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Actualités - INTERVIEWS

Interview - Amnesty International opère une réforme face à la globalisation - Irène Khan : « Nous sommes le mouvement des peuples »

L’arrivée d’Irène Khan à la tête d’Amnesty International en août dernier est significative à plus d’un égard. Pour la première fois, une femme se voit confier les rênes de cette organisation humanitaire qui s’est distinguée, un demi-siècle durant, par une action efficace et universelle, notamment auprès des prisonniers politiques. Pour la première fois également, une secrétaire générale musulmane est nommée à cette haute fonction, une initiative qui prend désormais tout son sens après les attentats du 11 septembre. L’avènement d’Irène Khan, une juriste diplômée de Manchester et de Harvard, coïncide en outre avec le 40e anniversaire d’Amnesty, une occasion mise à profit par cette ONG pour annoncer une réforme majeure dans la politique générale de cette organisation, «non au niveau de la philosophie, mais simplement du contenu et de la conception globale de la notion des droits», comme le souligne Irène Khan. De passage au Liban dans le cadre d’une visite qui la conduira ensuite au Pakistan, la nouvelle secrétaire générale d’Amnesty International expose les motivations de ces changements, dans une entrevue accordée à L’Orient-Le Jour. «Tout au long de son histoire, Amnesty n’a pas jamais cessé d’évoluer. Après avoir axé sa mission sur la défense et la protection des prisonniers de conscience, elle a élargi son champ d’action, qui englobe désormais les problèmes de détention, les conditions d’emprisonnement, la torture, la condamnation à mort et, plus récemment, la question des réfugiés et le problème relatif aux droits des femmes et des enfants», affirme Irène Khan. Ce sont les droits, entendus dans leur sens large, – à savoir les droits économiques, sociaux et culturels – que compte désormais défendre cette organisation et non plus exclusivement les droits politiques et civils. «On ne peut pas parler d’un revirement de politique ni d’un changement dans l’esprit de l’organisation, dans la mesure où les droits sociaux et économiques aussi bien que les droits politiques constituent un tout indivisible», affirme Mme Khan. Des besoins énormes Cela n’affectera donc ni la mission d’origine de cette organisation – «Amnesty continuera à défendre les droits des prisonniers de conscience, à lutter contre les abus de tout genre et contre la torture», assure Irène Khan – ni sa neutralité et son caractère universel. «C’est simplement le contenu de notre action qui change», précise-t-elle. Le timide mouvement de démocratisation qui s’amorce un peu partout dans le monde et la baisse du nombre des prisonniers seraient-ils à l’origine de cette mutation ? Irène Khan reconnaît que le nombre de détenus politiques a nettement baissé, «mais cela ne constitue pas une raison suffisante pour expliquer la réforme actuellement entreprise. Il faut surtout convenir que l’impact de la globalisation a mis en évidence la question des droits sociaux et culturels de manière flagrante». Pour cette humaniste, l’état d’esprit qui prime actuellement au sein de l’organisation internationale est qu’il importe de réfléchir en termes de priorités et de besoins des victimes. «Il s’agit désormais de sélectionner les champs d’action dans lesquels nous devons intervenir tels que le problème du sida en Afrique, la question des réfugiés, ou encore, la confiscation de terres aux paysans en Amérique latine. Les besoins sont énormes», dit-elle. Irène Khan n’oublie pas de rappeler qu’Amnesty est une ONG qui dépend de ses membres (1,2 million), notamment pour le choix de son action et de sa politique générale et qui, de par sa structure – 115 États en sont membres – ne peut se dérober aux pratiques démocratiques qui la caractérisent depuis sa naissance. «Nous ne sommes pas une organisation humanitaire, nous sommes le mouvement des peuples», conclut la secrétaire générale.
L’arrivée d’Irène Khan à la tête d’Amnesty International en août dernier est significative à plus d’un égard. Pour la première fois, une femme se voit confier les rênes de cette organisation humanitaire qui s’est distinguée, un demi-siècle durant, par une action efficace et universelle, notamment auprès des prisonniers politiques. Pour la première fois...