jénine, entre larmes et colère, jurent qu’ils n’oublieront jamais
le 13 avril 2002 à 00h00
Après avoir passé de longs jours sans nourriture et sans sommeil, les survivants du camp de réfugiés de Jénine ne peuvent retenir leurs larmes et leur colère, et leurs oreilles résonnent encore du fracas des missiles et des tirs de chars. Alors que les forces israéliennes ratissent une zone, quelques kilomètres plus loin, après une semaine de combats acharnés, huit femmes en pleurs, toutes membres d’une même famille, et un homme sont regroupés dans une maison de Kafr Dan après avoir pu quitter sains et saufs le camp de Jénine. Ils sont inquiets pour ceux dont ils ont perdu la trace après ce qu’ils appellent le «massacre de Jénine». Hanan, 23 ans, se souvient des trois premiers jours après l’encerclement et le bombardement par l’armée israélienne du camp, lorsque 80 personnes se sont réfugiées dans une même maison, craignant des attaques d’hélicoptères. «Nous n’avions rien à manger ou à boire et l’une de mes sœurs a perdu connaissance à cause de la faim. On sentait la fumée qui se dégageait d’une maison qui brûlait tout près de nous, mais nous ne pouvions aller nulle part», a-t-elle raconté. «Des combattants venaient pour se cacher, mais nous étions trop nombreux et ne pouvions plus ni dormir ni bouger. Trois jours plus tard, nous avons décidé de tenter notre chance et partir», a ajouté la jeune Hanan. «Nous sommes sortis, les femmes les premières, brandissant un drapeau blanc. À peine nous étions-nous avancés d’une vingtaine de mètres dans la rue qu’un tireur a ouvert le feu en notre direction et nous nous sommes arrêtés net. Nous avons levé les mains et crié que nous sommes des civils», se souvient-elle. Les Israéliens ont appréhendé les hommes et laissé les femmes partir. Sa sœur, Hala, 19 ans, affirme que le camp était méconnaissable. Il abritait quelque 15 000 réfugiés avant l’intervention israélienne le 3 avril dans le cadre d’une offensive militaire menée en Cisjordanie. «Nous n’avons pas vu de corps dans les rues, les bulldozers les avaient tous déblayés avec les décombres des maisons détruites pour permettre la progression des chars d’assaut et des soldats dans le camp», a-t-elle dit. Assise à côté de sa sœur, Amaneh, 18 ans, pleure en silence. «J’ai perdu toute trace de ma famille. C’était la confusion, notre maison a été bombardée et nous nous déplacions en permanence», raconte-t-elle. «Je ne sais pas s’ils sont morts ou vivants (...) mais je m’inquiète aussi pour mes frères, qui font partie de la Résistance», dit-elle. Hassan, 52 ans, est assis dans un coin de la chambre à côté de sa femme, Aïsha, 43 ans. Il est resté jusqu’au sixième jour de l’occupation israélienne. «J’ai vu des corps jonchant la chaussée. Nous en avons enterré quelques-uns par respect, dans la rue, sous la boue», a-t-il raconté. Hassan a affirmé qu’il n’avait pas été fait prisonnier en raison de son âge, mais beaucoup d’autres ont été appréhendés. «Les combattants se sont cachés, mais ils sont morts à présent. La résistance est terminée», selon lui. Abou Mohammad, 36 ans, affirme qu’il figurait parmi quelque 2 000 personnes arrêtées. Il a été finalement libéré et a trouvé refuge dans le village de Roumana, à quelques kilomètres de l’axe routier de Kafr Dan, en compagnie de 300 autres ex-détenus. «J’ai été menotté et on m’a bandé les yeux avant de m’emmener avec 90 autres hommes dans leur camp militaire de Salem, près de Jénine», dit-il. «J’ai été frappé et déshabillé. J’ai dû rester à genoux pendant des heures, menotté, la tête baissée», ajoute-t-il. «Ils disent que c’est fini», lance Hanan. «Mais nous sommes là et nos enfants aussi. Ils n’oublieront pas», jure-t-elle.
Après avoir passé de longs jours sans nourriture et sans sommeil, les survivants du camp de réfugiés de Jénine ne peuvent retenir leurs larmes et leur colère, et leurs oreilles résonnent encore du fracas des missiles et des tirs de chars. Alors que les forces israéliennes ratissent une zone, quelques kilomètres plus loin, après une semaine de combats acharnés, huit femmes en pleurs,...
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