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Actualités - CHRONOLOGIES

Les pays arabes alliés des États-Unis dans une situation difficile

Les dirigeants arabes alliés des États-Unis sont placés dans une situation difficile par les frappes américaines, tiraillés entre des opinions publiques antiaméricaines et leur dépendance envers Washington. Au lendemain des bombardements, deux des principaux alliés américains dans la région, l’Égypte et la Jordanie, se sont limités à de prudentes déclarations, empreinte d’inquiétude pour ce qui est de la Jordanie, tandis que l’autre allié de poids de Washington, l’Arabie séoudite, observait le silence. «Les États-Unis ont, dans le respect de toutes les lois internationales, le droit de riposter, s’ils ont des preuves concluantes», a déclaré le conseiller du président égyptien Hosni Moubarak, Oussama al-Baz. À Amman, un porte-parole du gouvernement a déclaré que «la Jordanie réaffirme son appui aux efforts internationaux de lutte contre le terrorisme, mais souligne la nécessité d’épargner les civils afghans innocents». Il a surtout mis en garde contre toute «déstabilisation» du régime, faisant apparemment allusion aux islamistes qui ont dénoncé le «terrorisme d’État» mené par les États-Unis contre l’Afghanistan. Les alliés des États-Unis «sont mal à l’aise», explique le politologue Antoine Basbous. «Moubarak lutte contre les islamistes, mais il doit tenir compte de son opinion publique. Il faut se souvenir que dans les rues du Caire, les gens se sont félicités des attentats» le 11 septembre, ajoute-t-il. Allié solide des États-Unis, le régime de M. Moubarak, qui reçoit deux milliards de dollars d’aide américaine par an, la plus forte au monde après Israël, doit compter avec une opinion antiaméricaine et le poids des Frères musulmans. Ce mouvement islamiste mais non violent, interdit mais toléré, est très actif dans les mosquées et l’action sociale, et plusieurs milliers d’étudiants islamistes ont manifesté lundi en Égypte contre les bombardements. «Quand Le Caire a rejoint la coalition anti-Saddam (en 1990), il y avait à la clé la promesse d’un État palestinien. Il ne s’est rien passé et, aujourd’hui, les Arabes se sentent floués», explique-t-il. «Les Arabes ont de la sympathie pour le peuple afghan et n’adhèrent pas à la conception américaine du terrorisme», explique pour sa part Mustapha Kamel al-Saïd, professeur de sciences politiques au Caire. En Jordanie, autre allié historique des États-Unis, le roi Abdallah II «est placé entre plusieurs enclumes et plusieurs marteaux», poursuit Antoine Basbous, interrogé de Paris où il dirige l’Observatoire des pays arabes. «Il dépend des États-Unis et il est conscient des capacités de nuisance de ses trois voisins, Israël, l’Irak et les Palestiniens», ajoute-t-il. Quant à l’Arabie séoudite, pays où stationnent des troupes américaines mais qui refuse de fournir aucune aide logistique à Washington pour ses frappes, elle vit une situation impossible, selon les analystes. «Jusqu’en 1990, ils ont observé à la lettre la loi islamique, interdisant le stationnement de forces impies sur leur territoire. En 1990, il leur a fallu faire beaucoup de contorsions au wahhabisme (la doctrine en vigueur en Arabie séoudite) pour justifier l’arrivée de troupes américaines», explique M. Basbous. «Ils ont invoqué la force majeure. Mais cette fois, il n’y a pas de territoire à libérer contre un envahisseur athée, comme était présenté Saddam Hussein». «Comment pourraient-ils se mettre aux côtés des États-Unis pour frapper un État (l’Afghanistan) qui applique la charia wahhabite ?», ajoute M. Basbous. «L’Arabie séoudite prétend être le leader du monde musulman. En 1990, elle pouvait prétendre être menacée par l’Irak. Ce n’est plus le cas. Il lui est impossible de s’associer aux États-Unis pour lutter contre un peuple musulman», renchérit Mustapha Kamel al-Saïd. Après ces premières frappes, les dirigeants arabes alliés de Washington redoutent «une guerre d’usure dans laquelle Ben Laden veut entraîner les Américains», ajoute M. Basbous. «Car frapper un pays musulman pendant le Ramadan (le mois de la prière qui commence vers le 10 novembre) permettrait à Ben Laden de peser encore un peu plus sur l’opinion arabe». L’unité du monde arabo-musulman face aux frappes sera également un sujet délicat lors des réunions mardi et mercredi à Doha de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) qui s’annoncent difficiles.
Les dirigeants arabes alliés des États-Unis sont placés dans une situation difficile par les frappes américaines, tiraillés entre des opinions publiques antiaméricaines et leur dépendance envers Washington. Au lendemain des bombardements, deux des principaux alliés américains dans la région, l’Égypte et la Jordanie, se sont limités à de prudentes déclarations, empreinte...