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Actualités - CHRONOLOGIES

Vie politique - La visite de Lahoud à Moukhtara sous le signe de la détente - Joumblatt : « Le dialogue pour arrondir les angles »

Officiellement, il s’agit de resserrer les rangs internes après les attentats du 11 septembre. Mais c’est au 7 août qu’il faut peut-être remonter pour mesurer l’importance de la nouvelle attitude de Walid Joumblatt. Alors que le chef de l’État semblait marginalisé par l’axe Kornet-Chehwane-Joumblatt-Hariri, le message venu de Syrie et d’ailleurs a été très clair : Lahoud demeure un pilier important de la vie politique. Depuis, tout va dans ce sens. Du côté de la présidence, on cherche certes à donner au déjeuner de samedi à Moukhtara un caractère strictement familial, mais Joumblatt, lui, a été plus précis, affirmant que dans cette étape particulièrement délicate, il faut privilégier l’unité, l’entente et le dialogue. On aurait dit une chaleureuse réunion amicale : Lahoud et Joumblatt d’un côté, Mme Lahoud et Mmes May et Nora Joumblatt de l’autre, dans l’un des confortables salons du palais de Moukhtara, sous un portrait bienveillant de Kamal bey. L’image a l’air si naturelle qu’on croit avoir rêvé les moments de conflit, lorsque le bouillonnant maître des lieux protestait violemment contre le déplacement de la statue de Kamal Joumblatt du palais de Beiteddine. Cette page semble tournée. C’est en tout cas le message que veut transmettre le leader du PSP, qui, avant l’arrivée de son hôte, a multiplié les déclarations appelant à l’unité des rangs, après les attentats du 11 septembre. Abdel-Haq, un sort mérité Joumblatt loyaliste ? Le nom et le qualificatif semblent si antinomiques qu’on a du mal à les placer côte à côte. D’ailleurs, loyaliste, cela va mal au leader du PSP, qui, même lorsqu’il se veut le chantre du dialogue, garde cette liberté de ton qui le différencie de tous les autres politiciens libanais. Et samedi, Joumblatt n’a pas été avare en déclarations. Tôt dans la matinée, les journalistes ont commencé à affluer au palais de Moukhtara, malgré le soudain rafraîchissement du climat. En costume sombre et cravate rouge, comme son épouse, Walid bey accueille tout le monde avec son habituelle esquisse de sourire, se laissant même aller à échanger une conversation à bâtons rompus avec ses visiteurs. Comme il ne peut pas ne pas lancer des propos explosifs, il a réservé ses expressions extrémistes à la situation en Afghanistan, allant même jusqu’à se féliciter de l’exécution par les taliban de l’un des chefs de l’opposition Abdel-Haq, l’accusant d’être un espion à la solde des Américains et des Britanniques. Par contre, sur la situation interne, Joumblatt s’est voulu particulièrement conciliant, précisant toutefois que son discours actuel ainsi que la visite du président Lahoud à Moukhtara ne signifient nullement de sa part un revirement ou un changement d’alliances. «Il s’agit simplement d’une lecture différente des événements, surtout après les attentats du 11 septembre aux États-Unis». Joumblatt a ainsi voulu démentir les analyses parues dans les journaux et dans lesquelles la rencontre Lahoud-Joumblatt est qualifiée de nouvel axe opposé au président du Conseil Rafic Hariri et même à la ligne du rassemblement de Kornet Chehwane. Changement de style Devant des journalistes avides, Joumblatt a reconnu que par le passé, le conflit avec le président de la République a été très violent, «mais mon style a changé». «Avec le président, a-t-il dit, nous ne sommes pas forcément d’accord sur toutes les questions, mais le dialogue permet d’arrondir les angles et après les attentats du 11 septembre, il faut privilégier tout ce qui resserre les rangs». Au cours de la conversation, Joumblatt est souvent revenu sur la nécessité d’établir un dialogue calme et raisonnable, se réservant le droit de changer d’avis, «comme ce fut le cas au sujet des privatisations. Au début, j’étais d’accord avec le président Hariri sur ce projet, maintenant je suis convaincu qu’il faut le revoir…». Mais il a surtout insisté sur la situation en Afghanistan, condamnant certes les attentats de New York et Washington, mais appelant à un développement équilibré dans le monde. Joumblatt a exprimé son indignation devant l’inertie des pays arabes qui n’ont pas condamné ce qui se passe en Afghanistan. Commentant l’exécution du leader de l’opposition afghane, Joumblatt a déclaré qu’il n’a eu que ce qu’il méritait et cela devrait servir de leçon à ceux qui misent encore sur des solutions américaines et britanniques, comme pour le problème palestinien. À 12h40, les journalistes se précipitent vers l’entrée du palais, le président et son épouse sont là, accueillis par Walid bey, sa mère May et son épouse Nora. L’atmosphère semble chaleureuse et le président a tenu à ne se faire accompagner que de son épouse Andrée et de son conseiller en matière d’information Rafic Chélala, pour préserver le caractère familial de la rencontre. Mme Lahoud est aussitôt prise en charge par Mmes May et Nora Joumblatt, alors que le président s’attarde devant les toiles et les œuvres d’art des salons du palais, écoutant les explications de son hôte et s’extasiant devant la vue. Dans le salon douillet, les invités et leurs hôtes se prêtent à la photo souvenir avant de se rendre à la salle à manger pour déguster un déjeuner purement libanais. Au menu : riz au poulet, mezzés, haricots verts à l’huile et viandes diverses. Le repas est à l’image de l’atmosphère, qui est sereine et légère. Selon les milieux des deux parties, il aurait été surtout question des liens entre le père du président, Jamil Lahoud, et celui de Walid bey. Mme May Joumblatt aurait même promis au président de lui remettre des photos des deux hommes à Moukhtara. Après le café, vers 15h, le chef de l’État, son épouse et M. Chélala quittent les lieux sans faire la moindre déclaration et c’est Joumblatt qui, une fois de plus, commentera la visite. Visiblement détendu, le leader du PSP qualifie la rencontre d’excellente, précisant toutefois avoir abordé avec le président plusieurs thèmes qu’il ne tient pas à divulguer pour l’instant. «J’annoncerai dans une semaine ou deux de nouvelles prises de position, confirmant certains principes de base et ajoutant de nouveaux éléments, mais pour le moment je préfère ne rien dire». Dissocier la politique de l’administration En réponse aux questions des journalistes, Joumblatt a affirmé ne pas avoir abordé le dossier des nominations administratives. «D’ailleurs, je n’ai pas d’informations à ce sujet, ni de revendications. Je pense toutefois qu’il est nécessaire de dissocier la politique de l’administration». Le chef du PSP a, à plusieurs reprises, insisté sur la chance historique qui s’offre actuellement aux Libanais. «Il faut la saisir et éviter à notre pays de subir les contrecoups de la situation régionale. Nous devons coopérer avec le gouvernement et avec son chef pour tenter de circonscrire la crise économique». Conciliation, ouverture, c’est donc un Joumblatt inhabituel qui a accueilli samedi le chef de l’État. Le ton frondeur qui avait prévalu à l’occasion de la visite du patriarche Sfeir à Moukhtara le 4 août dernier s’est bel et bien calmé. Aujourd’hui, pour le chef du PSP, l’heure est bien trop grave pour continuer à patauger dans les zizanies internes. Et, comme il le dit lui-même, il faut attendre un peu pour juger de la portée de sa rencontre avec le chef de l’État. Ce qui est sûr c’est que le climat de détente qui règne actuellement ne peut que rassurer les Libanais, qui n’espèrent plus de miracles, mais aspirent à un minimum de calme, dans un monde en pleine mutation.
Officiellement, il s’agit de resserrer les rangs internes après les attentats du 11 septembre. Mais c’est au 7 août qu’il faut peut-être remonter pour mesurer l’importance de la nouvelle attitude de Walid Joumblatt. Alors que le chef de l’État semblait marginalisé par l’axe Kornet-Chehwane-Joumblatt-Hariri, le message venu de Syrie et d’ailleurs a été très clair :...