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Actualités - ANALYSES

Liban-Sud - L’opération du Hezbollah à Chebaa, lourde de sens - Une réponse idéologique à l’amalgame entre résistance et terrorisme

Le tumulte est si fort dehors que la récente opération du Hezbollah à Chebaa est passée quasiment inaperçue. Bien qu’elle fût lourde de sens. Puisqu’étant la première depuis juillet, elle marque la rupture de la trêve tacite, de facto, conclue sous la pression US via les décideurs régionaux. Alors, pourquoi ce timing ? Pour des raisons multiples, enchevêtrées, en rapport avec la nécessité, parallèlement au rejet du cessez-le-feu par les mouvements palestiniens du Hamas et du Jihad islamique, de ne pas laisser de répit à l’ennemi israélien. Mais le principal mobile, du reste complexe dans ses portées comme dans ses mécanismes, reste sans doute de bien faire comprendre à l’Occident, qui y a tendance, que la résistance active, ça n’est pas du terrorisme. Et de riposter par le feu à Sharon qui réclame l’inclusion sur la liste noire américaine du Hezbollah comme du Hamas ou du Jihad islamique. Il ne fait aucun doute, enfin, que le passage à l’action ait été décidé à la lumière du durcissement de l’attitude de Téhéran comme de Damas à l’égard des États-Unis. Pour leur partialité paradoxale à l’égard d’Israël, qualifié par ces deux capitales comme étant le principal agent infectieux du terrorisme dans le monde. Les Iraniens et les Syriens condamnent certes sans recours les attentats du 11 septembre. Mais n’y voient pas un prétexte suffisant pour s’aplatir devant Washington, comme dit le président Bachar el-Assad, et de lui ouvrir toutes grandes les portes d’un contrôle impérial de la région. Cela étant, et pour en revenir à Chebaa, les observateurs notent avec intérêt la portée symbolique d’un bombardement réciproque qui n’a fait ni victimes, ni blessés, ni dégâts majeurs. C’était une lettre et sa réponse, écrites presque à l’encre sympathique. Un dialogue quasi confidentiel, bien étudié. De manière à ne pas trop rajouter aux complications d’une situation qui est tout près du point de rupture. En clair, ni la partie libano-syrienne ne souhaite donner à Sharon un prétexte solide pour l’ouverture d’un nouveau front qui lui servirait de fuite en avant par rapport à l’impasse dans laquelle l’intifada le coince. Ou d’alibi, par rapport à ces Américains qui lui interdisent de se défouler. Ni le gouvernement israélien ne peut se permettre de jouer avec le feu, dans la mesure où Washington lui en ferait payer le prix par des concessions sur le plan palestinien. Qui lui importe bien plus en définitive sur son flanc nord, Chebaa ou même le Golan. Pour ce qui est du Hezbollah lui-même, des sources informées indiquent qu’il a tenu, en marquant le coup, à montrer que l’évolution issue des attentats du 11 septembre, et de toute évidence favorable à cette Amérique qu’il n’apprécie pas particulièrement, ne l’impressionne pas. Et ne l’empêchera pas de poursuivre sa lutte active pour la libération de Chebaa comme des prisonniers libanais détenus en Israël. Sans compter qu’un tel geste est une sorte d’encouragement aux Palestiniens afin qu’ils ne mettent pas un terme à leur intifada. Toujours est-il que la position du Hezbollah concernant le rejet de l’amalgame entre résistance et terrorisme se confond avec celle de l’ensemble du monde arabe, Liban officiel en tête. Mais là où les voies risquent de diverger fortement, c’est quand il s’agit de définir non pas seulement cette distinction sémantique, mais sa portée pratique. En effet, la plupart des pays arabes, Liban compris, soutiennent que la vraie lutte contre le terrorisme passe par la réalisation d’une paix juste dans la région. Ce qui implique, au-delà de la récupération du droit arabe, cette reconnaissance de l’État d’Israël que le Hezb rejette bien évidemment. Depuis l’ayatollah Khomeyni on sait en effet que les mouvements qui s’inscrivent dans la mouvance de la République islamique refusent tout processus de paix régionale. Un point de vue que ni Beyrouth ni Damas, partenaires de la conférence de Madrid, ne partagent. Quoi qu’il en soit, pour le moment, les Américains et leur alter ego britannique se montrent coulants, conciliants au possible. Ils parlent favorablement d’un État palestinien et ne parlent pas du tout du Hezbollah. Pour tenter d’obtenir sinon une participation massive du monde arabe et islamique à leur projet de coalition antiterrorisme, du moins un «bon de sortie» comme disent les cyclistes, contre les taliban et Ben Laden. Toujours pour faire risette à la clientèle, les Américains, indiquent des sources informées, applaudissent des deux mains à la coopération que les autorités libanaises déploient sur le plan policier, dans le cadre des enquêtes antiterroristes en cours. Et cela au moment où ces mêmes autorités déclarent ne pratiquement rien savoir sur les noms de suspects qui leur sont soumis. Et laissent de plus entendre que les Occidentaux devraient à leur tour se montrer coopératifs pour interpeller des suspects recherchés par le Liban, comme Ghassan Touma, pour ne citer que lui. Cependant, il reste à l’actif du Liban officiel, on ne peut le nier, d’avoir nettoyé les nids terroristes dans le jurd de Denniyé, au prix très lourd de quinze martyrs de l’armée. De même, les diplomates étrangers le relèvent volontiers, la sécurité des ambassades ou des diverses institutions occidentales est solidement assurée. On peut se féliciter enfin qu’il n’y ait pas de dissonances sur le plan intérieur et que le patriarche Sfeir soit le premier à défendre la légitimité de la résistance ainsi que les valeurs islamiques morales.
Le tumulte est si fort dehors que la récente opération du Hezbollah à Chebaa est passée quasiment inaperçue. Bien qu’elle fût lourde de sens. Puisqu’étant la première depuis juillet, elle marque la rupture de la trêve tacite, de facto, conclue sous la pression US via les décideurs régionaux. Alors, pourquoi ce timing ? Pour des raisons multiples, enchevêtrées, en...