Un sentiment de honte

En 2002 comme en 1948, les dirigeants arabes regardent partir la Palestine sans rien faire. Cinq jours après le début de l’offensive israélienne contre les territoires palestiniens, les plans d’Ariel Sharon sont devenus clairs : réoccuper la totalité de la Cisjordanie et détruire systématiquement l’Autorité et tout ce qui a été accompli depuis 1993. Sharon aurait sans doute souhaité que cela se passe en l’absence de son ennemi Yasser Arafat, espérant que ce dernier irait au sommet de Beyrouth et resterait hors de ses territoires. Mais le Vieux n’a pas voulu partir et Sharon a fait avec, le consignant dans deux pièces pour le pousser à la reddition et lorsqu’il se sera rendu, à l’exil, définitif cette fois. Mais le Vieux a encore déjoué les plans israéliens, en restant sur place dans les pires conditions. Les dirigeants arabes si prompts à s’indigner lorsque le président du sommet de Beyrouth n’a pas donné la parole à Arafat après l’émir Abdallah (et avant Bachar el-Assad) ne réagissent pourtant pas en le voyant, à la lueur des bougies, se débattre pour ne pas être oublié du monde dans son sinistre réduit ouvert à tous les vents. En 2002 comme en 1948, les dirigeants arabes laissent s’accomplir le pire des complots contre ce peuple qu’ils prétendent défendre. Mais si en 1948 les moyens de communication étaient peu développés et leur attitude pouvait passer discrètement, aujourd’hui, dans le coin le plus reculé du monde arabe, il n’est pas un seul citoyen qui n’éprouve un terrible sentiment de honte que ni l’oppression ni la langue de bois ne pourront jamais effacer. Scarlett HADDAD