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Actualités - ANALYSES

Par trois fois Lahoud aurait retenu Hariri de se retirer

Ah, le bon vieux temps. Un jour que Kamal bey (Joumblatt) démarchait le général (Chéhab) pour pistonner un fonctionnaire, il s’entendit répondre : «Je veux bien, mais cheikh Farid ne me le permet pas !». Cheikh Farid, c’était cheikh Farid el-Khazen, incontournable président fondateur du Conseil de la fonction publique dont il avait établi le statut, c’est-à-dire le programme, le champ d’action. L’État des institutions avait alors un certain sens, bien que ce concept ne fût pas encore passé dans le langage courant. On se contentait en effet de parler d’État tout court, et c’était aussi bien. Le vétéran parlementaire qui rapporte cette anecdote se demande ensuite, avec une pointe d’amertume, «quel grand commis aurait aujourd’hui le front, ou simplement l’idée, de s’opposer aux desiderata de l’un de nos présidents». Ou même d’un pôle influent, serait-on tenté de surenchérir. Mais les politiques ne craignent pas, pour leur part, de croiser le fer entre eux, d’échanger les objections sinon les vetos et les invectives, de se mettre mutuellement les bâtons dans les roues, bref de se chamailler au nom d’un intérêt national que chacun comprend à sa manière. Ce fut très exactement le cas durant la séance «historique» et marathonesque de mardi. Six heures de disputes acharnées pour des nominations dont bien peu sont réellement du premier rang. Le chef de l’État, indiquent des sources fiables, a dû jouer les pompiers tout le long de la réunion, pour éteindre des incendies qui se rallumaient aussitôt qu’éteints. Le président Lahoud a réussi en fin de compte à éviter aussi bien un flop, c’est-à-dire une annulation de l’opération qui aurait déçu l’opinion publique qu’un éclatement du cabinet. Qui aurait sans doute plongé le pays dans une crise socio-économique sans précédent. Par contre-coup en quelque sorte, car nul n’ignore que si le pouvoir s’efforce de traiter ce grand malade qu’est l’Administration, c’est pour permettre le redressement économique et l’assainissement relatif des finances publiques. Le président de la République a donc sauvé les meubles, en exigeant, et en obtenant, des résultats concrets. Un effort d’autant plus remarquable qu’à trois reprises, selon les mêmes sources fiables, le président du Conseil a failli pour sa part tout plaquer et claquer la porte. Ce qui aurait pu conduire, même sans démission formelle, à une dislocation du cabinet. Le chef du gouvernement a eu en effet maille à partir avec plusieurs ministres. Dont l’un, pour commencer, s’est inscrit en faux dès le départ contre la procédure retenue. Un autre a par contre rué dans les brancards quand M. Rafic Hariri a proposé un nom pour un poste de directeur général déterminé, en faisant valoir que les mécanismes prévus n’étaient pas respectés, puisque lui-même n’avait pas présélectionné ce candidat. Et ainsi de suite, six heures durant. Il en est certes sorti un train de désignations quantitativement impressionnant dans les services publics ordinaires comme dans les offices autonomes ou assimilés. Mais cette superproduction a provoqué bien des mécontentements au niveau politique. Car certaines régions ont été négligées dans la distribution des prix. Et, comme par hasard, il se trouve, une fois de plus, que c’est Jbeil et le Kesrouan, au cœur même du camp chrétien, qui ont été oubliés, n’obtenant aucune direction générale. Alors que trois ministres sur trente se glorifient de représenter cette même contrée au sein de l’Exécutif. D’autres sources politiques affirment que le mouvement, pour important qu’il paraisse, est largement incomplet. Dans ce sens qu’il y a encore des nominations à promulguer, ce qui est prévu en principe pour aujourd’hui. Mais surtout en matière de législations et de règlements administratifs, le code actuel remontant à 1959 et ayant dès lors besoin d’un fort dépoussiérage, voire d’une refonte totale. Pour moderniser l’Administration, mais aussi pour la prémunir contre le clientélisme, en renforçant les pouvoirs des organismes dits de contrôle comme le Conseil de la fonction publique, la Cour des comptes, l’Inspection centrale ou le Conseil de discipline générale. Dont les membres devraient jouir d’une inamovibilité de trois ou même de cinq ans, afin d’être à l’abri des pressions politiciennes.
Ah, le bon vieux temps. Un jour que Kamal bey (Joumblatt) démarchait le général (Chéhab) pour pistonner un fonctionnaire, il s’entendit répondre : «Je veux bien, mais cheikh Farid ne me le permet pas !». Cheikh Farid, c’était cheikh Farid el-Khazen, incontournable président fondateur du Conseil de la fonction publique dont il avait établi le statut, c’est-à-dire le...