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Actualités - CHRONOLOGIES

Colloque - Trois jours pour trouver les points communs entre le droit arabo-musulman et le droit français - Le Cedroma dément la théorie sur le choc des civilisations en matière juridique

Il n’y aura peut-être pas de sommet, mais les activités parallèles sont maintenues. Elles revêtent d’autant plus d’importance qu’elles ont gardé pour thème général le dialogue des cultures, dans une volonté évidente de rejeter une facile schématisation de la situation après la tragédie du 11 septembre. Les systèmes juridiques étant le reflet des sociétés, c’est à travers eux que les participants au colloque international organisé par le Cedroma à l’USJ, ont voulu rechercher les points communs entre les droits arabo-musulmans et le droit français. Miser sur ce qui unit, non sur ce qui divise, et essayer de comprendre ce qui sous-tend le fonctionnement des sociétés, c’est un peu le fil conducteur du colloque organisé par le Centre d’études des droits du monde arabe (rattaché à l’USJ), avec le concours du secrétariat général de l’organisation de la francophonie, de l’Ordre des avocats de Paris, de l’Union des avocats arabes et du barreau de Beyrouth. Placé sous le titre des «Dénominateurs communs entre les principes généraux du droit musulman et des droits des pays arabes et ceux du droit français», ce colloque, qui s’étend sur trois jours, accueille des sommités juridiques du monde arabe et occidental et cherche à dégager des normes ayant une valeur universelle. En tout cas, comme le souligne le bâtonnier Michel Lyan, il faut cesser de penser droit occidental et droit musulman en termes antagonistes. Avant d’entrer dans les thèmes spécifiques, le président du Cedroma, le Pr Fayez Hajj-Chahine (nommé depuis peu doyen de la faculté de droit) a prévu une introduction générale, avec une allocution des principales parties participant à ce colloque. Le droit, miroir des sociétés Il a donc ouvert les séances en présentant le Cedroma, avant de céder la place à Farouk Abou Issa qui a parlé au nom de l’Union des avocats arabes, à l’ancien bâtonnier de Paris Georges Flécheux qui a parlé au nom de l’Ordre des avocats de Paris, puis à Me Lyan pour le barreau de Beyrouth. Le bâtonnier Lyan a d’ailleurs véritablement donné le ton, évoquant longuement la théorie de Samuel Huntington, sur le choc des civilisations, actuellement très en vogue, pour la rejeter et préciser que la meilleure réponse à cette théorie reste le dialogue des cultures et des civilisations. Selon lui, un tel dialogue passe par la comparaison des règles de droit applicables, puisqu’elles reflètent la culture profonde de chaque groupe humain, ses acquis et son patrimoine. «C’est à travers la science juridique, et à ce qu’elle véhicule, que le dialogue des cultures doit son sens profond». Ce thème est d’ailleurs repris par le secrétaire général de l’organisation francophone Boutros Boutros-Ghali, qui bien qu’absent du colloque, a tenu à adresser un message aux participants. Il y rappelle notamment qu’en tant que professeur de droit en Égypte, il a pu constater l’interpénétration occidentale et orientale et il sait qu’aucun droit «n’est innocent de la société» qu’il est censé régir. Le ministre Tabbarah, qui a parlé au nom du président du Conseil Rafic Hariri qui parraine le colloque, a de son côté, insisté sur le fait que les relations entre les individus soulèvent les mêmes problèmes, quels que soient les pays ou les époques. Et la première tentative de dégager des principes universels s’est illustrée à travers la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Il a fallu toutefois attendre la longue allocution du Pr Sélim Jahel pour entrer véritablement dans le corps du sujet. L’ancien ministre de la Justice a entrepris avec rigueur et minutie une comparaison entre les principes fondamentaux du droit français et du droit musulman, dans les branches qui ne dépendent pas de données socio-politiques et ne sont pas à la portée des courants idéologiques qui traversent le droit. Les principes fondamentaux et les valeurs universelles Au fil de sa recherche, le Pr Jahel dévoile à ses auditeurs, libanais et étrangers, parmi lesquels des sommités en matière de droit, des juges et des avocats, les premiers principes généraux qui remontent au XIe siècle pour les jurisconsultes de l’islam. Ils étaient alors appelés les piliers du fiqh. On les retrouvera dans le «medjellé» (le code civil ottoman), encore en application dans certains pays du monde arabe, malgré l’abrogation du «medjellé» par la Turquie. Selon certains spécialistes, ces normes se retrouvent dans toutes les législations et s’inscrivent dans la logique de globalisation du droit. Pour le Pr Jahel, il s’agit d’instruments de reproduction du droit qui permettent, notamment dans le système musulman, de continuer à assurer son renouvellement, malgré l’arrêt officiel de l’ijtihad. Les principes généraux sont aussi un instrument de moralisation du droit et, toujours dans le système musulman, ils sont le reflet (même lointain) de la Loi de Dieu. Au cours de l’après-midi, les intervenants ont développé les principes généraux de la charia, selon le rite jaafarite (chiite) et dans le droit civil jordanien, ainsi que la charia et les droits de la femme et les principes généraux en matière de droit successoral. Des thèmes de plus en plus ciblés, pour poser les fondements d’un dialogue juridique. Le colloque sera clôturé samedi par un rapport de synthèse réalisé par le doyen Hajj-Chahine et un concert musical sous le patronage du ministre de la Culture Ghassan Salamé. Avec plus de 30 intervenants distribués sur neuf séances, ce colloque permettra certainement d’approfondir les dénominateurs communs dans les droits arabe et français, contredisant jusque dans les pratiques juridiques la fameuse théorie du choc des civilisations.
Il n’y aura peut-être pas de sommet, mais les activités parallèles sont maintenues. Elles revêtent d’autant plus d’importance qu’elles ont gardé pour thème général le dialogue des cultures, dans une volonté évidente de rejeter une facile schématisation de la situation après la tragédie du 11 septembre. Les systèmes juridiques étant le reflet des sociétés,...