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Actualités - OPINION

Beyrouth s’arc-boute sur ses positions face aux pressions US

Comme on traite une rage de dents chronique par le mépris, Washington continue à ignorer avec superbe la présence, sur la carte géopolitique de cette région sarabande, de l’État charnière qu’est le Liban. Ainsi le vice-président américain, M. Dick Cheney, n’a même pas daigné honorer d’un commentaire l’absence sur son carnet de bal du valseur qu’est ce petit pays. M. Cheney, qui a effectué une tournée englobant douze capitales, s’est plus ou moins expliqué sur le cas Arafat. En laissant entendre qu’il le garde pour la bonne bouche et pourrait le rencontrer au Caire. Mais aucune mention de Beyrouth, où se tient pourtant ce sommet arabe auquel les USA tiennent tant. Parce que l’initiative du prince Abdallah d’Arabie saoudite, leur bon ami, doit en principe y être approuvée. Cependant, il faut tout de suite noter que cette fois, Washington a également omis de relancer les Syriens. Jugeant sans doute que c’était inutile. Parce que la position de Damas sur l’Irak, cible déclarée de la tournée Cheney, est connue. Tout comme il est connu que la Syrie reste le chef du file du front arabe dit de fermeté. Car si, contrairement aux islamistes, elle ne rejette pas le principe même de la paix, elle refuse par contre toute solution qui serait en fait une capitulation face aux visées sionistes. La Syrie veut l’application du principe de Madrid «la terre moyennant la paix», ainsi que des résolutions 242, 338, 425 et 194 de l’Onu. Elle s’est toutefois abstenue de voter la toute dernière, la 1397. Non parce que le texte prévoit la création d’un État palestinien, mais parce qu’il met à pied d’égalité le bourreau israélien et la victime palestinienne, en demandant l’arrêt des violences actuelles entre les deux parties. La Syrie attend des Américains qu’ils fassent pression sur Israël, non qu’ils l’encouragent. Pour ce qui est du Liban, des loyalistes relèvent que la froideur affichée par Washington découle des positions adoptées par le pouvoir local, en parfait accord avec la Syrie, après le retrait israélien du Sud, en mai 2000. Positions qui se résument dans le refus d’envoyer l’armée à la frontière et de neutraliser le Hezbollah, toujours actif dans l’enclave de Chebaa. Sans compter le désarmement des camps palestiniens, également réclamé par les Américains pour le compte d’Israël. On sait en effet qu’au nom du jumelage, le Liban entend garder son front semi-ouvert, comme carte de pression, jusqu’à la libération du Golan et même des territoires palestiniens. Il demande également, avec le soutien de la Syrie, le règlement de l’affaire des réfugiés palestiniens, en rejetant l’implantation, et exige la libération des Libanais détenus en Israël. Sans compter l’appui ouvert à l’intifada, à l’image de Damas. À l’occasion de la non-visite de M. Cheney, les officiels du cru répètent qu’il est hors de question de plier devant les pressions US. Et qu’ils s’accrochent plus que jamais à ce qu’ils appellent les constantes, entendre les règles du jeu convenues avec le jumeau syrien. Ils affirment qu’en dehors de cette voie bien tracée, le pays risquerait de connaître des troubles politiques et confessionnels à l’intérieur. Autrement dit, que les parties locales qui soutiennent la Résistance active d’une part, et celles qui appuient le statut armé des camps palestiniens d’autre part, se soulèveraient contre l’envoi de l’armée au Sud pour y établir l’autorité de l’État. Et peu importe que l’Est, comme certaines fractions de l’Ouest, trouve anormal que ce déploiement reste bloqué. Du moment que ce camp n’a ni voix au chapitre ni les moyens de se faire entendre vraiment, l’agitation de ses jeunes restant sans effet politique tangible dans l’immédiat. Cependant, si politiquement les pressions américaines ont peu d’effet sur le Liban, qui s’abrite derrière le rempart syrien, elles contribuent certainement à prolonger sinon à aggraver le malaise économique dont souffre le pays. C’est en effet un secret de polichinelle que le report, voire l’annulation de Paris II, c’est-à-dire du moratoire de dette dont Beyrouth espérait bénéficier, est causé par les réticences d’un Fonds monétaire international et d’une Banque mondiale pratiquement téléguidés par Washington. Qui décourage par ailleurs les investisseurs étrangers potentiels. Et qui, par ailleurs, ne fait visiblement rien pour empêcher l’implantation, projet redoutable qui commence à ressembler furieusement à un fait accompli. Philippe ABI-AKL
Comme on traite une rage de dents chronique par le mépris, Washington continue à ignorer avec superbe la présence, sur la carte géopolitique de cette région sarabande, de l’État charnière qu’est le Liban. Ainsi le vice-président américain, M. Dick Cheney, n’a même pas daigné honorer d’un commentaire l’absence sur son carnet de bal du valseur qu’est ce petit pays....