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Actualités - CHRONOLOGIES

Les femmes de Kaboul restent sceptiques sur l’ère post-talibane

À Kaboul, elles peuvent retourner à l’université, travailler dans la police ou présenter le journal radio ou télévisé, mais les femmes continuent de craindre que le départ des talibans ne leur apporte pas la liberté espérée. Dans les rues de la capitale afghane, seules quelques vieilles femmes ont commencé à enlever prudemment leur burqa dont le port avait été imposé par les talibans. «La victoire de l’Alliance du Nord a été une bonne nouvelle pour toutes les femmes d’Afghanistan, mais j’ai des craintes pour l’avenir», dit Jamila Mujahed, dont la voix était symboliquement revenue sur les ondes de Radio Afghanistan, deux heures après l’entrée de l’Alliance du Nord dans la ville le 13 novembre. Sous la milice intégriste, les femmes avaient été transformées en recluses par une longue liste d’interdits dont ceux de travailler, d’étudier ou de sortir sans être accompagnées par un homme de leur famille. Mais Jamila, âgée de 36 ans, attend de voir si l’Alliance, une coalition de chefs de guerre des minorités tadjikes, ouzbeks et hazaras, ne va pas ramener l’anarchie et la violence dans la capitale, comme ils l’avaient fait entre 1992 et 1996. «Les gens ont de terribles souvenirs, c’est pourquoi dans la pratique, aucune femme n’enlève sa burqa ou ne retourne travailler», dit-elle. Les noms de trois femmes ont été avancés lors de la conférence de Bonn sur l’avenir politique du pays pour participer à une future autorité intérimaire à Kaboul. Mais Jamila et Soraya Parlika, présidente de l’Union des femmes d’Afghanistan, assurent que ce geste est vide de sens et déplorent le fait que les trois femmes désignées soient des exilées qui n’ont pas vécu sous les talibans. Dans la capitale afghane, des dizaines de jeunes femmes sont venues samedi dernier s’inscrire à la faculté après cinq ans d’interdiction. Et 20 femmes policiers sont de retour à leurs bureaux au siège de la police de l’Alliance du Nord, pour la première fois depuis cinq ans. «Aussitôt après la fuite des talibans, le jour suivant, je suis venue ici espérant retrouver mon emploi puisque mon “gouvernement” est de nouveau au pouvoir», dit Gulalai Sadarqat. «C’est un honneur d’aider à combattre la criminalité et d’assurer la sécurité», affirme-t-elle, même si la force de police de l’Alliance n’a pas la confiance de la population. Lorsqu’elle quitte son bureau, elle porte encore la burqa au siège de la police même si ses patrons ont promis que les femmes policiers auraient bientôt des uniformes gris. Le ministre des Affaires étrangères de l’Alliance du Nord, Abdullah Abdullah, appelle les femmes à être patientes, promettant qu’elles auront bientôt tous les droits, y compris celui de voter. «Il y a trois semaines, les femmes n’avaient même pas la permission de sortir de leur maison», dit-il. «À présent, elles vont bénéficier des mêmes droits que les hommes, elles sont libres de reprendre leur emploi dans l’administration ou les organisations internationales». Mais Mme Parlika, ancienne communiste et secrétaire générale de la Croix-Rouge afghane, qui a tenté d’organiser des manifestations à Kaboul en faveur des droits des femmes et s’est heurtée à des interdictions de l’Alliance, dit que les femmes afghanes ne peuvent être complaisantes. «Les femmes doivent participer à l’élaboration de la Constitution. Si elles ne participent pas, qui va garantir leurs droits ? Alors il n’y aura pas de différence entre les talibans et le nouveau gouvernement», dit-elle. La priorité est l’emploi pour les femmes. Nombre d’entre elles ont perdu leur mari pendant les 23 ans de guerre civile mais, sous les talibans, les veuves étaient réduites à la mendicité pour faire vivre leurs enfants. L’égalité des droits entre hommes et femmes est encore lointaine en Afghanistan. Deux femmes se trouvent dans les geôles du siège de la police à Kaboul. L’une a été dénoncée par son mari pour avoir voulu divorcer, l’autre par son fiancé pour avoir voulu briser son engagement. Toutes deux ont été arrêtées par l’Alliance du Nord.
À Kaboul, elles peuvent retourner à l’université, travailler dans la police ou présenter le journal radio ou télévisé, mais les femmes continuent de craindre que le départ des talibans ne leur apporte pas la liberté espérée. Dans les rues de la capitale afghane, seules quelques vieilles femmes ont commencé à enlever prudemment leur burqa dont le port avait été imposé...